Femme impure ?
La femme est-elle impure ? La question paraît aujourd’hui dénuée de fondement. Pourtant pendant des siècles les "hommes" ont considéré les femmes impures, tout particulièrement à cause du sang qui s'écoule de leur corps.
Dans de très nombreuses cultures, le sang des règles et de l’accouchement est considéré avec méfiance, car emprunt de mystère. La plupart des religions ont repris à leur compte cette angoisse profonde à l’égard du sang féminin, symbole de fécondité, de vie et de mort. Les religions ont alors tenté de l’encadrer par des interdits et des rites de purification.
La Bible
Lev 10,10 Vous distinguerez ce qui est saint de ce qui est profane, ce qui est impur de ce qui est pur.
L’impureté désigne tout ce qui rend impropre au culte. Elle touche aussi bien les objets (par contact), les animaux que les personnes. Contact avec un cadavre (Nombres 19) ; certaines maladies de peau (comme la lèpre – Lévitique 13) ; pertes corporelles (menstruation, éjaculation, etc. – Lévitique 15) ; aliments considérés comme impurs (Lévitique 11). L’impureté sexuelle revêt une importance particulière. Elle concerne aussi bien l’homme que la femme.
Lev 15,1 Le SEIGNEUR adressa la parole à Moïse et à Aaron : 2« Parlez aux fils d’Israël ; vous leur direz : « Quand un homme est atteint d’un écoulement dans ses organes
, cet écoulement est impur. 3Voici en quoi consiste l’impureté due à son écoulement – que ses organes laissent échapper l’écoulement ou qu’ils s’engorgent, son impureté est la suivante : 4Tout lit où s’est couché l’homme atteint d’écoulement est impur ; tout objet où il s’est assis est impur. 5Celui qui touche ce lit doit laver ses vêtements, se laver à l’eau, et il est impur jusqu’au soir. 6Celui qui s’assied sur l’objet où s’est assis l’homme atteint d’écoulement, doit laver ses vêtements, se laver à l’eau, et il est impur jusqu’au soir. 7Celui qui touche le corps de l’homme atteint d’écoulement doit laver ses vêtements, se laver à l’eau, et il est impur jusqu’au soir. 8Si l’homme atteint d’écoulement crache sur quelqu’un qui est pur, celui-ci doit laver ses vêtements, se laver à l’eau, et il est impur jusqu’au soir. 9Toute selle sur laquelle a voyagé l’homme atteint d’écoulement est impure. 10Quiconque touche un objet qui s’est trouvé sous cet homme est impur jusqu’au soir ; celui qui transporte un tel objet doit laver ses vêtements, se laver à l’eau, et il est impur jusqu’au soir. 11Toute personne que l’homme atteint d’écoulement a touchée, sans s’être rincé les mains à l’eau, doit laver ses vêtements, se laver à l’eau, et elle est impure jusqu’au soir. 12Un récipient d’argile qu’aura touché l’homme atteint d’écoulement doit être brisé, et tout récipient de bois doit être rincé à l’eau. 13Pour être purifié de son écoulement, l’homme compte sept jours jusqu’à sa purification et lave ses vêtements ; il lave son corps dans de l’eau vive, et alors il est purifié. 14Le huitième jour, il se procure deux tourterelles ou deux pigeons et se rend devant le SEIGNEUR, à l’entrée de la tente de la rencontre, pour les remettre au prêtre. 15De l’un, le prêtre fait un sacrifice pour le péché, et de l’autre un holocauste ; le prêtre fait sur lui, devant le SEIGNEUR, le rite d’absolution de son écoulement. 16Quand un homme a eu des pertes séminales, il doit se laver tout le corps à l’eau, et il est impur jusqu’au soir ; 17tout vêtement et tout cuir atteint par la perte séminale doivent être lavés à l’eau, et ils sont impurs jusqu’au soir.
18Quand une femme a eu des relations sexuelles avec un homme, ils doivent se laver à l’eau et ils sont impurs jusqu’au soir.
19Quand une femme est atteinte d’un écoulement, que du sang s’écoule de ses organes, elle est pour sept jours dans son indisposition, et quiconque la touche est impur jusqu’au soir. 20Tout ce sur quoi elle s’est couchée en étant indisposée est impur, et tout ce sur quoi elle s’est assise est impur. 21Quiconque touche son lit doit laver ses vêtements, se laver à l’eau, et il est impur jusqu’au soir. 22Quiconque touche un objet où elle s’est assise, doit laver ses vêtements, se laver à l’eau, et il est impur jusqu’au soir. 23Si quelque chose se trouve sur son lit ou sur l’objet où elle s’est assise, en y touchant on est impur jusqu’au soir. 24Si, au moment où un homme couche avec elle, le sang de son indisposition s’écoule sur lui, l’homme est impur pour sept jours ; tout lit où il couche est impur. 25Quand une femme est atteinte d’un écoulement de sang pendant plusieurs jours en dehors de sa période d’indisposition ou que l’écoulement se prolonge au-delà de son temps d’indisposition, son impureté dure aussi longtemps que dure l’écoulement ; elle est impure, tout comme pendant ses jours d’indisposition. 26Tant que dure cet écoulement, tout lit où elle se couche est comme le lit de son temps d’indisposition ; et tout objet où elle s’assied est impur comme il est impur lors de son indisposition. 27Quiconque les touche se rend impur ; il doit laver ses vêtements, se laver à l’eau, et il est impur jusqu’au soir. 28Si son écoulement a pris fin, elle compte sept jours, et ensuite elle est purifiée. 29Le huitième jour, elle se procure deux tourterelles ou deux pigeons et les amène au prêtre, à l’entrée de la tente de la rencontre. 30Le prêtre fait de l’un un sacrifice pour le péché et de l’autre un holocauste ; le prêtre fait sur elle, devant le SEIGNEUR, le rite d’absolution de l’écoulement qui la rendait impure. 31Vous demanderez aux fils d’Israël de se tenir à l’écart, quand ils sont en état d’impureté ; ainsi ils ne mourront pas à cause de leur impureté, c’est-à-dire pour avoir rendu impure ma demeure qui est au milieu d’eux.
32Telles sont les instructions concernant celui qui est atteint d’un écoulement, celui qui a des pertes séminales qui le rendent impur, 33celle qui a son indisposition menstruelle, bref, celui ou celle qui est atteint d’écoulement, ainsi que l’homme qui couche avec une femme impure.
De même Lévitique 12 prescrit qu’une femme est impure 40 jours après la naissance d’un garçon (et 80 après une fille) avant de pouvoir offrir un sacrifice de purification (cf. Luc 2:22-24 où Marie obéit à ce rite juif).
Il faut souligner que ces « impuretés » sont rituelles, non morales : elles marquent l’impossibilité temporaire d’entrer dans le sacré (temple, sacrifice), mais ne sont pas un péché en soi.
Dans le Nouveau Testament, Jésus et les apôtres réinterprètent la notion d’impureté. Jésus souligne que l’impureté vient du cœur, non de l’extérieur :
Matthieu 15:11 Ce n’est pas ce qui entre dans la bouche qui rend l’homme impur, mais ce qui sort de la bouche.
Paul enseigne que les chrétiens ne sont plus soumis aux lois rituelles juives, mais doivent vivre dans pureté morale et spirituelle (1 Corinthiens 6:18-20, Galates 5:19-21).
1 Corinthiens 6:18-20 Fuyez l’impudicité. Quelque autre péché qu’un homme commette, ce péché est hors du corps; mais celui qui se livre à l’impudicité pèche contre son propre corps. Ne savez-vous pas que votre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en vous, que vous avez reçu de Dieu, et que vous ne vous appartenez point à vous-mêmes ? Car vous avez été rachetés à un grand prix. Glorifiez donc Dieu dans votre corps et dans votre esprit, qui appartiennent à Dieu.
Galates 5:19-21 Or, les œuvres de la chair sont manifestes, ce sont l’impudicité, l’impureté, la dissolution, l’idolâtrie, la magie, les inimitiés, les querelles, les jalousies, les animosités, les disputes, les divisions, les sectes, l’envie, l’ivrognerie, les excès de table, et les choses semblables. Je vous dis d’avance, comme je l’ai déjà dit, que ceux qui commettent de telles choses n’hériteront point le royaume de Dieu.
La Tradition chrétienne
Le christianisme va naître dans une culture gréco-romaine.
Le flux menstruel des femmes a des effets si puissants, qu’il corrompt le vin, rend les moissons stériles, dessèche les semences, fait mourir les greffes, ternit les miroirs, émousse le tranchant de l’acier, fait fuir les abeilles de leurs ruches, fait tourner le lait frais, et même, selon certains, provoque la rouille du bronze et du fer. Livre VII, chapitre XIII.
Pline rapporte ici — sans nécessairement les cautionner — des croyances populaires ou médicales romaines qui voient les règles féminines comme une force naturelle puissante et néfaste, presque magique. Ce passage reflète la vision profondément ambivalente des menstruations dans le monde gréco-romain : naturelles, mais dangereuses. .
Au début du christianisme coexistent deux courants : l’un rigide, qui maintient l’interdit rituel ; l’autre, plus libéral, qui écarte l’obligation sous couvert de la Nouvelle Alliance.
En 241, Dionysius (Denis), archevêque d’Alexandrie, écrit à Basile :
Quant aux femmes qui ont leurs règles, je pense qu’elles ne doivent pas, si elles sont pieuses et fidèles, oser s’approcher de la sainte Table ou toucher le Corps du Christ. Car même la femme qui avait une perte de sang ne fut guérie qu’après avoir touché le bord du vêtement de Jésus. Cité dans les Constitutions apostoliques (Livre VI, ch. 27).
La Didascalie, au IIIe siècle, explique que les femmes ne sont pas impures durant leur période de menstruation, qu’elles ne devaient pas se soumettre aux ablutions rituelles.
XXVI - Sur celles qui observent les jours du flux (menstruel). Si tu penses, ô femme, que durant les sept jours de ton flux (menstruel) tu es privée du Saint-Esprit, si tu mourais en ces jours-là, tu sortirais (de ce monde) en vain et sans espoir. Si tu as le Saint-Esprit en toi, et que tu t’éloignes, sans en être empêchée, de la prière, des Livres (saints) et de l’Eucharistie, réfléchis et vois que la prière est écoutée par le Saint-Esprit, l’Eucharistie est reçue et sanctifiée par le Saint-Esprit, et les Livres (saints) sont les paroles du Saint-Esprit ; si le Saint-Esprit est en toi, pourquoi te gardes-tu d’approcher des oeuvres du Saint-Esprit comme ceux qui disent : Quiconque jure par l’autel ne pèche pas, mais quiconque jure par le présent qui est sur l’autel pèche. Comme l’a dit Notre Seigneur : Insensés et aveugles, quel est le plus grand, du présent ou de l’autel qui sanctifie le présent ? quiconque jure par l’autel, jure par lui et par tout ce qui est sur lui; quiconque jure par le temple, jure par lui et par celui qui y demeure, et quiconque jure par le ciel, jure par le trône de Dieu et par ce-lui qui y est assis. Si donc tu possèdes le Saint-Esprit et que tu te gardes de ses fruits sans t’en approcher, écoute aussi (de la part) de Notre Seigneur Jésus-Christ : « Insensée et aveugle, quel est le plus grand, du pain ou du Saint-Esprit que tu possèdes ? insensée, tu observes de vaines pratiques. Si tu n’as pas en toi le Saint-Esprit, comment pratiqueras-tu la justice ? » car le Saint-Esprit de-meure toujours chez celui qui le possède ; s’il sort de quelqu’un, l’esprit impur s’attache à celui-ci, car lorsque l’esprit impur sort d’un homme, il va et parcourt les pays sans eau, c’est-à-dire les hommes qui ne descendent pas dans l’eau (qui ne se font pas baptiser) et, comme il ne trouve pas de repos, il dit : je retournerai à la première maison d’où je suis sorti; s’il vient donc et la trouve libre, nettoyée et ornée, il sort et ramène avec lui sept autres esprits plus méchants que lui, ils viennent et demeurent chez cet homme et la suite est pire que le commencement...
Aussi, mes chers amis, fuyez toutes les observances de ce genre, car vous avez été délivrés pour ne plus vous enchaîner, et vous ne vous imposerez plus (le joug) dont notre Seigneur et Sauveur vous a déchargés. Ne gardez pas ces (observances), ne pensez pas qu’il y a des impuretés (légales), ne vous gênez pas à leur occasion, ne recherchez pas les aspersions, ni les baptêmes, ni la purification (des souillures corporelles).
http://www.theologica.fr/!_Patrologie_Orientale/Divers_2/LaDidascalie.pdf
Les Constitutions apostoliques (IVe siècle) reprennent ces opinions.
Si une femme est dans sa période mensuelle, elle ne doit pas, pour autant, être écartée comme impure ; car ce qui est naturel ne saurait être imputé à pécher, et cela vient de Dieu. Elle ne doit pas non plus être empêchée de prier, ni d’entrer dans l’église, ni de lire la parole de Dieu, ni de chanter des psaumes, ni d’approcher de l’eucharistie. Mais si elle s’abstient d’elle-même par respect, elle est louable, sans pour autant être blâmable si elle participe. Constitutions apostoliques, Livre VI, chap. 27. Éd. et trad. Marcel Metzger, Sources Chrétiennes 329, Paris : Cerf, 1986, p. 274–275
Que les femmes ne s’abstiennent pas, durant leur flux menstruel, de prier ni d’aller à l’église ; car ce n’est pas une maladie, mais une purification naturelle. Elles ne doivent pas non plus être empêchées de recevoir l’eucharistie, si elles sont pieuses et qu’elles désirent communier, même pendant leur flux, car la piété purifie toujours dans sa totalité. Ce n’est pas le sang, mais la disposition intérieure qui fait un homme impur ou pur. En effet, même une hémorragie involontaire n’est pas un péché, mais une chose naturelle. » Livre VI, chapitre 31. Marcel Metzger, SC 329, Paris : Cerf, 1986, p. 284–285.
Jérôme (IVe-Vème siècles)
Il est dit en sixième lieu: « Et il ne s'approchera pas d'une femme étrangère, ou même de sa femme, durant son époque menstruelle. Il entre dans la constitution des femmes d'être incommodées chaque mois par une trop grande abondance de sang, et d'en être soulagées par une évacuation sanguine. Si l'homme, dans cette phase anormale de la vie des femmes, cohabite avec l'une d'elles, la conception qui en résulte est viciée, dit-on, par l'impureté de sa source; de telle sorte que les lépreux proviennent , selon l'opinion commune, d'une pareille cohabitation , de même que les enfants affligés dès leur naissance de difformités monstrueuses. (Commentaires sur Ézéchiel, http://jesusmarie.free.fr/jerome_fragments_de_commentaires_sur_la_bible.html).
L’homme juste ne s’approche pas de sa femme pendant la menstruation, car même si ce n’est pas un péché moral, c’est une transgression de la Loi. Mais plus encore, ce précepte signifie spirituellement qu’il faut s’éloigner de ce qui est impur, charnel et passager. (Commentaire sur Ezéchiel XVIII,6 — PL 25, col. 172).
Augustin (IVe-Ve) n’impose pas l’exclusion des femmes de l’Eucharistie pendant leurs règles, mais il tolère la retenue volontaire, au nom de la piété.
Ni la loi ancienne, ni l’Évangile, ni les lettres apostoliques ne nous interdisent aux femmes de communier pendant leur période, mais si, par piété, elles s’en abstiennent, on ne doit pas les en blâmer. Lettre 211, à l’évêque Januarius.
En 601, le Pape Grégoire Ier ratifie cette position. Les femmes ayant leurs règles ne devaient pas être écartées de l’église ou privées de la sainte communion.
C’est dans la lettre qu’envoie Grégoire le Grand († 604) à Augustin missionnaire dans les îles britanniques que se trouve la plus claire réfutation de l’interdiction pour les femmes relevant de couches de communier 17. Dans ce célèbre texte recopié dans l’histoire ecclésiastique de Bède, Augustin pose différentes questions concernant des points doctrinaux afin d’adapter sa pastorale missionnaire. Entre autre, il demande si l’on doit empêcher l’entrée dans une église à une femme relevant de couches ou lors de ses règles. La réponse de Grégoire est longue et raffinée. Les prescriptions de la loi mosaïque doivent être comprises comme des figures. La menstruation comme la maladie, la faim, la soif, etc., sont des infirmités du corps que nous subissons depuis l’expulsion du Paradis terrestre. Ils sont certes les témoignages du péché originel, mais ils ne sont pas en eux-mêmes des péchés, mais des activités physiologiques... La vaste majorité des juristes et des théologiens suivent Grégoire : la menstruation est un un acte physiologique extérieur au champ de la morale, elle ne peut être comprise comme un péché. Charles de Miramon. La fin d’un tabou ? L’interdiction de communier pour la femme menstruée au Moyen Âge. Le cas du XIIe siècle. Le sang au Moyen Âge, Université Paul-Valéry, pp.163–181, 1999, Cahiers du CRISIMA ; 4. halshs-00780023. https://shs.hal.science/halshs-00780023v1
En 650, le Synode de Rouen interdit aux prêtres de remettre le calice dans les mains d’une femme ou de lui permettre d’aider à distribuer la communion.
On nous a rapporté que certains prêtres, après avoir dit la messe, lorsqu’ils consomment les divins mystères, donnent le calice de Dieu à des femmes qui leur ont fait des offrandes pour les messes, ou à des laïcs qui ne peuvent discerner le Corps de Dieu. La piété des fidèles comprend combien tout cela est contraire à toute religion ecclésiastique. C’est pourquoi nous ordonnons à tous les prêtres que personne n’agisse désormais de cette manière, et que le prêtre consomme l’Eucharistie avec révérence et la remette, pour la distribution, au diacre ou au sous-diacre qui administre à l’autel. Cité sur https://womenpriests.org/fr/le-synode-de-rouen/
Par ailleurs, le Canon 6 reprend quasiment mot pour mot le contenu du Livre VI, chap. 27 et 31 des Constitutions apostoliques :
Que les femmes, en temps de menstruation, ne s’abstiennent pas d’aller à l’église ni de communier, si leur cœur est pur, car ce n’est pas une faute, mais une condition naturelle. Jean Hardouin, Acta Conciliorum, t. III, col. 527 (Paris, 1714).
En 690, l’évêque Théodore de Canterbury rédige un pénitentiel qui contient les prescriptions suivantes :
« Pendant la période de leurs règles, les femmes, qu’elles soient laïques ou religieuses, ne doivent pas entrer à l’église ni communier. Si elles osent le faire, elles doivent néanmoins jeûner pendant trois semaines » (paragraphe 17).
« De même, les femmes qui entrent à l’église avant la purification de leur sang après la naissance, c’est-à-dire pendant quarante jours, doivent faire pénitence » (paragraphe 18).
Cité sur https://womenpriests.org
En 820, l’évêque Théodulfe d’Orléans interdit aux femmes d’entrer dans le chœur.
(a) Lorsqu’un prêtre célèbre la messe, les femmes ne doivent en aucun cas s’approcher de l’autel, mais rester à leur place, et le prêtre doit y recevoir leurs offrandes à Dieu.
(b) Les femmes doivent donc se souvenir de leur infirmité et de l’infériorité de leur sexe : elles doivent donc craindre de toucher aux objets sacrés qui sont liés au ministère de l’Église.
(c) Les laïcs doivent également craindre ces choses, afin de ne pas subir le châtiment d’Ozam qui, voulant toucher l’Arche de Dieu dans une circonstance extraordinaire, mourut sous le coup de Dieu.
MANSI vol. XIII p. 996, Canon 6. Cité sur www.womenpriests.org !
La femme qui est affectée par les menstrues ne doit pas communier, ni entrer dans le sanctuaire, jusqu’à ce qu’elle soit purifiée. Capitulare episcopi Theodulfi, éd. Alfred Boretius, dans MGH Capitularia Regum Francorum, t. I, Hanovre, 1883, p. 252–258 (canon 17 en p. 256).
Au XIIe siècle, Paucapalea, juriste, rédige une loi ecclésiastique dite « Summa », datée de 1114-1148 apr. J.-C.
Les femmes ne sont pas autorisées à fréquenter l’église pendant leurs règles ou après la naissance d’un enfant. Car seule la femme est un animal qui a ses règles. Toucher son sang empêche les fruits de mûrir. La moutarde dégénère, l’herbe sèche et les arbres perdent leurs fruits avant l’âge. Le fer rouille et l’air s’obscurcit. Quand les chiens le mangent, ils contractent la rage. Cité sur https://womenpriests.org
À la même période, Rufin de Bologne écrit une Summa Decretorum.
Les femmes ne peuvent pas porter la communion aux malades et doivent rester en dehors de l’église après un accouchement. La raison en est : Car ce sang est impur et détestable, comme déjà Julius Solinus l’a écrit dans son livre sur les miracles dans le monde, parce qu’à cause de son contact les fruits ne mûrissent pas, les plantes se dessèchent, l’herbe jaunit, les arbres perdent leurs fruits, l’air s’assombrit, si les chiens en mangent, ils attrapent la rage… Et les relations sexuelles au moment des règles sont très dangereuses. Non seulement parce qu’à cause de l’impureté du sang le désir d’avoir des contacts avec une femme ayant ses règles doit être refoulé : d’une telle relation pourrait naître un fœtus manqué. Cité sur https://womenpriests.org.
Le sang menstruel n’est pas un péché, mais un empêchement aux sacrements, non à cause d’une impureté, mais par respect. Summa Decretorum, ad C.33 q.4.
Sicard de Crémone (en latin : Sicardus Cremonensis) (né vers 1155 à Crémone et mort dans la même ville en 1215) est un chroniqueur et évêque italien, qui s’est illustré comme historien, canoniste et liturgiste.
Les femmes ne peuvent pas toucher les vases sacrés. La naissance d’un enfant amène une double malédiction : “Il y a deux commandements dans le (Ancien) Testament, l’un concernant la mère qui met au monde un enfant, l’autre touchant l’accouchement lui-même. Concernant la mère qui met au monde un enfant, quand elle donne naissance à un enfant mâle, il lui est interdit pendant quarante jours, en tant que personne impure, d’entrer dans le Temple : la raison en est que le fœtus, conçu dans l’impureté, est réputé être resté sans aucune forme pendant quarante jours. Mais si le nouveau-né est une fille, la période est doublée, car le sang de la menstruation, qui accompagne la naissance, est considéré tellement impur que, comme Solinus le déclare, les fruits se dessèchent et l’herbe jaunit à son contact. Mais pourquoi la période est-elle doublée dans le cas d’une fille ? Réponse : parce qu’une double malédiction pèse sur la croissance féminine. Car elle est soumise à la malédiction qui a frappé Adam et aussi le : “ Tu enfanteras dans la douleur ” (= punition). Ou, peut-être, parce que, comme la science des médecins le révèle, les fœtus de sexe féminin demeurent sans forme à la conception deux fois plus longtemps que les fœtus de sexe masculin.” Sicardus de Crémone, Mitrale V, ch. 11.
Cité sur https://womenpriests.org
Le décret de Gratien (XIIe) exclut les femmes de tout contact avec le sacré.
Il est venu à notre connaissance que certains prêtres méprisent le Mystère Divin à un tel point qu’ils remettent le Corps Sacré du Seigneur à un laïc ou à une femme pour qu’ils l’apportent aux malades. Le Sacrement le plus Saint est donc confié à ces gens à qui il est défendu de pénétrer dans le sanctuaire ou d’approcher de l’autel ! Tous ceux qui craignent Dieu comprendront que c’est une pratique terrible et méprisable. Donc le Synode défend ceci dans les termes les plus forts, de sorte qu’un comportement aussi répugnant et irresponsable ne se présente plus jamais. Dans tous les cas, c’est le prêtre qui doit, lui-même apporter la communion aux malades. Si quelqu’un agit autrement, il encourt le risque d’être dégradé.
Même si une femme est éduquée et sainte, elle ne doit jamais envisager d’éduquer les hommes dans une assemblée [ecclésiastique]. Un [mâle] laïc toutefois ne peut envisager d’instruire en présence du clergé à moins qu’on ne le lui ait demandé.
Notre Sainte Vision décrète que les objets du culte consacrés peuvent seulement être manipulés par de saints hommes (mâles), ordonnés au service du Seigneur et par personne d’autre afin que le Seigneur dans son courroux ne puisse punir son peuple d’une calamité telle que ceux qui n’auraient pas péché [contre son commandement] seraient détruits également, puisqu’il arrive fréquemment que les justes souffrent par la faute des impies.
Ces vêtements (utilisés dans l’Église) ne peuvent être ni touchés ni offerts par qui que ce soit à l’exception des hommes consacrés (mâles).
https://womenpriests.org/fr/theologie-fr/gratian-le-livre-de-droit-de-gratien/
Huguccio de Pise († vers 1210) commente notamment Causa 33, Quaestio 4 du Décret de Gratien, qui traite de la participation aux sacrements malgré les "flux corporels" (comme les menstrues, la pollution nocturne, ou les pertes dues à la maladie). Pour Huguccio : Les menstruations sont naturelles et involontaires, donc ni péchés, ni obstacles spirituels. Seule la conscience intérieure (bonne ou mauvaise) décide de l’aptitude à communier. Il rejette toute assimilation du sang menstruel à une impureté morale. Il reprend ici l'argument de Grégoire le Grand contre Denys d’Alexandrie, en insistant sur le libre arbitre et l’intention du cœur. S’abstenir volontairement par pudeur ou piété est louable, mais ne peut être imposé légalement.
Ce n’est pas une faute mais un respect si une telle femme s’abstient. Quoique la femme ne commette, en effet, pas de faute dans le fait d’avoir ses règles, elle doit cependant reconnaître qu’elle souffre de ceci à cause du péché originel et elle peut donc, par humilité, s’abstenir quelque temps des sacrements (Huguccio, Summa super Decretum Gratiani, C.33 q.4, Éd. J.F. von Schulte, Summa Huguccionis, 1890).
Albert le Grand (1200-1280)
La femme est moins qualifiée que l’homme pour la morale. Car la femme contient plus de liquide, et c’est une caractéristique des liquides d’absorber facilement, mais de mal retenir. (…) La femme est un homme raté, par rapport à l’homme, elle ne possède qu’une nature défectueuse et imparfaite (Quaestiones super de animalibus XV, cité par La Croix, 20/11/2019).
Mentionnons aussi la coutume des "Relevailles". Les relevailles sont une pratique liturgique et sociale qui consistait à accueillir une femme dans l’église après un accouchement, souvent par une bénédiction ou une prière d’action de grâce. Cette cérémonie, attestée dès le haut Moyen Âge en Occident, a été largement répandue jusqu’au XIXᵉ siècle. Dès le haut Moyen Âge, la bénédiction post-partum est intégrée dans les rites liturgiques locaux. Elle est codifiée dans divers ordines et rituels diocésains (ex. : Pontificale Romanum au XVIᵉ siècle).
- Rituel typique :
- La femme entre dans l’église, souvent vêtue d’un voile.
- Le prêtre l’accueille à la porte avec de l’eau bénite.
- Elle est conduite jusqu’à l’autel.
- Une prière est dite, souvent tirée du Psaume 23 ou du Magnificat.
- Parfois une messe de remerciement est célébrée.
Si à partir de la deuxième moitié du XVIe siècle celles-ci sont définies comme une simple bénédiction et un acte de grâce, pendant tout le Moyen Age elles gardent un sens ambigu : elles portent en elles à la fois la trace de l'Ancien Testament et celle de la religion chrétienne, selon laquelle les accouchées ne sont ni souillées ni pécheresses et n'ont donc aucune obligation de s'écarter du sacré, ni de se soumettre à un rite particulier.
L'ambiguïté se traduit par des écrits ecclésiastiques contradictoires. Selon Grégoire le Grand (590-604), le premier à formuler leur statut, les relevailles n'avaient plus aucun caractère obligatoire et les jeunes mères pouvaient, dès qu'elles le souhaitaient, se rendre à l'église. En revanche, certains manuels de confession enseignaient que « si une femme était entrée à l'église après son accouchement avant d'avoir été purifiée de son sang», elle devait faire «pénitence au pain et à l'eau pendant autant de jours qu'elle aurait dû se tenir encore éloignée de l'église»[2]. Il fallut attendre le Décret de Gratien, la première compilation raisonnée du droit canon, édicté vers 1140, pour que disparaissent totalement ces interdits, et que les propos de Grégoire fassent seuls autorité.
Enfin, une lettre d'Innocent III, reprise dans les Décrétales en 1234, fixa définitivement la doctrine chrétienne sur ce point : si les accouchées le désiraient, elles pouvaient s'abstenir pendant quelque temps d'entrer dans une église et leur attitude était dans ce cas jugée dévote. Le retour à l'église n'était pas envisagé comme une purification mais comme un simple acte de grâce. Et selon une interprétation allégorique, les femmes entrant pour la première fois dans l'église après leur accouchement représentent les fidèles parvenant au royaume éternel. Les relevailles figurent ainsi l'accès à la vie éternelle par la voie de la pureté spirituelle.
Emmanuelle Caillier. https://www.lhistoire.fr/marie-et-le-rite-chr%C3%A9tien-des-relevailles
Tous ces interdits se prolongent sous différentes formes jusqu’en 1916. L’impureté rituelle disparaît dans le Code de droit canonique de 1917. Le Code de 1917 ne prohibe ni la communion ni l’accès aux sacrements aux femmes pendant leurs règles. Il ne reprend donc pas les lois lévitiques de l’Ancien Testament. Cela ne signifie pas que les femmes disposent des mêmes droits.
Une étude bien documentée est disponible sur le site :
https://womenpriests.org/fr/tradition-fr/unclean-les-femmes-ont-ete-considerees-comme-rituellement-impures/