La pornographie et ses dangers

Le terme pornographie vient de deux racines grecques "porne" (prostituée) et "graphein" (représenter). Une Maison close en grec ancien se disait un "porneion". La pornographie se distingue de l'érotisme qui désigne le désir sexuel, ainsi que le langage des sens au service du plaisir. Selon le dictionnaire de l'Académie française, la pornographie est une "représentation directe, voire brutale, de scènes, de sujets à caractère sexuel et délibérément obscènes".

La pornographie présente plusieurs dangers :

Des attentes irréalistes

écran porno Les hommes sont des étalons toujours en érection et les femmes sont toujours disponibles pour satisfaire tous les fantasmes. Le souci de la performance prime sur la fragilité inhérente à la vie humaine. Certains se fient à ce qu’ils voient sur la Toile et essaient de le reproduire dans la vraie vie, avec un risque fort de désillusion. Une poitrine généreuse, des fesses musclées, un pénis surdimensionné, une épilation intégrale ou encore un ventre plat et musclé : le physique avantageux des actrices et des acteurs de films X ne laissent pas de place aux défauts, ni aux défaillances.

Un plaisir facile et immédiat

Le plaisir pour le plaisir en l'absence de tout projet. Le plaisir n'est pas un facteur d'unité dans la mesure où chacun jouit dans l'ignorance de l'autre. Le porno permet de jouir en toutes circonstances, avec ou sans son partenaire. Par ailleurs, en pornographie, les acteurs sont directement dans le feu de l'action : les préliminaires, l'ambiance, la mise en scène sont oblitérés au profit d'une "mise en bouche" immédiate.

Dans la relation mécanique en mode pornographique, on va chercher la stimulation maximale, mais on éteint toutes les nuances. Les rapports vont être assez courts, monotones et pas passionnants pour les femmes. L’érotisme est le règne de la lenteur. On va être attentif aux petites perceptions, que l’on nomme qualia. C’est par exemple s’imprégner du parfum et de l’odeur de l’autre, être attentif à sa respiration, au grain de sa peau. La dimension esthétique surgit à la faveur d’une certaine lenteur. Voir l'article de Pascale Tournier.

Une mise en scène violente et sexiste

Une vision inégalitaire des rapports entre les sexes – les hommes y sont dominants et les femmes leurs sont soumises.

Au début des années 1990, et notamment à partir des années 1995 et 1996, on assiste à une évolution des films X vers une iconographie « ultra-génitale » et « ultra-violente ». C’est le début de l’escalade des pratiques : des pénétrations vaginales à la sodomie, à la triple pénétration, jusqu’au fist-fucking et à la scatologie. C’était le triomphe du « hard crade ». Dans le porno, l’autre est dénié en tant qu’autre et en tant que sujet. La consommation de l’objet-chose transforme le désir en besoin et convoitise.

En déniant toute forme d’interdit, et notamment l’interdit de la consommation d’autrui, la pornographie engendre une sexualité sans mystère, une sexualité qui n’est rien d’autre que la mise en acte d’une pulsion a-subjective, d’une activité régie par la violence qu’on exerce sur autrui. Michela Marzano, La nouvelle pornographie et l'escalade des pratiques : corps, violence et réalité.

La pornographie est une éducation au non-consentement. On montre à longueur de films que les femmes sont là pour servir. Et que si on s’en sert bien, en étant bien viril, elles regretteront d’avoir dit non. Cette idéologie détestable est responsable d’une part de l’augmentation des violences sexuelles entre les sexes. Journal La Croix, 23/10/2023.

Une parcellisation du corps

L’image pornographique « comme une image écrasante car centrée sur le seul caractère visuel et présentant des scènes sans enjeux scénaristiques, sans formalisation qui mettrait en scène l’image. En effet, le caractère cru de sexes filmés en gros plan s’oppose au caractère voilé de la séduction sexuelle tempérée par la tension existant entre ce qui est montré et ce qui est caché. Cet écart serait un organisateur du désir, tandis que l’image pornographique aurait un effet de rabattement du fantasme sur le réel, à montrer des images non seulement crues mais faisant du corps un objet partiel, découpé par des gros plans. HOUSSIER F., 2008, « Introduction », dans La violence de l’image, dir. F. Houssier, Paris, Edit. In Press, p. 11-21.

Un risque de dépendance : toujours plus

La pornographie peut devenir une réelle addiction. Une personne addicte familiarise son cerveau avec des plaisirs virtuels au détriment de la réalité. Cela peut conduire à une baisse de libido, ainsi qu’à des problèmes d’érection chez les hommes, lorsqu’ils se retrouvent face à des situations de sexualité « naturelle ». Cela peut engendrer des difficultés dans un couple ou une incapacité à nouer des relations intimes avec autrui. De plus, l'addiction entraîne un besoin de consommer toujours plus, pour retrouver le plaisir initial. Le cerveau a en effet besoin d’une dose de plus en plus importante, comme pour toute drogue. Cela peut mener à des pratiques de plus en plus extrêmes, voire dangereuses, et à banaliser des comportements qui n’ont rien d’anodin, tel que le sado-masochisme. Le fait de ne plus retrouver de plaisir en dehors du monde virtuel peut également être une véritable source d’ennui et de profonde tristesse. L'addiction peut créer de l’anxiété, de l’irritabilité, de l’isolement, voire engendrer une dépression.

« À la puberté, le cerveau est intrinsèquement vulnérable aux addictions et la pornographie est un “produit” très addictogène. L’addiction touche surtout les plus vulnérables sur le plan psychique. Elle sert de pansement pour anesthésier un mal-être émotionnel préexistant. Lorsqu’elle concerne la sexualité, elle entraîne un sentiment de honte et de culpabilité d’autant plus fort qu’elle renvoie à quelque chose d’animal. » Journal La Croix, Grandir avec la pornographie, 23/10/2023.

La pornographie est par nature un outil masturbatoire. L’exposition à des images pornographiques induit une masturbation, un acte physique qui sécrète de la dopamine, appelée également "l'hormone du bonheur". Thérèse Hargot.

Une perte de la spiritualité

Corps et âme. La personne est tout à la fois corps et âme, chair et esprit, sans qu'il soit possible de distinguer l'un de l'autre. Se donner à l'autre à travers la sexualité, c'est se donner en totalité. Or la pornographie dissèque la personne pour ne retenir que l'aspect charnel avec le risque de lui faire perdre toute "esthétique spirituelle".

Art et pornographie

Au-delà du problème de la pornographie, le corps humain et les relations sexuelles ne constituent pas un sujet tabou qu’il ne faudrait pas aborder par l’écrit, la parole ou l’image.

Au nom de la vérité, l’art a le droit et le devoir de reproduire le corps humain ainsi que l’amour de l’homme et de la femme tels qu’ils sont en réalité ; il a le droit et le devoir d’en dire toute la vérité. Le corps est une partie authentique de la vérité sur l’homme, comme les éléments sensuels et sexuels sont une partie authentique de l’amour humain. Mais il n’est pas juste que cette partie voile l’ensemble, et c’est précisément ce qui a souvent lieu dans l’art. Le corps humain en lui-même n’est pas impudique et la réaction de la sensualité, comme la sensualité elle-même, ne le sont pas non plus ; l’impudeur naît dans la volonté qui fait sienne la réaction de la sensualité et réduit l’autre personne, à cause de son corps et de son sexe, au rôle d’objet de jouissance. Karol WOJTYLA, Amour et responsabilité, Stock, 1978, p. 179.

Article de B.J. Foster

Il existe de belles plages dans le monde qui recèlent des dangers cachés. Lorsque l’eau inonde le sable sous la surface, les grains de sable se séparent. Le résultat est un mélange boueux de sable et d'eau qui ne peut pas supporter le poids d’une personne. Quand quelqu’un marche dessus, il s’enfonce. C’est un piège connu sous le nom de sables mouvants. Au fur et à mesure que la personne s'enfonce, elle pousse l'eau vers l'extérieur, créant un effet de vide qui enserre de plus en plus sa victime. Parfois, il suffit de quelques instants pour plonger quelqu’un dans une situation désespérée.

C’est ce que la pornographie fait subir à des millions de personnes chaque jour. Cela commence assez simplement sans aucun signe de danger, un film sur le câble ou un clic de souris. On se dit qu’il n’y a rien de mal à ça, ou peut-être que ce n’est pas si grave, même si on garde le secret. Très vite, ce qui a commencé comme « contrôlable » et « ici et là » se transforme en une habitude de plus en plus récurrente. Mais l’utilisateur n’est pas le seul concerné. Les conséquences pour notre société dans son ensemble sont alarmantes. Connaître les dangers et les prendre au sérieux nous permettra d’éviter de nous laisser prendre au piège. Le sort de la prochaine génération dépend de nous. Voici 4 dangers de la pornographie.

1. Dépendance

Je n'ai pas parlé à un seul homme qui regardait habituellement du porno et qui m'ait dit qu'il était facile d'arrêter. Même en dépit d'un désir intense de vivre sans porno en raison de la façon dont cela affectait sa vie de manière négative, tous les hommes à qui j'ai parlé ont dit que c'était une « lutte ». Beaucoup n’ont même pas réussi à arrêter.

2. Relations ruinées

Les relations intimes demandent un investissement en temps et de la volonté. Elles impliquent des sacrifices et de la vulnérabilité. Toutes ces choses sont difficiles. Le porno est un moyen rapide et peu coûteux d’éviter tout cela afin d’obtenir une poussée momentanée de sentiments similaires à ceux de l’intimité. Le problème, c’est que les désirs qu’on retrouverait dans une relation sont remplacés par du porno. Le sexe devient une quête égoïste de recréation de scènes de films (s’il ne disparaît pas complètement).

La relation sexuelle se dévalorise lorsque la communion cesse d’être le but. Les couples s'éloignent, d'autant plus que la plupart des visionnages de porno se font en secret. Un sondage réalisé en 2003 auprès de 350 avocats spécialisés dans le divorce à l'American Academy of Matrimony Lawyers, a révélé qu'un grand nombre de leurs cas de divorce impliquaient une personne ayant une consommation compulsive de porno. C'est jouer avec le feu.

3. Soutenir la traite des êtres humains

Chaque clic vers un site pornographique contribue à détruire des vies. Même la plupart de ceux qui se sont volontairement lancés dans l’industrie du porno disent avoir été contraints de faire des choses blessantes qu’ils n’auraient jamais voulu faire.

4. La prochaine génération

Les garçons et les filles sont exposés très tôt à la pornographie et en deviennent accros. Trouver un adolescent qui n’a pas été exposé à la pornographie est une tâche presque impossible. On leur enseigne le sexe et la sexualité à partir de ce qu'ils voient sur Internet et dans les jeux vidéo graphiques. Ils jouent à être sexuels en s'envoyant et en postant des photos nues et en se livrant à des actes sexuels dès l'âge de onze ans. Ils font tout cela sans que le cerveau soit suffisamment développé pour comprendre les conséquences à long terme. Cela contribue à la destruction d’une génération déficiente dans ce que signifie construire l’intimité.

Le problème, c'est nous. Les adultes leur ont dit quoi faire. Les adultes produisent le matériel et le commercialisent auprès des enfants. Les adultes les ont sexualisés et ils se moulent simplement à la culture que nous avons formée et approuvée. Selon Homeland Security Investigations, les cas d’exploitation d’enfants continuent d’augmenter de plus en plus. L’année dernière, le terme de recherche numéro un parmi les recherches pornographiques était « adolescent ». Cela devrait choquer notre conscience collective, mais je crains qu’en tant que société, nous l’ayons brûlée.

https://www.allprodad.com/4-dangers-of-pornography/

Rapport du Sénat - 27/09/2022

Pour la première fois dans l'histoire parlementaire, un rapport d'information est entièrement consacré aux pratiques de l'industrie pornographique. L'objectif du rapport est, avant tout, d'alerter le Gouvernement et l'opinion publique sur les violences perpétrées et véhiculées par et dans l'industrie pornographique, ainsi que sur les représentations sexistes, racistes, homophobes et inégalitaires qu'elle promeut. Il s'agit d'établir un constat clair des pratiques et normes aujourd'hui générées par cette industrie.

Lors de leur audition par la délégation aux droits des femmes le 20 janvier 2022, les associations féministes entendues par les rapporteures ont fait part de violences sexuelles commanditées dans le milieu du porno et de témoignages de femmes ayant participé à des tournages pornographiques et ayant subi des violences physiques, verbales et psychologiques.

Sandrine Goldschmidt, chargée de communication au Mouvement du Nid, a déclaré devant la délégation (du Sénat) : « ces violences sont extrêmement répandues. Elles sont la règle dans cette industrie, pas l’exception. (…) Il s’agit de violences sexuelles commanditées. Le consentement est extorqué par l’argent et l’exploitation de la vulnérabilité. Des violences extrêmes sont infligées à des femmes qui sont filmées. (…) Le fait que ces actes sexuels tarifés soient obtenus dans le cadre de l’industrie du film ne les rend pas légitimes, ni légaux. C’est selon nous un facteur aggravant de la violence. »

Rapport du Sénat