L’altérité, fondement de la vocation à ne former qu’une seule chair
La notion d’altérité est fondamentale, car elle englobe les ressemblances et les différences. Mon partenaire est mon alter-égo, mon autre moi-même. Il est autre tout en étant comme moi.
L’altérité, c’est prendre conscience à la fois des différences et des similitudes. À la base d’une construction mutuelle, elle doit être réciproque, contrairement à l’altruisme où l’on n’attend rien de l’autre et à l’égoïsme où l’on n’a rien à lui donner. Elle est aussi différente de la tolérance. Cette dernière est une attitude qui accepte l’autre sans vouloir bien évidemment le détruire, mais sans vouloir échanger. La tolérance c’est l’acceptation de l’autre sans chercher à développer la relation. Elle a une connotation de condescendance. L'altérité : Fondement de l'Humanisme, Par Albert Jacquard et Fernando Cuevas. https://shs.cairn.info/revue-humanisme-et-entreprise-2010-5-page-85?lang=fr.
Dans le récit de la Genèse l’expression « voici cette fois, l’os de mes os, la chair de ma chair… » souligne d’abord la similitude. La femme qui se présente à l’homme lui ressemble bien plus que les animaux qu’il vient de nommer.
En fait, nous sommes plus identiques que différents. Selon Yvon Dallaire (psychologue) nos ressemblances constituent 97,83 % de notre nature humaine. Nous recelons des différences au sein d’une similitude fondamentale, à savoir notre humanité. Il suffit de se comparer à l’animal pour lister ce qui fait la richesse de notre humanité : citons une morphologie très similaire (deux jambes, deux bras, un corps, une tête), la parole, l’outil, une intelligence créatrice et novatrice, l’art, la conscience du bien et du mal, la spiritualité avec une quête de divin. Toutes ces caractétistiques humaines permettent de fonder des sociétés, de vivre des amitiés, de bâtir une famille et finalement d’être heureux.
Voir l'étude sur les différences avec l'animal
Concernant les différences entre l'homme et la femme, la plus fondamentale est bien sûr d’ordre sexuel.
La différence sexuelle est « une différence tranchant sur les différences » (E. LEVINAS, Le Temps et l'Autre, PUF, 1983, p. 14.).
Elle est incontournable, sauf dans les cas très particuliers d’ambiguïté sexuelle. Elle ne se cantonne pas à la génitalité, mais se déploie dans tous les compartiments de la vie. La sexualité rayonne sur l’ensemble du corps. La masculinité et la féminité ne se limitent pas au sexe ; elles traversent le regard, façonnent la voix, tissent les traits du visage, orientent l’imagination et le raisonnement, transforment l’existence.
« La sexualité caractérise l'homme et la femme non seulement sur le plan physique, mais aussi sur le plan psychologique et spirituel [...], elle est une composante fondamentale de la personnalité, une de ses façons d'exister, de se manifester, de communiquer avec les autres, de ressentir, d'exprimer et de vivre l'amour humain ».
Il n'existe pas d'oppositions rigides et formelles, mais des dominantes, comme le résume X. Lacroix :
C'est ainsi que le masculin pourra être caractérisé par la maîtrise de l'espace et le féminin par l'habitation du temps. Dominante, chez le premier de la relation sujet-objet, chez le second de la relation sujet-sujet. Primauté chez l'homme du faire, chez la femme du laisser-être. Ici priorité au dynamisme d'expansion et de transcendance, là d'enveloppement et d'immanence. Au masculin sera associé le contenu, au féminin le discontinu (La différence sexuelle a-t-elle une portée spirituelle ?, dans Homme et femme, l'insaisissable différence, Cerf, 1993).
Ces dominantes sont plus ou moins marquées chez chaque personne. Elles se manifestent d'une façon particulière dans la rencontre intime. Pour l'homme, la rencontre est un acte; pour la femme un état. La femme est plus sensible à l'ambiance, à la parole, au regard et à la tendresse. Son corps n'est pas immédiatement disponible. L'homme est tenté d'aller directement au corps. Son désir est tout orienté vers l'acte sexuel. L'immédiateté prévaut au détriment de l'attente et de la construction, et c'est donc la femme qui en pâtit, elle qui réclame un peu de patience et de temps.
L'homme et la femme recèlent des différences physiologiques indéniables et nécessaires en matière de procréation. L'homme donne sa semence. La femme l'accueille et la fait germer. Elle la transforme pour donner naissance à un nouvel être de parole. Cette différence fondamentale est à la source du désir et de la rencontre avec l'autre. La vue du sexe opposé n'est pas chez l'homme ou la femme un simple appel à la reproduction, mais un signe qui appelle à la reconnaissance de la différence et qui éveille le désir.