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Que ton nom soit sanctifié

La nomination

Nous avons vu la signification du mot « père ». Ce mot « père » devient le nom ultime de Dieu que la révélation biblique nous donne. Nous allons commencer par approfondir cette signification de l’invocation du nom. Quand je nomme quelqu’un, qu’est ce que cela veut dire ?

L'identification du sujet

Dès la naissance, l'enfant est nommé. Son identité propre s'affirme dans la nomination. F. Dolto souligne l'importance du prénom pour l'enfant :

"Son prénom, c'est le premier et l'ultime phonème qui soit en rapport avec sa vie pour lui et avec autrui, et qui la soutienne, car ce fut aussi, dès sa naissance, le signifiant de sa relation à sa mère (F. DOLTO, L'image inconsciente du corps, Seuil, 1984, p 46) ."

La nomination reconnaît l'humanité. Les prisonniers de guerre portent un numéro impersonnel. Par cette subversion le prisonnier perd son identité et sa personnalité. Il devient un objet anonyme, sans nom et donc innommable. D’une manière générale, effacer le nom de quelqu’un, c’est le gommer de l’histoire, le supprimer de la mémoire collective.

Le nom est reçu d'un autre. Il n'est jamais pris par soi-même. Il témoigne ainsi d'une dépendance. Le nom patronymique est reçu par la génération. Il intègre l'héritier dans une lignée, dans une histoire qu'il lui revient d'assumer. Le prénom est également reçu.

Une mise en présence

La nomination consiste à appeler quelqu'un à venir en présence. La nomination est un appel, une invocation. Elle instaure une relation. La déclinaison du nom est un des premiers actes de la communication. Il permet l'interpellation et sort l'autre de l'anonymat. La réponse à l'appel de son nom est un consentement à la nomination, une reconnaissance de soi-même dans le nom qui se déploie dans l'espace.

Le don de son nom lors d'une présentation est le premier acte de confiance, car l'autre possède désormais le pouvoir de l'interpellation. La connaissance du nom donne un pouvoir (Cf. F. ZONABEND, Temps et contretemps, dans Nom, prénom, Autrement, 147, 1994, p. 98 : "Nommer, c'est agir sur celui qu'on désigne. Chez les Mongols, les enfants ne prononcent pas le nom de leur père ou de leur mère, ni les cadets ceux de leur aîné, afin de ne pas attirer l'attention des mauvais esprits sur eux."). Elle est une forme d'appropriation. Le jeune enfant demande le nom des choses. C'est une façon pour lui de s'approprier les choses et de se familiariser avec le monde.

Dans les relations interhumaines, la connaissance du nom donne également un pouvoir. Car l'autre peut ainsi être interpellé, appelé à soi. Face à un enfant, il suffit parfois de prononcer son prénom pour lui rappeler un interdit qu'il tente de braver.

Le nom des choses et des êtres dans la bible

Dans la bible, le nom est loin d’être une désignation conventionnelle ou administrative. Il exprime le rôle d’un être dans l’univers. Dans le texte de la Genèse, une des premières actions de Dieu est de nommer les choses qu’il crée. Ne faisons-nous pas de même lorsqu’un enfant vient au monde ? Dieu nomme le jour, la nuit, ciel la terre. Puis il charge Adam de nommer les animaux.

Gn 1,5-10 Dieu appela la lumière jour et les ténèbres nuit . Il y eut un soir et il y eut un matin : premier jour et Dieu appela le firmament ciel . Il y eut un soir et il y eut un matin : deuxième jour. Dieu appela le continent terre et la masse des eaux mers, et Dieu vit que cela était bon.

Gn 2,19-20. Yahvé Dieu modela encore du sol toutes les bêtes sauvages et tous les oiseaux du ciel, et il les amena à l'homme pour voir comment celui-ci les appellerait : chacun devait porter le nom que l'homme lui aurait donné. L'homme donna des noms à tous les bestiaux, aux oiseaux du ciel et à toutes les bêtes sauvages, mais, pour un homme, il ne trouva pas l'aide qui lui fût assortie.

Le nom, c’est la personne elle-même dans son univers social, dans ses relations, dans son rôle. Il a une signification. Changer le nom, c’est changer la personnalité et son avenir. Abram le père élevé, devient Abraham, le père d’une multitude, Saraï devient Sarah par la même alliance. Saul le persécuteur des chrétiens, devient l’apôtre Paul. Jésus est un nom commun ; il signifie « Dieu sauve ». Rien que le nom évoque la vocation de la personne.

Étymologie du mot « Dieu »

Selon le dictionnaire des racines des langues indo-européennes, la racine est dei- et elle comporte l'idée de briller. De là dérive 3 thèmes :

1. dei-wo (ciel, lumineux, considéré comme divinité)
· sanskrit : devah (dieu)
· grec : dios (divin)
· latin : deus (dieu) dius, divus, divinus (divin) divinitas (divinité) divinar (deviner)

2. dyew (dieu du jour lumineux)
· sanskrit : dyauh (ciel lumineux)
· grec : zeus
· latin : Jupiter (ju + pater : dieu le père)
· français : jeudi (jour de Jupiter) jovial (qui concerne jupiter)
· germanique : tuesday (jour de Tiu : mardi)

3. dyen (jour lumineux)
· latin : diem, d'où dies (jour) diarium (journal, anglais : diary) diurnus (diurne, de jour)

Les noms de Dieu dans la bible

El

El (235 fois dans l'Ancien Testament); son utilisation montre qu'il comporte une notion de force, de puissance, de pouvoir. Élohim : C’est un mot pluriel, dont le singulier est Éloah. C’est le mot le plus employé pour désigner Dieu dans la bible ; on le retrouve dès le premier verset de la création en Gn 1,1. Les païens employaient parfois ce nom pour désigner leurs divinités.

La racine du mot est perdue. Eloah et Elohim pourrait signifier "Lui qui inspire la crainte et la révérence" ou "Lui en Qui l'on trouve refuge contre la peur."

Le pluriel El souligne :
· Un pluriel de majesté
· La Trinité, le Père, le Fils et l'Esprit. En Genèse 1:26 nous lisons : « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance ».
· Il s’agit peut-être aussi d’un reste de polythéisme.

Le Tout-puissant — El-Shaddaï

Dieu se fit connaître sous un autre nom aux patriarches ; ce nom est mentionné pour la première fois en Genèse 17:1 : « Et l’Éternel apparut à Abram, et lui dit : Je suis le Dieu Tout-puissant (El Shaddaï )». Il semble que le mot « El » signifie la force, la toute-puissance. Certains pensent que « Shaddaï » a le même sens, tandis que d’autres préfèrent le traduire par autosuffisance ou autosuffisant.

Le Très-haut — Elion

« El » s’emploie également avec « ELION » et se traduit alors par le « Dieu Très-haut ».

Ps 47,2 C'est Yahvé, le Très-Haut, le redoutable, le grand Roi sur toute la terre.

Au Psaume 91, on trouve ce titre de « Très-haut » en rapport avec Shaddaï (le Tout-puissant) :

Psaumes 91,1. Qui habite le secret d'Elyôn passe la nuit à l'ombre de Shaddaï

Ces exemples sont intéressants en ce qu’ils prouvent que c’est Dieu, le Dieu unique, qui se révèle aux hommes sous ces noms différents désignant des relations distinctes.

Seigneur — Adonaï

« Adonaï » est traduit par « Seigneur ». En ce qui concerne la racine du mot, il signifie Maître, Gouverneur, Propriétaire. Mais la forme « Adonaï » ne s’emploie que pour Dieu, et Dieu au sens de Celui qui a pris le pouvoir et qui est dans une relation de Seigneur vis-à-vis de ceux qui invoquent Son nom.

Gn 15,2. Abram répondit : Mon Seigneur (Adonaï) Yahvé, que me donnerais-tu ? Je m'en vais sans enfant...

Je suis celui qui suis - YHWH

Avant de s’appeler Yahvé, dieu, et non pas Dieu qui est devenu un nom propre, démarre dans la vie sans nom. De la période d’Abraham à Moïse, il prend diverses appellations : Dieu des ancêtres, Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, Terreur d’Isaac ou Fort de Jacob. Il refuse de livrer son nom Face à Jacob (Gn 32,30) et ce n’est que dans l’aventure de l’exode, sur le mont Horeb, près d’un buisson ardent, que Dieu se révèle à Moïse par cette parole :

Ex 3,13-14 « Moïse dit à Dieu : « Voici ! Je vais aller vers les fils d’Israël et je leur dirai : le Dieu de vos pères m’a envoyé vers vous. S’ils me disent : Quel est son nom ? que leur dirai-je ? » Dieu dit à Moïse : « Je suis qui Je serai. » Il dit : « Tu parleras ainsi aux fils d’Israël : JE SUIS m'a envoyé vers vous. »

Ce nom reste plutôt énigmatique et il ne viendrait à personne l’idée d’invoquer Dieu par « Je suis qui je serai ». La révélation du nom dans l'épisode de la vocation de Moïse tente de donner le sens du nom de Yahvé en le rattachant à une forme ancienne du verbe être (hâwâh). Dire « je suis » ne dit rien et pourtant ce verbe conjugué à la première personne de l’indicatif présent dit tout. Il affirme une présence en tous lieux et en tout temps. Traduite en hébreu, cette forme d’interpellation deviendra Yahvé. En ce moment d’exode du peuple élu, Dieu se contente de dire : «Je suis là, présent, avec vous».

En livrant son nom, Dieu se fait un peu plus proche tout en gardant ses distances. Proche parce qu’il offre la possibilité de l'invocation et de l'interpellation dans la prière. Les orants s'appuient sur la révélation du nom pour invoquer Dieu, le louer, le supplier (par ex. Ps 86). Distant parce que le nom préserve son mystère. Il ne révèle nullement les multiples formes et figures de l'univers. Il ne résout pas l'énigme de l'au-delà. Il ne sacralise pas les éléments cosmiques : l'eau, la terre, l'air et le feu, contrairement aux autres divinités. Le nom de Dieu manifeste sa discrétion par rapport à la création. Dieu se préserve ainsi de toute tentative humaine de s'accaparer le nom de Dieu.

Dans la culture orientale, le nom fait littéralement corps avec la personne elle-même, en soulignant les circonstances de sa naissance, sa place ou son rôle dans le monde. Le nom « Yahvé », c’est en somme Dieu lui-même ; il est donc sacré avec l’interdiction de le prononcer à tort :

Ex 20,7 Tu ne prononceras pas le nom de Yahvé ton Dieu à faux, car Yahvé ne laisse pas impuni celui qui prononce son nom à faux. Lev 24,11-16 Or le fils de l'Israélite blasphéma le Nom et le maudit. On le conduisit alors à Moïse le nom de la mère était Shelomit, fille de Dibri, de la tribu de Dan. On le mit sous bonne garde pour n'en décider que sur l'ordre de Yahvé. Yahvé parla à Moïse et dit : Fais sortir du camp celui qui a prononcé la malédiction. Tous ceux qui l'ont entendu poseront leurs mains sur sa tête et toute la communauté le lapidera. Puis tu parleras ainsi aux Israélites : Tout homme qui maudit son Dieu portera le poids de son péché. Qui blasphème le nom de Yahvé devra mourir, toute la communauté le lapidera. Qu'il soit étranger ou citoyen, il mourra s'il blasphème le Nom ».

Cette interdiction, avec une sentence poussée à l’accès, montre toute la valeur du nom qui fait corps avec la personne elle-même. Par respect, le judaïsme tendra à ne plus prononcer le nom de Yahvé et le remplacera par « Adonaï » (Mon Seigneur), Elhohim » (Dieu) ou « Kyrios » (Seigneur).

Ps 8,2 Yahvé, notre Seigneur, qu'il est puissant ton nom par toute la terre
Ps 66,1. Acclamez Dieu, toute la terre, 2. chantez à la gloire de son nom, rendez-lui sa louange de gloire, 3. dites à Dieu : Que tu es redoutable! A la mesure de ta force, tes œuvres. Tes ennemis se font tes flatteurs; 4. toute la terre se prosterne devant toi, elle te chante, elle chante pour ton nom.
Ps 33,20. Notre âme attend Yahvé, notre secours et bouclier, c'est lui; 21. en lui, la joie de notre cœur, en son nom de sainteté notre foi.

Tableau récapitulatif



Classification Expression française Equivalents en hébreu
Forme simple Dieu
Eternel
Seigneur
El, Elah ou Elohim
YHWH
Adon ou Adonaï
Forme composée avec El Dieu Tout-Puissant
Dieu Très-Haut
Dieu d'éternité
Dieu puissant
El Schaddaï
El Elyon
El Olam
El Gibbor
Forme composée avec YHWH Eternel Dieu
Seigneur Eternel
Seigneur des armées
YHWH Elohim
Adonaï YHWH
YHWH Sabaoth

La sanctification du nom

Ici, il nous est demandé de "sanctifier" ce nom de Dieu, expression qui nécessite quelques explications. En effet, "sanctifier" signifie "rendre saint", et on ne voit pas forcément très bien comment nous pourrions rendre saint ce qui est saint par excellence, ni en quoi la sainteté de Dieu pourrait dépendre de nous.

Mais c'est que le mot "saint" a une signification bien précise dans la Bible qui n'est pas vraiment celle que le christianisme lui a donnée par la suite. "Saint", en effet, aujourd'hui évoque pour nous l'idée de perfection, de divinité, etc... mais "Saint" signifie dans la Bible tout simplement :"être à part", et "sanctifier" : mettre à part. Le mot sémitique Qodes, chose sainte, sainteté, dérive d’une racine signifiant sans doute « couper, séparer ». Les choses saintes sont celles que l’on ne touche pas ou que l’on approche que sous certaines conditions notamment dans le cadre des rites. Nous nous rapprochons ici de la notion de "sacré".

C'est ainsi que dans le Nouveau Testament, ceux qui sont appelés les "saints" ne sont pas les parfaits, mais tous les chrétiens, dans la mesure, ou, précisément, être chrétien est se différencier du monde. Ainsi peut-on trouver en Romains 12 (v2) une expression particulièrement explicite de ce qu'est la sanctification:

Ro 12,2 Et ne vous modelez pas sur le monde présent, mais que le renouvellement de votre jugement vous transforme et vous fasse discerner quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, ce qui lui plaît, ce qui est parfait.

"Sanctifier le nom de Dieu" veut ainsi dire : le mettre à part, le différencier des autres divinités et des réalités qui font le quotidien de notre vie.

De même, quand il est dit dans les dix commandements : Souviens toi du jour du Seigneur pour le sanctifier, ce qui nous est commandé, c'est de mettre à part une journée dans la semaine pour la consacrer à Dieu, faire en sorte que tous les jours ne se ressemblent pas, mais qu'il y en ait un différent des autres, pour que notre être ne se dilue pas dans l'action matérielle, mais garde une part de cette autre dimension du spirituel.

De même, il est vrai que dans notre vie, nous avons de très nombreuses préoccupations de tous ordres, plus ou moins triviales, plus ou moins élevées, et il convient que la préoccupation spirituelle ait une place à part.

Ce que n'envisage même pas le Notre Père, c'est que parmi toutes ces préoccupations, celle de Dieu ne s'y trouve pas. Ce qu'il faut, c'est que la réalité de Dieu dans nos vies, ne soit pas seulement présente, mais ait une place de choix. Si nous mettons la préoccupation spirituelle au même niveau que les autres, nous manquons à notre vocation, et nous rendons le spirituel inactif. Ce que nous souhaitons dans la prière, c'est que la préoccupation de Dieu soit d'un autre ordre, pas une parmi d'autres, mais qu'elle ait un statut spécial. Dieu doit être notre "préoccupation ultime" pour reprendre l'expression du grand théologien Paul Tillich, la préoccupation des préoccupations, celle qui est au-dessus de toutes les autres, que dans nos cœurs, la préoccupation de Dieu soit à part des autres, à une place privilégiée, centrale.

Il ne s'agit pas de renoncer à toute préoccupation matérielle dans nos vies, de sacrifier la dimension physique de notre existence, mais simplement de mettre au-dessus de tout la préoccupation de la fidélité à Dieu. Prendre autre chose que Dieu pour préoccupation ultime, c'est le propre de l'idolâtrie, et dans ce sens, nous sommes loin d'avoir dépassé le stade du danger de l'idolâtrie sans cesse dénoncée dans l'Écriture.

La préoccupation ultime du Nom de Dieu n'est pas là pour annihiler toutes les autres préoccupations, ou nous faire renoncer au monde dans son ensemble, mais pour les organiser et leur donner leurs sens propres.

Jérémie 10:6 Nul n'est semblable à toi, ô Éternel! Tu es grand, et ton nom est grand par ta puissance.

1 Rois 8 ,41 Quand l'étranger, qui n'est pas de ton peuple d'Israël, viendra d'un pays lointain, à cause de ton nom, 42 car on saura que ton nom est grand, ta main forte, et ton bras étendu, quand il viendra prier dans cette maison, - 43 exauce-le des cieux, du lieu de ta demeure, et accorde à cet étranger tout ce qu'il te demandera, afin que tous les peuples de la terre connaissent ton nom pour te craindre, comme ton peuple d'Israël, et sachent que ton nom est invoqué sur cette maison que j'ai bâtie !

Psaume 99,2 L'Eternel est grand dans Sion, Il est élevé au-dessus de tous les peuples. 3 Qu'on célèbre ton nom grand et redoutable! Il est saint !

Psaume 8,2 Ô Seigneur, notre Dieu, qu'il est grand ton nom par toute la terre ! Jusqu'aux cieux, ta splendeur est chantée.

Regard juif

Qu’est-ce que cela évoque pour le juif ? Immédiatement une formule liturgique très ancienne qui, sans doute, existait déjà du temps de Jésus. On la trouve dans le Kaddish, prière de sanctification, prière quotidienne qui scande les différentes parties de l’office, qui est peut-être la plus familière à tout juif parce qu’elle est devenue (non pas à l’époque de Jésus, mais plus tard) la prière que dit tout juif qui perd un être cher. Prière du deuil, qui, dans son contenu, ne parle pas une seule fois de la mort, mais au contraire de l’espérance en la sanctification du nom et en la venue du règne de Dieu sur la terre, permettant ainsi à toute personne endeuillée de surmonter sa propre douleur en s’insérant dans une communauté, dans un peuple qui existe, agit, vit en espérant la venue du règne. « Que ton nom soit sanctifié » est donc presque textuellement dans le Kaddish : « Qu’il soit grandi et sanctifié, son grand nom ».

La sanctification du nom s’effectue dans trois directions.

a) Sanctifier la vie : cela signifie insérer la présence de Dieu dans tous les gestes de l’existence, ne pas profaner le nom de Dieu dans l’existence que l’on mène. C’est ce qui explique et donne sens à tous les commandements qui régissent la vie quotidienne et “profane” du juif., cette vie qui par-là même n’est plus profane mais consacrée.

b) Sanctifier le temps : le temps, comme l’écrit merveilleusement un de nos théologiens Abraham Heschel*, « est le temps à bâtir » : temps confié à l’homme, il doit être marqué par le Shabbat, les fêtes qu’on appelle « convocations de l’Éternel » ; sanctification du temps dans le quotidien de l’existence en portant ainsi le témoignage de la présence de Dieu au monde. C’est bien là le sens de ce que nous disons deux fois par jour dans le Shema Israël, cette profession de foi juive dont le premier paragraphe est tiré du Deutéronome 4, 6.

c) Sanctifier le nom : Oui, depuis l’époque des Maccabées (IIe siècle avant notre ère), en passant par Rabbi Akiba (IIe siècle de notre ère), en passant par les bûchers de l’Inquisition, et, plus près de nous, hélas, par l’épreuve de la Shoah, des juifs ont préféré mourir pour maintenir leur identité et proclamer leur foi. Plutôt mourir que d’enfreindre les lois fondamentales qui justifient leur présence dans le monde.

Dans le Talmud même, précisément à l’époque qui était fertile, hélas, en menaces d’extinction physique et spirituelle, les rabbins ont défini trois commandements qu’en aucun cas le juif ne doit enfreindre, même si c’est au péril de sa vie, pour ne pas être considéré comme reniant Dieu, reniant l’alliance pour se sauver lui-même. Ces trois commandements sont :
• l’interdiction de l’idolâtrie ;
• l’interdiction de répandre le sang si on vous y oblige ;
• l’interdiction de pratiques sexuelles contraires aux lois fondamentales de l’éthique humaine telles qu’elles nous sont livrées notamment dans le Lévitique.

Pour conclure ce paragraphe; je dirai que tout au long des siècles et aujourd’hui encore, Israël prie Dieu de le laisser sanctifier son nom afin qu’il soit sanctifié aux yeux des hommes.

Commentaire de Colette KESSLER.

Voir aussi une étude sur le nom Yahvé