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Le vœu de virginité de Marie

De tels vœux au sens actuel du terme sont anachroniques à ce moment de l’histoire où la virginité de Marie n’a pas le caractère religieux qu’elle acquerra à partir du IVe siècle après Jésus-Christ.

En Occident, Augustin (354 - 430) lit les paroles de Marie Lc 1,34 comme une intention de virginité :

Augustin (354 - 430) : Déjà avant d'être conçu, le Christ voulut se choisir, pour naître, une vierge consacrée à Dieu, comme l'indiquent les mots par lesquels elle répondit à l'ange qui lui annonçait la maternité imminente : "Comment cela se fera-t-il, je ne connais pas d'homme?" Elle ne se serait pas exprimée de cette manière si d'abord elle n'avait pas consacré à Dieu sa virginité. Elle s'était fiancée parce que la virginité n'était pas encore entrée dans les coutumes des Juifs ; mais s'était choisi un homme juste, qui n'aurait pas recouru à la violence pour lui prendre ce qu'elle avait dédié à Dieu, mieux, qui l'aurait protégée contre toute violence... L'obligation de rester vierge ne saurait venir de l'extérieur, pour que le Fils de Dieu assume la forme de serviteur par un miracle digne de l'événement. Mais il n'en fut pas ainsi: ce fut Marie elle-même qui se consacra à Dieu avant de savoir qu'elle aurait conçu. Augustin, De sancta virginitate 4,4. CSEL.41, 237-238; Sermo 291,5, PL 38, 1318; Sermo 225.2. PL 38.1096-1097.

Jean-Paul II, Audience générale du 24 juillet 1996

1. À l'ange qui lui annonce la conception et la naissance de Jésus, Marie pose une question: « Comment cela va-t-il se faire, puisque je ne connais pas d’homme ?» (Lc 1,34).

Cette question semble surprenante si nous nous souvenons des récits bibliques qui annoncent à des femmes stériles une naissance extraordinaire. Dans ces cas, il s'agit de femmes mariées, naturellement stériles, auxquelles le don d'un enfant est offert par Dieu par l'intermédiaire de la vie conjugale normale (cf. 1 S 1,19-20), en réponse à de ferventes prières (cf. Gn 15,2; 30, 22-23; 1S 1,10 ; Lc 1,13). La situation de Marie recevant l'annonce de l'ange est différente. Elle n'est pas une femme mariée qui a des problèmes de stérilité. [...]

À première vue, les paroles de Marie sembleraient exprimer seulement son état présent de virginité : Marie affirmerait qu'elle « ne connaît pas » d'homme, c'est-à-dire qu'elle est vierge. Mais le contexte dans lequel est posée la question: « Comment cela va-t-il se faire? », et l'affirmation qui suit : « Je ne connais pas d'homme», mettent en évidence aussi bien la virginité actuelle de Marie que son intention de rester vierge. L'expression qu'elle emploie, avec sa forme verbale au présent, laisse transparaître la permanence et la continuité de son statut.

2. En faisant état de cette difficulté, Marie, loin de s'opposer au projet divin, manifeste son intention d'y correspondre totalement. Du reste, la jeune fille de Nazareth a toujours vécu en pleine harmonie avec la volonté divine, et elle a choisi une vie virginale dans l'intention de plaire au Seigneur.

En réalité,

· son propos de virginité la dispose à accueillir la volonté divine « de tout son "moi" humain, féminin,

· et cette réponse de la foi comportait une coopération parfaite avec la grâce prévenante et secourable de Dieu

· et une disponibilité parfaite à l'action de l'Esprit Saint »[Redemptoris Mater, 13].

3. Pour mieux comprendre le contexte dans lequel mûrit la décision de Marie, il faut se souvenir que, à l'époque qui précède immédiatement le commencement de l'ère chrétienne, commence à se manifester dans certains milieux juifs une certaine vision positive de la virginité.

Par exemple, les Esséniens, dont on a retrouvé à Qumran de nombreux et importants témoignages historiques, vivaient dans le célibat ou limitaient l'usage du mariage, dans le but de mener une vie commune et de rechercher une plus grande intimité avec Dieu.

En outre, il existait en Égypte une communauté de femmes qui, en lien avec la spiritualité essénienne, observaient la continence. Ces femmes, les Thérapeutes, appartenant à une secte décrite par Philon d'Alexandrie (De vita contemplativa, 21-90), se consacraient à la contemplation et recherchaient la sagesse.

Il ne semble pas que Marie ait eu connaissance de ces groupes religieux juifs qui pratiquaient l'idéal du célibat et de la virginité. Mais le fait que Jean-Baptiste ait probablement vécu une vie célibataire, et que la communauté de ses disciples ait tenu une telle vie de célibat en grande estime, pourrait faire supposer que le propos virginal de Marie rentre lui aussi dans ce nouveau contexte culturel et religieux.

4. Mais l'aventure extraordinaire de la Vierge de Nazareth ne doit pas nous faire tomber dans l'erreur de lier complètement ses dispositions intimes à la mentalité ambiante, évacuant ainsi le caractère unique du mystère qui s'est réalisé en elle. En particulier, nous ne devons pas oublier que Marie avait reçu, dès le commencement de sa vie, une grâce surprenante, que l'ange a reconnue au moment de l'Annonciation. «Pleine de grâce» (Lc 1, 28), Marie fut enrichie d'une perfection de sainteté qui, selon l'interprétation de l'Église, remonte au premier moment de son existence: le privilège unique de l'Immaculée Conception a exercé une influence sur tout le développement de la vie spirituelle de la jeune femme de Nazareth.

On doit donc penser que ce qui conduisit Marie vers l'idéal de la virginité, fut une inspiration exceptionnelle de ce même Esprit Saint qui, au cours de l'histoire de l'Église, poussera tant de femmes sur la voie de la consécration virginale. La présence singulière de la grâce dans la vie de Marie amène à conclure à un engagement de la jeune fille dans la virginité. Comblée de dons exceptionnels par le Seigneur dès le commencement de son existence, elle s'est orientée vers une consécration totale d'elle-même - âme et corps - à Dieu, dans une offrande virginale. De plus, l'aspiration à la vie virginale était en harmonie avec cette «pauvreté» devant Dieu, à laquelle l'Ancien Testament accorde une grande valeur.

En s'engageant pleinement dans cette vie, Marie renonce aussi à la maternité, richesse personnelle de la femme, tant appréciée en Israël.