Qui es aux cieux

Nous constatons que le mot est au pluriel. Hébreu : schamaïm ; Grec: ouranos ; Latin: caeli. ÿp>

La création du ciel

Création

Gn 1,1-8 Au commencement, Dieu créa les cieux et la terre... Dieu dit : Qu'il y ait une étendue entre les eaux, et qu'elle sépare les eaux d'avec les eaux. Et Dieu fit l'étendue, et il sépara les eaux qui sont au-dessous de l'étendue d'avec les eaux qui sont au-dessus de l'étendue. Et cela fut ainsi. Dieu appela l'étendue ciel.

De ce verset nous pouvons tirer les conclusions suivantes :

1. Dieu créé des cieux et non pas un ciel. Le mot hébreu est shamayim, forme plurielle signifie "hauteurs, élévations".

2. Les auteurs bibliques croyaient que l'eau tombant du ciel était stockée et retenue par une "étendue" (la voûte céleste). Des vannes permettaient aux dieux de faire tomber la pluie sur terre. L'étendue sépare les eaux d'en haut et les eaux d'en bas.

3. Le mot hébreu raqia désigne cette étendue. Le latin le traduit par firmament (en latin firmare: rendre ferme) dans la Vulgate.

La bible distingue plusieurs couches du ciel au-dessus de la terre, qui se recoupent ou se superposent :

1. Le ciel au sens de firmament qui sépare les eaux d’en haut et les eaux d’en bas

2. Le ciel proche où volent les oiseaux, où se déplacent les nuages : Mt 6,26 Regardez les oiseaux du ciel : ils ne sèment ni ne...

3. Le ciel des astres mobiles, lune, soleil et planètes, qui déterminent les saisons, les jours, les mois et les années. Rappellons que les 7 jours de la semaines correspondent aux 7 astres connus à cette époque (lundi = lune, mardi = mars, etc.)

4. La demeure de Dieu

Le ciel demeure de Dieu

C’est du ciel que Dieu agit librement et souverainement (Ps 115,3), observe les êtres humains (Ps 14,2 ; 33,13 ; 53,3 ; 80,15 ; 102,20 ; 113,16), envoie son salut (Ps 57,4), fait connaître son jugement (76,9), donne ses ordres (Ps 78,23), fait du bien (Ps 78,24), intervient en faveur de son peuple (Ps 80,15), manifeste sa justice (Ps 85,12 ; 97,6), sa bonté et sa fidélité (Ps 36,6).

Dt 26,15 De la demeure de ta sainteté, des cieux, regarde et bénis Israël ton peuple, ainsi que la terre que tu nous as donnée comme tu l'avais juré à nos pères, terre qui ruisselle de lait et de miel.

1 R 8.30 Depuis le lieu où tu demeures, depuis le ciel, entends notre prière et veuille pardonner.

1 R 22.19 J’ai vu l’Éternel siégeant sur son trône, tandis que toute l’armée des êtres célestes se tenait près de lui, à sa droite et à sa gauche.

Ps 115,16. Le ciel, c'est le ciel de Yahvé, la terre, il l'a donnée aux fils d'Adam.

2 Ch 2,5 Qui serait en mesure de lui bâtir une maison quand les cieux et les cieux des cieux ne le peuvent contenir ?

Is 66,1-2 Ainsi parle Yahvé : Le ciel est mon trône, et la terre l'escabeau de mes pieds. Quelle maison pourriez-vous me bâtir, et quel pourrait être le lieu de mon repos, quand tout cela, c'est ma main qui l'a fait, quand tout cela est à moi, oracle de Yahvé!

Né 9,6 C'est toi, Eternel, toi seul, qui as fait les cieux, les cieux des cieux et toute leur armée, la terre et tout ce qui est sur elle, les mers et tout ce qu'elles renferment. Tu donnes la vie à toutes ces choses, et l'armée des cieux se prosterne devant toi.

Lc 2,14 Gloire à Dieu au plus haut des cieux et sur la terre paix aux hommes objets de sa complaisance ! »

Act 7,55-56 Tout rempli de l'Esprit Saint, il (Etienne) fixa son regard vers le ciel ; il vit alors la gloire de Dieu et Jésus debout à la droite de Dieu. « Ah ! dit-il, je vois les cieux ouverts et le Fils de l'homme debout à la droite de Dieu. »

C’est en rapport avec Dieu principalement que le Nouveau Testament, tout comme l’Ancien, parle du ciel. Cela se retrouve surtout chez Matthieu où le Royaume proclamé par Jésus est presque toujours (33 fois sur 36) le « Royaume des cieux » plutôt que le « Royaume de Dieu ». Comme dans le Pater (Mt 6, 9), Dieu y est désigné près d’une quinzaine de fois comme le « Père qui est dans les cieux ». Dans les quatre Évangiles, c’est à partir du ciel que se fait entendre la voix de Dieu (Mc 1, 11 ; Mt 3, 17 ; Lc 3, 22 ; Jn 12, 28 ; cf. He 12, 25). Pour le Nouveau Testament, comme pour l’Ancien dont il reprend les formules, Dieu a son trône dans les cieux (Mt 5, 34 ; Ac 7, 49 ; He 8, 1. « Dieu du ciel » (Ap 16, 11), c’est de là qu’il régit l’univers et l’humanité entière (Mt 11, 25 ; Lc 10, 21 ; Ac 17, 24 ; Ep 6, 9 ; Col 4, 1). Dans la vision grandiose qui termine l’Apocalypse, c’est « du ciel, de chez Dieu », que doit descendre la Jérusalem nouvelle, toute resplendissante de la gloire même de Dieu (Ap 21, 2.16).

Pour y être omniprésente, l’association entre Dieu et le ciel n’est pas propre à la Bible. Pour la conscience spontanée, l’altitude des cieux, dont la voûte domine en permanence l’expérience terrestre, apparaît depuis toujours comme le symbole de la transcendance, attribut par excellence du divin. Comme le ciel est au-dessus de la terre, Dieu dépasse infiniment l’être humain : « Le ciel, c’est le ciel du Seigneur ; la terre, il l’a donnée aux fils d’Adam », chante le psaume 115 (v. 16). Et le Très-Haut est en même temps le Tout-Autre, le mystérieux et l’inconnaissable, celui que « nul n’a jamais vu ». De cet attribut, le ciel, avec « le silence éternel de ses espaces infinis », selon la formule célèbre de Pascal, s’offre de nouveau comme symbole.

Si bien que, tout en proclamant que Dieu est esprit, qu’il n’occupe pas une portion délimitée de l’espace, la Bible, en consonance avec un imaginaire universel, représente le ciel comme la demeure de Dieu et, en quelque sorte, comme le symbole de son intimité.

Sur les demeures d’éternité, Le témoignage du Nouveau Testament, Michel Gourgues, Dans Revue Lumen Vitae 2016/3 (Volume LXXI), pages 271 à 282.

Anti-matérialiste

Le Dieu que nous confessons dans le Credo habite le ciel. Une telle profession de foi est-elle encore recevable à une époque où l'homme vole dans le ciel. Aucun astronaute n'a vu Dieu. Mais pour pour le peuple hébreu, du temps de la Bible, le ciel s'opposait à la Terre dans le sens ou celui-ci lui était inaccesible. Dans la topologie biblique, il y a trois domaines essentiels :

- la terre qui est le monde matériel où l'homme vit
- le shéol où l'homme séjourne après sa mort
- le ciel qui est le domaine de l'invisible, de l'inatteignable, du spirituel, voir celui de la manifestation de la puissance divine (théophanies) à travers l'orage, le vent ou la tempête.

Ainsi, affirmer que Dieu est dans le Ciel, c'est avant tout dire qu'il n'est pas une réalité matérielle, qu'il est purement spirituel. Cela peut être vu comme une affirmation anti-idolâtrique, les populations idolâtres adoraient des dieux matériels, des statues, des objets, et la pensée hébraïque s'est toujours élevée fortement contre cette pratique, avec en particulier les dix commandements : Tu ne te feras pas d'image taillée, ni aucune représentation... pour te prosterner devant elles.

Cette affirmation garde toute sa force aujourd'hui, pour dire que Dieu est précisément ce qui n'est pas sur terre, il est par définition l'immatériel, l'invisible. Dieu, c'est ce qui échappe à la physique, il est ce qui dépasse la matière.

Dire que le Dieu dans lequel nous croyons et que nous prions est dans le Ciel, c'est donc une affirmation fondamentale anti-matérialiste.

Le jour de son Ascension, Jésus « monte au ciel ». Nous savons bien qu’il ne s’agit pas du ciel interstellaire, qui appartient toujours à notre monde matériel, mais du séjour spirituel et irreprésentable de Dieu avec ses élus. Ce ciel ne peut être que le paradis, promis par Jésus au bon larron (Lc 23, 43), séjour de bonheur parfait. C’est pourquoi le terme de ciel est devenu une métaphore désignant la plénitude du salut de l’homme, définitivement ressuscité et passé en Dieu. Ce ciel qui est « en haut » est aussi pour nous un « en avant », il est l’avenir que nous espérons et en vue duquel nous vivons. Ce ciel est donc un « non-lieu » au sens de notre espace et de notre temps. Mais la métaphore enveloppe toujours en elle l’idée d’un lieu, parce que nous sommes ainsi faits et que nous ne pouvons nous représenter les choses autrement. Ciel, purgatoire, enfer, Bernard Sesboüé, Revue Lumen Vitae 2016/3 (Volume LXXI), pages 249 à 258.

Lieu d’espérance

Les prophètes annoncent, au fil de pages que c’est un pays de Canaan transfiguré que le peuple de Dieu attend, un pays où le désert refleurira, les sourds entendront, les aveugles verront, la terre desséchée se changera en lac (Is 35.5-7). De nouveaux cieux et une nouvelle terre ne seront-ils pas créés, où le loup habitera avec l’agneau, où les maux du passé seront oubliés, où règnera la réconciliation (Is 65,16c-17, 25 ; 66,22 ; cf. 11,6-9) ? Les textes ne parlent-ils pas constamment d’une nouvelle Jérusalem, glorieuse, transfigurée, rayonnante, où toutes les nations afflueront vers un même Dieu. Toutes ces réalités renvoient, d’une manière ou d’une autre, à la terre et au ciel !

Is 35,5-7 Alors s'ouvriront les yeux des aveugles, S'ouvriront les oreilles des sourds; Alors le boiteux sautera comme un cerf, Et la langue du muet éclatera de joie. Car des eaux jailliront dans le désert, Et des ruisseaux dans la solitude; Le mirage se changera en étang Et la terre desséchée en sources d'eaux; Dans le repaire qui servait de gîte aux chacals, Croîtront des roseaux et des joncs.

Is 65,17 Car voici que je vais créer des cieux nouveaux et une terre nouvelle, on ne se souviendra plus du passé, il ne reviendra plus à l'esprit.

2P 3,13 Ce sont de nouveaux cieux et une terre nouvelle que nous attendons selon sa promesse, où la justice habitera.

Ap 21,1 Puis je vis un nouveau ciel et une nouvelle terre; car le premier ciel et la première terre avaient disparu, et la mer n'était plus.

En conclusion

Pour qu’il soit notre Père à tous en tout lieu et en tout temps Dieu ne pouvait pas habiter la terre en un endroit précis, car il aurait toujours été quelque part au lieu d’être partout. Affirmer qu’il est aux cieux, c’est le mettre à la portée de tous tout en disant que personne ne peut s’en saisir.

Benoit XVI : À partir du « notre », nous comprenons aussi le deuxième ajout : « qui es aux cieux ». Par ces mots, nous ne plaçons pas Dieu, le Père, sur un quelconque astre lointain, mais nous énonçons que nous, tout en ayant des pères terrestres différents, nous provenons cependant tous d'un seul Père, qui est la mesure et l'origine de toute paternité. Et en arrière-fond, nous entendons la parole du Seigneur :

Mt 23, 9 Ne donnez à personne sur terre le nom de père, car vous n'avez qu'un seul Père, celui qui est aux cieux.