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L'espérance

Introduction - Quelle est notre espérance ?

J'attends la résurrection des morts et la vie du monde à venir (Credo).

Il n'y a de véritable espérance que celle qui porte sur l'au-delà de la mort (Cardinal Joseph RATZINGER).

L’espérance est la vertu théologale par laquelle nous désirons comme notre bonheur le Royaume des cieux et la Vie éternelle, en mettant notre confiance dans les promesses du Christ et en prenant appui, non sur nos forces, mais sur le secours de la grâce du Saint-Esprit (CEC 1817).

Nous avons l’espérance de la vie éternelle, promise depuis toujours par Dieu qui ne ment pas (Tite 1, 1-2).

L’espérance, c’est elle qui fait tout le bonheur de l’homme (Curé d’Ars).

En introduction, essayons de définir l'espérance. Nous pouvons tout d'abord dire que l'espérance est une vertu théologale au même titre que la foi et la charité. Cela signifie que l'espérance nous dit quelque chose de Dieu. La foi, l'espérance et la charité sont comme trois étoiles qui s'allument dans le ciel de notre vie spirituelle pour nous conduire à Dieu.

L'espérance est un don de Dieu. L'espérance, ainsi, ne vient pas du fond de la créature, mais est inspirée, et co-accomplie, par l'Esprit. Individuelle et ecclésiale, elle dit à la fois la promesse et le certitude. Attente personnelle de la béatitude, elle assume et dépasse tous les espoirs humains. Attente de l'Eglise tendue vers les fins dernières, elle ne se laisse réduire ni à un projet historique, ni à une utopie. Espérer, c'est attendre Dieu de Dieu : vertu théologale. Revue Communio.

Dieu nous a été donné l'espérance, une espérance fiable, en vertu de laquelle nous pouvons affronter notre présent: le présent, même un présent pénible, peut être vécu et accepté s'il conduit vers un terme et si nous pouvons être sûrs de ce terme, si ce terme est si grand qu'il peut justifier les efforts du chemin. Benoît XVI, Spe salvi, 1.

Charles Péguy : La foi ne voit que ce qui est. L'espérance, en revanche, voit ce qui sera. La charité n'aime que ce qui est. Quant à l'espérance elle aime ce qui sera.

Il faut aussi distinguer espoir et espérance. Le premier relève des choses humaines. J'espère qu'il va faire beau demain ; j'espère qu'il viendra à mon rendez-vous : nous sommes dans le registre de l'espoir. Aujourd'hui l'humanité fonde ses espoirs presque illimités dans le pouvoir technique, la médecine, dans l'intelligence artificielle. L'espérance demeure lorsqu'il n'y a plus d'espoir.

Paul VI déclarait en 1968, Nous confessons que le Royaume de Dieu commencé ici-bas. L'Eglise du Christ n'est pas de ce monde, dont la figure passe, et que sa croissance propre ne peut se confondre avec le progrès de la civilisation, de la science ou de la technique humaines, mais qu'elle consiste à connaître toujours plus profondément les insondables richesses du Christ, à espérer toujours plus fortement les biens éternels, à répondre toujours plus ardemment à l'amour de Dieu, à dispenser toujours plus largement la grâce et la sainteté parmi les hommes.

La foi est à la racine de l'espérance. J'ai foi en Dieu, alors j'espère en un salut. Nous avons foi en une personne : mon épouse, Jésus ... Par contre l'espérance concerne un événement (le salut). L'espérance met la foi en mouvement, vers un but non encore atteint.

L'espérance est l'élément dynamique de l'existence chrétienne, elle est un élément proprement chrétien, que les païens ne possèdent pas (1 Thessaloniciens 4,13) puisqu'ils vivent dans le monde « sans espérance et sans Dieu » (Ephésiens 2, 12). Hans Urs von Balthasar.

L'espérance dans l'Ancien Testament

Le fondement de notre espérance ne repose pas sur les hauts et les bas de notre existence, mais sur les promesses de Dieu qui vient nous rejoindre dans notre existence. Et ces promesses de Dieu se sont incarnées dans l’histoire d’Israël ainsi que dans l’histoire de Jésus de Nazareth. Le thème de l'espérance traverse toute la bible. L’Ecriture de l’Ancien et du Nouveau Testament est le livre d’histoire des promesses de Dieu. Elle ne la raconte pas à la manière d’un conteur de légendes : « Il était une fois... », ni à la manière de l’historien moderne, qui veut savoir « comment cela s’est réellement passé ». Elle raconte l'histoire d’une façon telle qu’un nouvel avenir et une nouvelle liberté s’ouvrent devant celui qui l’écoute. Jürgen Moltmann.

La promesse d'un paradis

L'espérance germe dès les premières pages de la bible, dans les textes de la création. Nous avons l'habitude de lire ces récits comme une histoire du passé, alors qu'en réalité, ils nous décrivent le projet de Dieu pour l'humanité. Dieu veut que l'humanité soit heureuse dans un paradis. La Genèse nous dit que nous sommes créés à l’image de Dieu. Il y a donc « quelque chose » de divin en nous. Et ce « quelque chose » est en nous comme un germe espérance.

Ces récits bibliques expriment dans un langage symbolique qu’au plus profond de l’homme et de la femme fermente le désir d’un monde sans souffrance, et plus fondamentalement, une soif infinie d’amour. Le jardin d’Éden sommeille en chacun de nous, non comme utopie, mais comme projet divin. Nous sommes faits pour vivre dans un lieu paradisiaque. Nous sommes faits pour vivre dans un lieu paradisiaque. Cette espérance est gravée dans notre chair. Et nous ne seront jamais totalement comblés que lorsque nous entrerons au paradis. Voir l'étude Dieu tout-puissant, mythe ou réalité.

Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en Toi. 

L'attente de ce «paradis » qui nous manque, ne nous quitte pas ; mais cet état de manque se fait désespoir quand il n'y a ni certitude sur Dieu, ni certitude sur une promesse venant de lui. Qu'en est-il donc à présent de l'« espérance » ? Elle repose d'abord sur un vide au cœur de la condition humaine : l'homme attend toujours plus que ce qu'aucune présence ne pourra jamais lui donner. Plus il suit cette inclination, plus il se rend compte qu'elle fait sauter les frontières de tout ce dont il peut faire l'expérience. L'impossible lui devient nécessaire. Mais espérance veut dire aussi « assurance que ce désir trouvera une réponse ». Si l'expérience du manque, le paradoxe d'un désir qui le porte hors de lui-même, vient nécessairement pousser l'homme à désespérer de lui-même et de la rationalité de l'être, à l'inverse, cette espérance se transforme en joie secrète, une joie qui transcende toute joie et toute souffrance empiriques. De la sorte, c'est son manque même qui rend l'homme riche, qui lui fait concevoir un bonheur dont il ne pourrait faire l'expérience sans ce saut décisif. L'espérance pourrait alors être décrite comme l'anticipation de ce qui vient ; en elle, le « pas encore » est, d'une certaine façon, déjà là, et c'est ainsi qu'elle est la dynamique qui porte l'homme toujours au-delà de lui-même. Cardinal Joseph Ratzinger, Revue Communio.

En quel paradis espérons-nous ?

Notre espérance se fonde dans une promesse.

La promesse

Demandons-nous d’abord : qu’est-ce qu’une promesse ? Une promesse est une déclaration qui annonce une réalité qui n’existe pas encore, un nouvel avenir et, dans la promesse ce nouvel avenir est déjà présent comme parole. Les mots que nous disons dans une promesse sont la source même de la promesse. Ils constituent un engament, comme dans l'échange des consentements du mariage.

En promettant un nouvel avenir, la promesse ordonne en même temps à l’homme de rechercher cet avenir. Seul, qui cherche trouve. Cela distingue une promesse biblique des prophéties de Cassandre et des astrologues.

Mais si la confiance est placée en Dieu, la réalisation de la promesse reste ouverte à l'Histoire avec ses aléas. Les promesses n'enferment pas l'avenir dans un schéma rigoureux ni dans un destin prédéterminé.

L’espérance concerne à la fois le terme du voyage (la vie éternelle) et le chemin pour y aller (la grâce).

L’espérance, ce n’est pas imposer à Dieu ses propres désirs, mais s'ajuster au projet de Dieu, à ses promesses.

Abraham

L'histoire religieuse commence avec Abraham à qui Dieu fait une promesse tournée vers l'avenir.

Gn 12,1-3 Dieu dit à Abram: Va-t’en de ton pays, de ta patrie, et de la maison de ton père, dans le pays que je te montrerai. Et je te ferai devenir un grand peuple, et je te bénirai, et en ton nom seront bénies toutes les familles de la terre »

He 11,8 C'est par la foi qu'Abraham, lors de sa vocation, obéit et partit pour un lieu qu'il devait recevoir en héritage, et qu'il partit sans savoir où il allait.

Abraham renonce à son chez soi, à ses garanties tutélaires. Il quitte sa patrie et devient un étranger. Il quitte la maison de son père et devint un inconnu. Il abandonne ses dieux araméens de la nature qui garantissaient l’ordre, la fécondité et la paix dans l’ éternel retour » et il devint un sans-dieu, qui suivait uniquement l’appel fascinant du « Seigneur ». Ce à quoi la Bible donne le nom de « foi », c’est quitter les retranchements de la réalité, où l’on était tranquille et en sécurité, et se mettre en route sur le chemin de l’histoire, sur le chemin de la liberté et du péril, sur le chemin des déceptions et des surprises, en se laissant porter et conduire par la seule espérance. Jürgen Moltmann (voir bibliothèque).

Dieu promet un fils à Abraham et par ce fils une postérité innombrable. Quel bien plus précieux ? Cette promesse éveillait en Abraham le sentiment extraordinaire d'une prolongation infinie de sa force vitale, de sa puissance d'homme. Par son fils, Abraham acquérait une manière d'immortalité glorieuse. Il se sentait comme le germe d'un arbre aux fruits innombrables de siècle en siècle. Mais Abraham prît de l'âge et Sara perdit tout espoir d'enfanter Jamais. Dans le cœur d'Abraham se heurtaient la promesse de Dieu et le refus de la nature ; l'expérience humaine universelle, certaine comme un fait, lui disait qu'il n'aurait pas de fils, jamais. Cependant Abraham crut à la parole de Dieu ; Abraham « espéra contre toute espérance ». Et voici que nous assistons dans son cœur à la naissance d'une nouvelle espérance. « Toute espérance », c'est-à-dire tout ce que la force des hommes et la nature peut espérer obtenir ; tout cela criait l'échec d'Abraham. Abraham ne pouvait plus compter, sur aucune force humaine, sur la force de son corps. Mais à l'appel de Dieu, par la foi en sa promesse, une espérance inconnue jaillit en Abraham, si différente de l'humaine qu'elle ne naît que du choc de leur opposition. Mais la nouvelle espérance se distingue de l'humaine en ce qu'elle prend appui sur la seule force de Dieu, malgré l'échec de la force de l'homme. Cette espérance est divine parce que son point d'appui, son origine, le fondement de son assurance et la source de sa confiance est la force de Dieu toute-puissante et capable d'accomplir ses promesses. Servais Pinckaers (voir Bibliothèque).

Gn 17,2 Je veux te faire don de mon alliance entre toi et moi, je te ferai proliférer à l’extrême. » 3 Abram se jeta face contre terre, Dieu parla avec lui et dit : 4 « Pour moi, voici mon alliance avec toi : tu deviendras le père d’une multitude de nations.

L'espérance repose sur l'alliance que Dieu donne à Abraham. Dieu demeure fidèle à ses engagements quelles que soient les erreurs de l'humanité. Voir l'étude sur l'alliance.

La liberté de l'exode

Les descendants d'Abraham réduits en esclavage en Egypte vivent la même expérience de la promesse de Dieu.

Le mot "ex-ode" signifie "chemin qui sort de". L'exode trace le chemin de l'espérance qui sort de l'Egypte vers la terre promise. C'est aussi l'événement fondateur d'un peuple. La traversée de la mer rouge symbolise le baptême de ce peuple qui passe par à une mort-résurrection, celle de l'esclavage en Egypte, vers la liberté.

Comme Exode 3 le rapporte, Moïse au Sinaï reçoit la promesse et la mission de faire sortir son peuple de l’esclavage d’Egypte, pour le conduire dans un pays lointain « où coulent le lait et le miel ». Il hésite et avance l'argument de son manque d'élocution. Son frère Aaron y suppléera. Il demande à ce Dieu qui lui est encore inconnu, de lui dire son nom et reçoit une réponse énigme énigmatique : « Je serai qui je serai ». C’est-à-dire que ce Dieu ne se rend pas saisissable et concret, et qu’il ne se soumet pas à la magie religieuse par laquelle les autres dieux se laissent conjurer. La tournure « Je suis qui je suis » souligne pour une part la subjectivité et la souveraineté de Dieu, qui ne devient jamais l’objet et l’idole de l’homme. Notre espérance ne se fonde pas sur une idole, mais sur un Dieu qui se rend présent à son peuple, sur un Dieu qui se laisse toucher par la misère de son peuple.

On peut encore traduire par « Je serai avec vous ». Quiconque suit sa promesse et accepte sa mission éprouvera la proximité et la fidélité avec lesquelles Dieu l’accompagne sur sa route. C’est ainsi qu’Israël s’en est allé, en mettant sa confiance en celui « qui sera là » où qu’il aille. Avec cette assurance, les Israélites ont reconnu le miracle de la Mer Rouge comme preuve de sa fidélité à sa promesse. Celui qui a promis qu’il « serait là » a été là.

Un événement va structurer l'espérance : la pâque, mot qui signifie "passage". Lors de la 10eme plaie d'Egypte, Dieu "passe" au-dessus des maisons et épargne son peuple. Israël commence sa route dans le désert. La nuée, symbole de la présence de Dieu, accompagne le peuple dans cette pérégrination de 40 ans. Mais l'espérance d'une terre promise où coule le lait et le miel se fait attendre et le doute s'installe.

Le peuple dit à Moïse : Tu nous as amenés ici dans le désert pour nous faire mourir ! Pourquoi donc ? Est-ce qu’il n’y avait pas assez de tombes en Égypte ? Pourquoi est-ce que tu nous as fait sortir de ce pays ? (Ex 14,11).

Puis le peuple passe à travers la mer rouge. Ce passage de l'esclavage à la liberté, de la mort à la vie retentit comme un grand cri d'espérance.

Dieu, en ce jour-là, sauva Israël de la main de l’Egypte, et Israël vit l’Egypte morte sur le rivage de la mer. Israël vit avec quelle main puissante Dieu avait agi contre l’Egypte. Le peuple craignit Dieu, il mit sa foi dans Dieu et en Moïse son serviteur. (Ex 14, 30-31).

Le premier commandement résume l'espérance dans un avenir qui se fonde sur les hauts-faits du passé :

Je suis le Seigneur ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Egypte, de la maison de servitude. Tu n’auras pas d’autres dieux à côté de moi (Ex 20,3)

Le mouvement prophétique

Am 7,14-15 Amos répondit à Amacya : « Je n’étais pas prophète, je n’étais pas fils de prophète, j’étais bouvier, je traitais les sycomores ; mais le SEIGNEUR m’a pris de derrière le bétail et le SEIGNEUR m’a dit : Va ! prophétise à Israël mon peuple.

Des peurs

Dieu nous envoie dans le monde et nous pouvons avoir quelques réticences.

Jon 1,1-3 La parole de l'Éternel fut adressée à Jonas, fils d'Amitthaï, en ces mots : Lève-toi, va à Ninive, la grande ville, et crie contre elle! car sa méchanceté est montée jusqu'à moi. Et Jonas se leva pour s'enfuir à Tarsis.

Jr 2,1 La parole de l'Éternel me fut adressée, en ces mots : Va, et crie aux oreilles de Jérusalem.

Le prophète Jérémie vient tout juste de souffler ses 16 bougies. Il se sent bien jeune pour affronter les notables de la capitale. Dieu avait balayé ses griefs quelques instants auparavant l’envoi en mission :

Jr 1,6-9 Je répondis : Ah! Seigneur Éternel! voici, je ne sais point parler, car je suis un enfant. Et l'Éternel me dit: Ne dis pas: Je suis un enfant. Car tu iras vers tous ceux auprès de qui je t'enverrai, et tu diras tout ce que je t'ordonnerai. Ne les crains point, car je suis avec toi pour te délivrer, dit l'Éternel. Puis l'Éternel étendit sa main, et toucha ma bouche ; et l'Éternel me dit : Voici, je mets mes paroles dans ta bouche.

Quelles sont nos peurs ?

Un appel à la conversion

Le prophète est un homme de la parole : c’est la première caractéristique de sa mission. Il parle au nom de Dieu; il est son porte-parole et comme tel, il révèle aux hommes le sens des événements et indique une attitude correspondant à la Parole de Dieu qu’il apporte.

Les prophètes se sont élevés, chacun à leur époque, contre les maux de leur temps. Amos dénonça les inégalités sociales entre les riches et les pauvres.

Les prophètes entretiennent la croyance du peuple pour leur Dieu, car dans leur perspective, la fidélité à Yavhé est garante d’avenir et l’infidélité mène à la perte.

Les prophètes prêchent pour la fidélité religieuse en avertissant que l’infidélité est passible de punition. L’exil à Babylone est un exemple très significatif. Le prophète Jérémie a prêché en faveur de cet exil (Jr 24), car c’était une manière de retrouver la grâce de Dieu. La nation doit subir la destruction et l’exil pour être ensuite reconstruite par Dieu. Pour le prophète Amos, Dieu punit, mais c’est dans l’espoir que vienne la conversion (Am 9,8-15). Durant l’exil, les prédications du prophète Ézéchiel étaient, quant à elles, porteuses d’espoir et de motivation pour le peuple de Juda.

Ézéchiel 33, 7-9 La parole du Seigneur fut adressée à moi, Ézéchiel : « Toi aussi, fils d'homme, je t'ai fait guetteur pour la maison d'Israël. Lorsque tu entendras une parole de ma bouche, tu les avertiras de ma part. Si je dis au méchant : "Méchant, tu vas mourir", et que tu ne parles pas pour avertir le méchant d'abandonner sa conduite, lui, le méchant, mourra de sa faute, mais c'est à toi que je demanderai compte de son sang. Si au contraire tu as averti le méchant d'abandonner sa conduite pour se convertir et qu'il ne s'est pas converti, il mourra, lui, à cause de son péché, mais toi, tu auras sauvé ta vie. »

Une ouverture sur l'avenir

Israël cherchait « le pays où coulent le lait et le miel », mais il ne trouva que Canaan, où ne coulèrent absolument pas que le lait et le miel, mais aussi le sang et les larmes. La terre de Canan ne fut pas l’accomplissement de toute espérance, mais ce ne fut pas rien non plus. Israël interpréta de telles expériences comme les arrhes de plus grandes espérances, comme le gage d’un avenir encore plus grand.

Comment la nation juive parvint-elle à survivre, alors que tant de petites nations de l’antiquité perdirent tôt ou tard leur identité dans le creuset des grands empires du Moyen-Orient ? Peu de peuple sont tombés plus bas : épuisés par des défaites successives, réduit à un petit reste, déporté dans des contrées lointaines, soumis à la longue domination de puissances étrangères dont la civilisation dépassait de loin la sienne, ce peuple cependant survécut, reconstruisit une communauté nationale et maintint une tradition dont la continuité et le développement interne exercera une influence créatrice sur toute l’histoire postérieure. Comment cela se fit-il ? La seule réponse adéquate aux faits est que les grands prophètes ont élaboré une interprétation particulière (du cours) de l’histoire et ont su la faire accepter tout au moins à un assez grand nombre de leurs compatriotes pour les amener à s’orienter à l’avenir dans une direction nouvelle. (C.H. DODD, The Bible Today, cité par W. HARRINGTON, dans Introduction à la Bible,p. 338)

Pour beaucoup de personnes, le prophète est une personne qui prédit l’avenir. Or pour la Bible, le prophète n’est pas quelqu’un qui annonce l’avenir et encore moins un diseur de bonne (ou de mauvaise) aventure.

Une des vocations des prophètes est d'entretenir l'espérance

Jr 31,31-33 Bientôt, déclare le Seigneur, je conclurai une alliance nouvelle avec le peuple d'Israël et le peuple de Juda. Elle ne sera pas comme celle que j'avais conclue avec leurs ancêtres, quand je les ai pris par la main pour les faire sortir d'Égypte. Celle-là, ils l'ont rompue, et pourtant c'est moi qui étais leur maître, dit le Seigneur. Mais voici en quoi consistera l'alliance que je conclurai avec le peuple d'Israël, déclare le Seigneur : j'inscrirai mes instructions non plus sur des tablettes de pierre, mais dans leur conscience ; je les graverai dans leur coeur ; je serai leur Dieu et ils seront mon peuple.

Ha 2,1 Je tiendrai bon à mon poste de garde, je resterai debout sur les retranchements, je guetterai pour voir ce qu’il a à me dire et ce qu’il répondra à mes questions.

Jer 29,11 Je connais les projets que j'ai formés sur vous, projets de paix et non de malheur, afin de vous donner un avenir et de l'espérance.

Inséré dans l’actualité politique de son époque, le prophète est, selon la métaphore d’Ézéchiel, un guetteur (33,7). Face à l’envahisseur d’Israël, mais aussi au sein du peuple, face aux dysfonctionnements et aux injustices, il « ne se contente pas de critiquer le présent, il ouvre des perspectives, un horizon. Les prophètes ont forgé la trame essentielle de l’espérance du peuple d’Israël vis-à-vis du messie », explique Jesus ­Asurmendi. D’où la vision d’Ézéchiel (chapitre 37) : ces ossements desséchés qui se raniment et se rassemblent, annonçant le relèvement du peuple exilé.

37,1 La main du SEIGNEUR fut sur moi ; il me fit sortir par l’esprit (ruah) du SEIGNEUR et me déposa au milieu de la vallée : elle était pleine d’ossements. 2 Il me fit circuler parmi eux en tout sens ; ils étaient extrêmement nombreux à la surface de la vallée, ils étaient tout à fait desséchés. 3 Il me dit : « Fils d’homme, ces ossements peuvent-ils revivre ? » Je dis : « Seigneur DIEU, c’est toi qui le sais ! » 4 Il me dit : « Prononce un oracle contre ces ossements ; dis-leur : Ossements desséchés, écoutez la parole du Seigneur. 5 Ainsi parle le Seigneur DIEU à ces ossements : Je vais faire venir en vous un souffle (ruah) pour que vous viviez. 6 Je mettrai sur vous des nerfs, je ferai croître sur vous de la chair, j’étendrai sur vous de la peau, je mettrai en vous un souffle et vous vivrez ; alors vous connaîtrez que je suis le SEIGNEUR. »

Les oracles ne décrivent pas le futur; ils ouvrent un avenir : presque toutes les paroles des prophètes sont des paroles ouvrant sur l’avenir et interpellant la liberté de l’homme.

Les prophètes sont des “inconditionnels de l’espérance.” (J.-P. Prévost) Ils ne veulent pas “éteindre la mèche”. Malgré la situation du peuple, ils croient encore au salut possible; d’où la sévérité de leur ton. Mais même lorsqu’ils sont formulés de manière catégorique, leurs oracles restent une mise en garde, une invitation pressante à la conversion et à la vie : cf Jr 36, 3 ou Jon 3.

Espérer, c'est alors être tendu vers une destinée future qui brille à notre horizon. L'homme peut ne pas atteindre cet idéal, mais c'est dans cette attraction vers lui que se trouve le sens de la vie et de l'histoire.

Un cri vers Dieu

Le mot « Espérer », dans son sens strict, est exprimé par la racine hébraïque qwh. Le rapport étymologique probable avec le mot qaw (corde, fil) est évocateur, le mot tiqwah se traduisant d'une façon curieusement ambivalente par « espérance » mais aussi « fil » (Josué 2, 18-21), à l'image de notre expression « ne tenir qu'à un fil ».

Ps 143,7 Vite ! réponds-moi, SEIGNEUR !
je suis à bout de souffle.
Ne me cache pas ta face,
sinon je ressemble à ceux qui descendent dans la fosse.

Lam 3,22-24 Les bontés du SEIGNEUR! C'est qu'elles ne sont pas finies ! C'est que ses tendresses ne sont pas achevées ! Elles sont neuves tous les matins. Grande est ta fidélité ! Ma part, c'est le SEIGNEUR, me dis-je ; c'est pourquoi j'espérerai en lui.

Ps 39,7 Maintenant, Seigneur, que puis-je espérer (qa.vah) ? C’est en toi qu’est mon espérance (to.che.let).

Pr 11,7 A la mort du méchant, son attente (tiq.vah) meurt avec lui; c’est en pure perte qu’il plaçait son espoir (to.che.let) dans les richesses.

Ps 129,5 J'espère (qa.vah) en l'Éternel, mon âme espère (qa.vah), Et j'attends (ya.chal) sa promesse... 7 Israël, mets ton espoir dans le SEIGNEUR, car le SEIGNEUR dispose de la grâce et, avec largesse, du rachat. 8 C’est lui qui rachète Israël de toutes ses fautes.

Jb 6,11 Aurai-je encore la force d’espérer (ya.chal) ? Quelle sera ma fin, pour que je veuille persister à vivre ?

Psaume 27, 14 Espère en Yahvé, sois fort ! Reprends courage, et espère en Yahvé.

Psaumes 42, 6-12 ; 43, 5 : Qu'as-tu, mon âme, à défaillir, et à gémir sur moi ? Espère en Dieu : à nouveau je lui rendrai grâce, le salut de ma face et mon Dieu !

Ps 71,4 Mon Dieu, délivre-moi des mains du méchant,
de la poigne des criminels et des violents.
5 Tu es mon espérance, Seigneur DIEU,
ma sécurité dès ma jeunesse.
6 Je m’appuie sur toi depuis ma naissance,
tu m’as séparé du ventre maternel.
A toi sans cesse va ma louange ! ...
14 Pour moi, je ne cesse pas d’espérer
et je persiste à chanter tes louanges.
15 J’ai tous les jours à la bouche les récits
de ta justice et de ton salut,
et je n’en connais pas le nombre.

Il est vrai qu'il y a aussi l'espérance déçue et, d'une façon extraordinaire, Isaïe la met en scène à propos de Dieu lui-même pour les conflits de l'homme, dans ce joyau poétique et théologique qu'est le « chant de la vigne » :

Isaïe 5, 2 ; 7 « Il attendait (qwh) de beaux raisins, elle donna des raisins sauvages... j'espérais (qwh) avoir de beaux raisins, et elle a donné des raisins sauvages... il espérait (qwh) le droit et voici le sang versé, il espérait (qwh) la justice et voici les cris des opprimés ».

Lam 5,21 Fais-nous revenir vers toi, SEIGNEUR, et nous reviendrons ; renouvelle nos jours comme dans l'ancien temps.

Ps 89,47-50 Yhwh, jusqu’à quand ? Te cacheras-tu constamment ?… Yhwh ! Où sont tes bontés d’autrefois ? Tu avais juré à David sur ta fidélité ! Yhwh ! Pense à tes serviteurs outragés.

La miséricorde

L'espérance s'enracine dans la miséricorde de Dieu. La miséricorde, c’est se laisser toucher par le malheur d’autrui et agir en conséquence. Rien à voir avec un sentiment vague ou une mièvrerie affective ! La miséricorde nous saisit aux tripes.

Ex 34,5 Le SEIGNEUR descendit dans la nuée, se tint là avec lui, et Moïse proclama le nom de « SEIGNEUR ». 6 Le SEIGNEUR passa devant lui et proclama : « Le SEIGNEUR, le SEIGNEUR, Dieu miséricordieux et bienveillant, lent à la colère, plein de fidélité et de loyauté, 7 qui reste fidèle à des milliers de générations, qui supporte la faute, la révolte et le péché, mais sans rien laisser passer, qui poursuit la faute des pères chez les fils et les petits-fils sur trois et quatre générations. » 8 Aussitôt, Moïse s’agenouilla à terre et se prosterna. 9 Et il dit : « Si vraiment j’ai trouvé grâce à tes yeux, ô Seigneur, que le Seigneur marche au milieu de nous ; c’est un peuple à la nuque raide que celui-ci, mais tu pardonneras notre faute et notre péché, et tu feras de nous ton patrimoine. »

Mt 9,36 Voyant les foules, il fut pris de pitié pour elles, parce qu’elles étaient harassées et prostrées comme des brebis qui n’ont pas de berger. Lc 1,50 Et sa miséricorde (eleos) s'étend d'âge en âge Sur ceux qui le craignent.

Mt 5,7 Heureux les miséricordieux (eleemon), car ils obtiendront miséricorde !

Le mot hébreux rahamim est un pluriel qui signifie « entrailles ». Les hébreux considéraient que les entrailles, en tant que siège de tous les sentiments, pouvaient s'émouvoir sous le coup de la douleur ou d'une peine. C'est peut-être en ressentant des « papillons dans le ventre », comme on dit, qu'ils en étaient arrivés à considérer la miséricorde, comme un sentiment qui a son origine au sein même de la personne. La miséricorde apparaît alors comme l'attachement d'un être à un autre. Mais le terme rahamim désigne surtout l'attachement qui unit Dieu à l'être humain, comme si les « entrailles de Dieu » frémissaient en pensant à l'homme. Ainsi Dieu s'émeut avec tendresse comme un père ou une mère à l'égard de leurs enfants.

Pour exprimer cette proximité, ce souci constant, cette attention et cet amour prévenant, la langue hébraïque utilise des termes qui désignent l’utérus, les « entrailles maternelles» – et, par extension, l’amour sensible, quasi instinctif et indéfectible qu’une mère porte à son enfant. Yahvé est ému jusqu’aux entrailles pour son peuple.

  Une femme oublie-t-elle l’enfant qu’elle nourrit, cesse-t-elle chérir le fruit de ses entrailles ? Même s’il s’en trouvait une pour l’oublier, moi je ne t’oublierai jamais. (Isaïe 19,15).

Le mot miséricorde est une transposition de l’hébreu et signifie « avoir le cœur sensible au malheur ».

Elle nous bouleverse de l’intérieur. La miséricorde est l’attribut de Dieu par excellence. Elle se manifeste dans ce mouvement perpétuel de Dieu qui vient sauver son peuple, renouer son alliance avec l’homme quand celui-ci l’a rompue par son péché, ses errements, ses trahisons… Elle culmine sur la croix lorsque Jésus-Christ prend sur lui par amour la faute et la misère des hommes pour les en libérer. «Jésus-Christ, souligne le pape François dans la bulle d’indiction du jubilé de la miséricorde (§1), est le visage de la miséricorde du Père» : il a compassion des foules et des pauvres, mange avec les pécheurs, guérit les malades, etc. Saint Thomas d’Aquin dit encore que la miséricorde est le signe par excellence de la toute-puissance divine.

Avons-nous déjà fait l'expérience de la miséricorde de Dieu ?

Le messianisme

Le Messie dans la plupart des livres de l'ancien Testament n'est pas d'emblée une figure surnaturelle ; c'est un sauveur humain, un sauveur qui convient la restauration du royaume terrestre d'Israël.

Is 45,1 Ainsi parle le Seigneur à son messie, à Cyrus, qu’il a pris par la main pour lui soumettre les nations et désarmer les rois.

Lam 4,20 Le souffle de nos narines, le messie du SEIGNEUR, (Sédécias) est captif dans leurs oubliettes, lui dont nous disions : « Sous sa protection, au milieu des nations, nous vivrons. »

Par conséquent, il faut dire pour l'Ancien Testament qu'il n'y a pas d'attente du Messie au sens strict, mais plutôt d’un souverain (Mic 5.1), du rejeton juste (Jr 23.5) ou d'un roi (Ez 37.24), qui adviendra dans l'avenir. Mais, au cœur des épreuves, les prophètes nourrissent l'espérance de leur peuple.

Mic 5,2-3 Et toi, Bethléhem Ephrata, Petite entre les milliers de Juda, De toi sortira pour moi Celui qui dominera sur Israël, Et dont l'origine remonte aux temps anciens, Aux jours de l'éternité. C'est pourquoi il les livrera Jusqu'au temps où enfantera celle qui doit enfanter, Et le reste de ses frères Reviendra auprès des enfants d'Israël.…

Jr 23,5-6 Des jours viennent – oracle du SEIGNEUR –, où je susciterai pour David un rejeton légitime : Un roi règne avec compétence, il défend le droit et la justice dans le pays. En son temps, Juda est sauvée, Israël habite en sécurité. Voici le nom dont on le nomme : « Le SEIGNEUR, c’est lui notre justice. »

Ez 37,24 Mon serviteur David régnera sur eux, berger unique pour eux tous ; ils marcheront selon mes coutumes, ils garderont mes lois et les mettront en pratique.

Is 7,14 Aussi bien le Seigneur vous donnera-t-il lui-même un signe : Voici que la jeune femme est enceinte et enfante un fils et elle lui donnera le nom d’Emmanuel.

Is 11, 1-4 Un rameau sortira de la souche de Jessé, un rejeton jaillira de ses racines. Sur lui reposera l'Esprit du Seigneur : esprit de sagesse et de discernement, esprit de conseil et de vaillance, esprit de connaissance et de crainte du Seigneur. Il ne jugera pas d'après ce que voient ses yeux, il ne se prononcera pas d'après ce qu'entendent ses oreilles. Il jugera les faibles avec justice, il se prononcera dans l'équité envers les pauvres du pays. De sa parole, comme d'un bâton, il frappera le pays, du souffle de ses lèvres il fera mourir le méchant.

Devant la puissante armée d'Assyrie qui, au pied de la colline de Jérusalem, attend le moment propice pour attaquer, Isaie annonce la venue de l'Esprit du Seigneur sous un aspect durable. Cette fois-ci, l'Esprit ne fera pas que descendre ou passer sur quelqu'un, mais il se reposera enfin, et à jamais, sur le Messie-Roi.

Ce Messie est, pour ainsi dire, l'avenir que Dieu a décidé pour Israël. Investi non seulement d'une piété pleine et entière à son Dieu (la connaissance et la crainte du Seigneur), mais aussi des attributs divins et royaux (la sagesse, le discernement, le conseil et la vaillance), le Messie aura souci de la justice envers les pauvres. L'Esprit agira avec lui, en lui et par lui pour bouleverser le monde dans la paix du Royaume de Dieu. En d'autres termes, il osera laisser agir Dieu à travers lui plutôt que de se laisser influencer par la courte vue des ambitions humaines. Le Messie ne conduira pas son peuple à la lumière du présent qu'il verra et entendra, mais il transformera son peuple à la lumière de ce qui vient en plénitude : le Royaume de Dieu.

L'espérance dans le Nouveau Testament

Avec le Nouveau Testament, nous voyons que Jésus vient accomplir les promesses messianiques de l’Ancien Testament, mais dans un sens inattendu. Jésus nous annonce que le Royaume de Dieu est commencé. Enfin il inaugure la vie éternelle à travers sa mort résurrection.

Le royaume de Dieu est commencé

Jésus ne tient pas de discours politique et pourtant il parle de règne, de royauté et de royaume. Pour Jésus, cette forme de régence ne correspond pas à une réalité politique, sociale ou culturelle. Jésus ne distille aucun programme de réformes. Il ne fait aucune promesse électorale qui pourrait être accomplie par les sciences, la technique ou l’économie. Il ne promet aucune augmentation de salaire, ni des congés payés, pas même une assurance tous risques.

Le message de l'Évangile n'est pas que le Royaume de Dieu viendra plus tard, mais qu'il s'est approché (Mat 4,17; Luc 10,9; etc...) en Jésus Christ. Ce n'est pas seulement quand Jésus reviendra que nous serons enfin dans les temps messianiques, mais le Messie est venu en Jésus Christ, donc nous sommes bel et bien dans les temps messianiques, et il n'y a plus à attendre une autre ère messianique. Les prémices du royaume sont en germe. À regarder le monde d’aujourd’hui, on constate que l’ivraie conserve une part très envahissante. Et pourtant les évangiles nous affirment dès les premiers versets :

Mc 1,15 : le royaume de Dieu s’est approché

Le royaume est déjà là, mais pas encore accompli. Il s’est approché avec l’irruption de Dieu dans le monde en la personne de Jésus. Jésus manifeste à travers ses paroles et ses actes le « déjà là » et le « pas encore » du royaume de Dieu. Il incarne l’attente messianique en lui donnant une orientation inattendue. Son royaume est celui des pauvres et des exclus, des malades et des opprimés. Il n’a donc aucune chance de renverser le pouvoir par la force.

Le royaume de Dieu est déjà là à chaque fois qu’un mot ou qu’un geste fait grandir l’humanité vers plus de liberté, de paix et de joie.

Lc 6,20-38 « Et lui, levant les yeux sur ses disciples, disait: "Heureux, vous les pauvres, car le Royaume de Dieu est à vous… Aimez vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, bénissez ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous diffament. À qui te frappe sur une joue, présente encore l'autre; à qui t'enlève ton manteau, ne refuse pas ta tunique. À quiconque te demande, donne, et à qui t'enlève ton bien ne le réclame pas. Ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le pour eux pareillement... Ne jugez pas, et vous ne serez pas jugés; ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés; remettez, et il vous sera remis. Donnez, et l'on vous donnera; c'est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante, qu'on versera dans votre sein; car de la mesure dont vous mesurez on mesurera pour vous en retour." »

A quelle occasion ai-je participé à la construction du royaume de Dieu ?

Le projet de Dieu

Ap 4,11 Tu es digne, ô notre Seigneur et notre Dieu, de recevoir la gloire, l'honneur et la puissance, car c'est toi qui créas l'univers ; par ta volonté, il n'était pas et fut créé.

1 Tm 2,3-4 C’est la Volonté de notre Père que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité.

Jn 17,1. Ainsi parla Jésus, et levant les yeux au ciel, il dit : « Père, l'heure est venue : glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie 2. et que, selon le pouvoir que tu lui as donné sur toute chair, il donne la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés ! 3. Or, la vie éternelle, c'est qu'ils te connaissent, toi, le seul véritable Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ. 26. Je leur ai fait connaître ton nom et je le leur ferai connaître, pour que l'amour dont tu m'as aimé soit en eux et moi en eux.

Ces projets trouvent leur incarnation dans le commandement de l'amour.

Mt 22,35-39 Et l'un d'eux (des Pharisiens) lui demanda pour l'embarrasser : « Maître, quel est le plus grand commandement de la Loi ? » Jésus lui dit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit : voilà le plus grand et le premier commandement. Le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. À ces deux commandements se rattache toute la Loi, ainsi que les Prophètes. »

1 The 4,3. Et voici quelle est la volonté de Dieu : c'est votre sanctification.

Les obstacles

Le doute : nous voudrions des preuves irréfutables Dieu.

Jn 20,25 Si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas !

Le doute est inséparable de la foi, parce que celle-ci relève d'une relation entre deux êtres et non des sciences exactes. La foi donne des signes mais ne se démontre pas. Dieu nous donne la foi dans le sens où il nous accorde une confiance absolue. Même si nous trébuchons, il continue à nous accorder sa foi.

Le doute peut engendrer la lassitude et le découragement, d’où la nécessité de ne jamais vivre en chrétien seul.

Le mal : nous sommes tous des Job et nous réclamons une explication sur les épreuves qui nous assaillent. Job réclame une joute verbale. Lorsque Dieu prend la parole au milieu de l'ouragan, Job met la main devant sa bouche et dit :

Jb 40, 39 Job répondit alors au SEIGNEUR et dit : 4Je ne fais pas le poids, que te répliquerai-je ? Je mets la main sur ma bouche. 5 J’ai parlé une fois, je ne répondrai plus, deux fois, je n’ajouterai rien.

Nous avons le droit de crier notre souffrance et notre incompréhension. La bible ne répond pas au pourquoi de la souffrance, mais nous rappelle que le mal quel que soit sa forme n'aura pas le dernier mot.

Les nouvelles idoles : les influenceurs sur internet, les sectes avec leurs gourous, le mouvement transhumaniste, l'hédonisme, le consumérisme ...

« Laissez une paroisse vingt ans sans prêtres. On y adorera les bêtes », disait le saint curé d’Ars, comme pour signifier que l’homme ne peut tenir que par le Haut et que sans une orientation de tout son être vers l’Amour invisible, manifesté dans le visage de l’autre, et surtout du plus petit, il se perdra dans l’abîme de son propre nombrilisme. Sans Dieu, l’homme s’efface comme une trace de sable. Il faut même aller plus loin : là où Dieu perd son visage, là où il n’est vénéré que comme un « Être suprême », un « grand architecte » infiniment détaché de l’histoire, les hommes perdent aussi leur visage... L’heure est à l’humble courage de chaque jour et à la surnaturelle espérance. Luc de Bellescize.

Jésus face à la souffrance

Face à nos croix, quelle est la réaction de Jésus ? Durant ses trois années de vie publique, Jésus croise de nombreuses personnes en souffrance, avec compassion et miséricorde. Il se fait proche des souffrants et ne craint ni le cadre rigoureux d’une loi lui interdisant de guérir un jour de sabbat (Lc 6,5-11), ni la contagion d’une maladie telle que la lèpre (Lc 5,12-13). Jésus s’intéresse à la personne, à sa condition humaine et à son devenir. Jésus ne cherche pas à connaître l’origine de nos maux. Il se différencie en cela d’un thaumaturge dont le but est le diagnostic médical. Jésus passe de lieu en lieu en faisant le bien (Ac 10,38). Il se montre solidaire de nos fardeaux en nous aidant à les porter (Mt 8,16-17). Jésus accomplit des miracles. Il guérit les malades, donne à manger aux affamés, console les affligés, libère de la possession démoniaque et par trois fois rend la vie à un mort : le fils de la veuve de Naïn (Lc 7,11-17), la fille de Jaïre (Lc 8,41-56) et Lazare (Jn 11,1-46) . Dans ce dernier cas nous voyons Jésus pleurer la mort de son ami. Dieu en larmes ! Voilà une image saisissante d’un Dieu proche de nos souffrances. En somme, Jésus nous rappelle que la souffrance est toujours un mal à combattre. Voir l'étude Dieu tout-puissant, mythe ou réalité.

Il nous appelle à nous libérer de nos peurs pour affronter la souffrance et la mort :

Le christianisme est, dans cette acceptation de l’idée libératrice de Dieu, la grande religion du dépassement de la peur. Elle a défié la peur la plus profondément ancrée, qui est la base de toutes les autres peurs, la peur de la mort, et offre, dans la foi en la résurrection, la seule réponse possible qui permet d’accepter l’inacceptable (Siegfried POWALLA).

Le Christ nous aide-t-il dans nos souffrances ?

Les disciples d'Emmaüs

Ce récit montre le passage du désespoir vers l'espérance. Les deux disciples croyaient en un libérateur au sens politique de ce terme. Ils sont donc déçus de l'issue fatale. Mais Jésus va les rejoindre sur leur route pour les transformer. Ce récit nous montre comment notre foi dans la Résurrection du Christ nous permet de nous engager et rester sur un chemin d’espérance. Voir l'étude sur le récit des disciples d'Emmaüs.

Le pardon, chemin d'espérance

Le pardon nous ouvre les portes de l'espérance, celle d'un avenir qui nous libère de la rancoeur, de la culpabilité, du désir de vengeance. Ce qui donne à certains la force de pardonner, c'est la foi au Dieu de miséricorde nous faisant un devoir de nous pardonner réciproquement nos offenses, de ne pas rendre le mal pour le mal et d'instaurer sur la terre le règne de l'amour.

La question devient cruciale lorsque l’on ne peut pas réparer. La mort d’un enfant, un handicap à vie, une entreprise ruinée par malveillance, des médisances et des mensonges au cours de procès, et tant d’autres choses encore. Lorsque la dette est impayable, que peut-on faire ? Nous savons que Jésus nous demande de pardonner sans limite. Mais bien souvent, si nous comprenons la demande, nous n’avons pas la volonté ou le courage.

Hans Urs von Balthasar : « Nous avons le devoir d’espérer pour tous ». Ce qui en d’autres termes revient à dire que nous espérons le pardon pour tous. Et son argument est le suivant : « Au nom de quoi puis-je refuser à d’autres ce que j’espère tant pour moi-même, à savoir le salut ». Au nom de ma sainteté plus grande ? Argument impossible pour le chrétien qui fait profession d’humilité. Au nom de son péché plus grand que tous les miens ? Certes, il y a des degrés dans le mal. Mais qu’est-ce que je sais du mal que j’ai vraiment fait autour de moi alors que j’ai peut-être tant reçu pour faire le bien ?

En définitive, je choisis avec le Christ de tout pardonner pour espérer pouvoir être pardonné un jour moi aussi par le Père de toute miséricorde. Car c’est bien à la mesure dont j’aurais usé pour les autres que je serai jugé moi-même. Personne ne peut dire s’il y arrivera. Mais la seule façon d’y parvenir c’est de ne pas s’interdire cette solution. Bruno Feillet

La persévérance

Is 26,3 A celui qui est ferme dans ses dispositions, tu assures une paix parfaite, parce qu’il se confie en toi.

Toute entreprise humaine nécessite une persévérance dans l'effort. Celui qui veut devenir champion olypique doit se préparer longtemps à l'avance et persévérer quotidiennement. Il en est de même pour le pianiste qui doit refaire ses gammes sans cesse. Même dans la vie courante, familiale ou professionnelle, il faut persévérer pour aplanir les chemins, dénouer les tensions, apporter de la joie.

Is 26,3 A celui qui est ferme dans ses dispositions, tu assures une paix parfaite, parce qu’il se confie en toi.

Col 1,23 il faut que vous restiez fondés et inébranlables dans la foi, sans vous détourner de l'espérance de l'Évangile.

Tim 4.16 Veille sur toi-même et sur ton enseignement. Mets-y de la persévérance, car en agissant ainsi, tu te sauveras toi-même ainsi que ceux qui t'écoutent.

Jc 1,2 Mes frères et sœurs, quand vous passez par toutes sortes d’épreuves, considérez-vous comme heureux. 3 Car vous le savez : la mise à l’épreuve de votre foi produit la persévérance. 4 Mais il faut que votre persévérance aille jusqu’au bout de ce qu’elle peut faire pour que vous parveniez à l’état d’adultes et soyez pleins de force, des hommes auxquels il ne manque rien.

Des moyens pour persévérer

Patience

Ga 6,9 Ne nous lassons pas de faire le bien; car nous moissonnerons au temps convenable, si nous ne nous relâchons pas.

Volonté

Ps 40,8 - Je veux faire ta volonté, mon Dieu! Et ta loi est au fond de mon cœur.
Mt 6,10 que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.

Esprit de force

2 Tim 1,7 Ce n'est pas un esprit de timidité que Dieu nous a donné, mais un esprit de force, d'amour et de sagesse

La résurrection

Tu as pouvoir sur la vie et la mort, tu fais descendre aux portes de l’Hadès et en fais remonter. (Sg 16,13).

Poursuivons notre réflexion en abordant le kérygme de la foi chrétienne, à savoir notre espérance en la résurrection des corps. Si nous ne disposons pas d’un reportage sur l’au-delà, la Bible nous livre quelques indices pour nous mettre l’eau à la bouche. Qu’y a-t-il, après la mort ? Cette question nous habite tous à un moment de notre histoire. Elle surgit lorsque nous perdons un être cher, un ami ou un parent et aussi lorsque l’échéance personnelle approche. Le questionnement en appelle aussi à une espérance, comme si l’idée d’une fin définitive était étrangère à notre humanité. Jésus, premier-né d’entre les morts (Col 1,18), nous ouvre la porte. Cette inauguration se concrétise dans le secret d’un tombeau, entre Dieu et son fils Jésus :

Dieu l’a ressuscité le troisième jour. (Ac 10,40).

Nous ne savons rien sur ce moment extraordinaire qui défie les lois de notre humanité. La découverte du tombeau vide n’est pas une preuve, mais une mise en route, un questionnement. L’événement n’est accessible qu’avec les yeux de la foi. C’est en sens que nous pouvons affirmer que Dieu donne la foi. Dieu ouvre symboliquement le tombeau pour que notre regard se convertisse à la résurrection. Mais comment croire à la résurrection de Jésus sans preuve tangible ? Nous sommes tous des Thomas :

Si je ne vois dans ses mains la marque des clous, et si je ne mets mon doigt dans la marque des clous, et si je ne mets ma main dans son côté, je ne croirai point. (Jn 20,25).

Nous aimerions voir Jésus ressuscité. Ce serait tellement plus simple de croire. Est-ce si sûr ? Jésus nous fait la promesse que la mort n’est pas le dernier mot de notre histoire et que nous sommes tous appelés à ressusciter en lui. Nous pouvons proclamer avec Paul :

Ô mort, où est ta victoire ? (1Co 15,55).

Dans ce mystère de Jésus ressuscité, nous percevons la certitude que Dieu n’abandonne pas l’humanité de manière définitive. S’il se tait de notre vivant, il vient nous chercher lorsque l’espoir cède sa place à l’espérance, lorsque nous rendons notre dernier souffle. N’est-ce pas dans ce moment dramatique que jaillit la puissance divine, dans cet événement qui réclame un total abandon ? La mort ouvre la porte de l’impossible. Elle ouvre en grand les portes de l'espérance pour une terre nouvelle.

Notre foi dans la Résurrection du Christ n’empêche pas les doutes, la souffrance, l’obscurité pour avancer. Elle nous dit qu'une lumière brille au-delà de nos nuages et qu'un jour un vent d'espérance soufflera pour que le soleil revienne dans nos coeurs. Toute la bible nous dit, que la souffrance et la mort n’auront pas le dernier mot de l’histoire.

L'espérance est tout ensemble personnelle et ecclésiale. C'est pourquoi on doit aussi parler de l'espérance de l'Eglise de la terre. Celle-ci est soulevée du désir impatient de la pleine manifestation de la victoire de Jésus Christ sur la mort entraînant dans sa Résurrection l'humanité rachetée tout entière. Qu'on pense à la grandiose vision finale de l'Apocalypse (chapitre 21) : le ciel nouveau, la terre nouvelle, la Jérusalem nouvelle, et la fin des tribulations :

Ap 21,4 Il essuiera toute larme de leurs yeux, La mort ne sera plus. Il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni souffrance, car le monde ancien a disparu.

L’Église enseigne, en outre, que l’espérance eschatologique ne diminue pas l’importance des tâches terrestres, mais en soutient bien plutôt l’accomplissement par de nouveaux motifs. À l’opposé, lorsque manquent le support divin et l’espérance de la vie éternelle, la dignité de l’homme subit une très grave blessure, comme on le voit souvent aujourd’hui, et l’énigme de la vie et de la mort, de la faute et de la souffrance reste sans solution : ainsi, trop souvent, les hommes s’abîment dans le désespoir. Gaudium et spes, 21).

Cieux nouveaux - terre nouvelle

Les prophètes annoncent, au fil de pages que c’est un pays de Canaan transfiguré que le peuple de Dieu attend, un pays où le désert refleurira, les sourds entendront, les aveugles verront, la terre desséchée se changera en lac (Is 35.5-7). De nouveaux cieux et une nouvelle terre ne seront-ils pas créés, où le loup habitera avec l’agneau, où les maux du passé seront oubliés, où règnera la réconciliation (Is 65,16c-17, 25 ; 66,22 ; cf. 11,6-9) ? Les textes ne parlent-ils pas constamment d’une nouvelle Jérusalem, glorieuse, transfigurée, rayonnante, où toutes les nations afflueront vers un même Dieu. Toutes ces réalités renvoient, d’une manière ou d’une autre, à la terre et au ciel !

Is 35,5-7 Alors s'ouvriront les yeux des aveugles, S'ouvriront les oreilles des sourds; Alors le boiteux sautera comme un cerf, Et la langue du muet éclatera de joie. Car des eaux jailliront dans le désert, Et des ruisseaux dans la solitude; Le mirage se changera en étang Et la terre desséchée en sources d'eaux; Dans le repaire qui servait de gîte aux chacals, Croîtront des roseaux et des joncs.

Is 65,17 Car voici que je vais créer des cieux nouveaux et une terre nouvelle, on ne se souviendra plus du passé, il ne reviendra plus à l'esprit.

2P 3,13 Ce sont de nouveaux cieux et une terre nouvelle que nous attendons selon sa promesse, où la justice habitera.

Ap 21,1 Puis je vis un nouveau ciel et une nouvelle terre; car le premier ciel et la première terre avaient disparu, et la mer n'était plus. Ap 21,4Il essuiera toute larme de leurs yeux : de mort, il n'y en aura plus ; de pleur, de cret de peine, il n'y en aura plus, car l'ancien monde s'en est allé.

L'espérance est tout ensemble personnelle et ecclésiale. C'est pourquoi on doit aussi parler de l'espérance de l'Eglise de la terre. Celle-ci est soulevée du désir impatient de la pleine manifestation de la victoire de Jésus Christ sur la mort entraînant dans sa Résurrection l'humanité rachetée tout entière. Qu'on pense à la grandiose vision finale de l'Apocalypse (chapitre 21) : le ciel nouveau, la terre nouvelle, la Jérusalem nouvelle, et la fin des tribulations.

Sauvés dans l'espérance (spe salvi) - Benoît XVI

22. Sans aucun doute, le progrès offre de nouvelles possibilités pour le bien, mais il ouvre aussi des possibilités abyssales de mal – possibilités qui n'existaient pas auparavant. Nous sommes tous devenus témoins de ce que le progrès, lorsqu'il est entre de mauvaises mains, peut devenir, et est devenu de fait, un progrès terrible dans le mal. Si au progrès technique ne correspond pas un progrès dans la formation éthique de l'homme, dans la croissance de l'homme intérieur (cf. Ep 3, 16; 2 Co 4, 16), alors ce n'est pas un progrès, mais une menace pour l'homme et pour le monde.

25. La science peut contribuer beaucoup à l'humanisation du monde et de l'humanité. Cependant, elle peut aussi détruire l'homme et le monde si elle n'est pas orientée par des forces qui se trouvent hors d'elle.

26. Ce n'est pas la science qui rachète l'homme. L'homme est racheté par l'amour. Cela vaut déjà dans le domaine purement humain. Lorsque quelqu'un, dans sa vie, fait l'expérience d'un grand amour, il s'agit d'un moment de « rédemption » qui donne un sens nouveau à sa vie. Mais, très rapidement, il se rendra compte que l'amour qui lui a été donné ne résout pas, par lui seul, le problème de sa vie. Il s'agit d'un amour qui demeure fragile. Il peut être détruit par la mort. L'être humain a besoin de l'amour inconditionnel. Il a besoin de la certitude qui lui fait dire: « Ni la mort ni la vie, ni les esprits ni les puissances, ni le présent ni l'avenir, ni les astres, ni les cieux, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu qui est en Jésus Christ » (Rm 8, 38-39).

27. En ce sens, il est vrai que celui qui ne connaît pas Dieu, tout en pouvant avoir de multiples espérances, est dans le fond sans espérance, sans la grande espérance qui soutient toute l'existence (cf. Ep 2, 12). La vraie, la grande espérance de l'homme, qui résiste malgré toutes les désillusions, ce ne peut être que Dieu – le Dieu qui nous a aimés et qui nous aime toujours « jusqu'au bout », « jusqu'à ce que tout soit accompli » (cf. Jn 13, 1 et 19, 30)... « La vie éternelle, c'est de te connaître, toi le seul Dieu, le vrai Dieu, et de connaître celui que tu as envoyé, Jésus Christ » (Jn 17, 3). La vie dans le sens véritable, on ne l'a pas en soi, de soi tout seul et pas même seulement par soi: elle est une relation. Et la vie dans sa totalité est relation avec Celui qui est la source de la vie. Si nous sommes en relation avec Celui qui ne meurt pas, qui est Lui-même la Vie et l'Amour, alors nous sommes dans la vie. Alors nous « vivons ».

30. Tout au long des jours, l'homme a de nombreuses espérances – les plus petites ou les plus grandes –, variées selon les diverses périodes de sa vie. Parfois il peut sembler qu'une de ces espérances le satisfasse totalement et qu'il n'ait pas besoin d'autres espérances. Dans sa jeunesse, ce peut être l'espérance d'un grand amour qui le comble; l'espérance d'une certaine position dans sa profession, de tel ou tel succès déterminant pour le reste de la vie. Cependant, quand ces espérances se réalisent, il apparaît clairement qu'en réalité ce n'était pas la totalité. Il paraît évident que l'homme a besoin d'une espérance qui va au-delà. Il paraît évident que seul peut lui suffire quelque chose d'infini, quelque chose qui sera toujours plus que tout ce qu'il peut atteindre.

31. Encore une chose: nous avons besoin des espérances – des plus petites ou des plus grandes – qui, au jour le jour, nous maintiennent en chemin. Mais sans la grande espérance, qui doit dépasser tout le reste, elles ne suffisent pas. Cette grande espérance ne peut être que Dieu seul, qui embrasse l'univers et qui peut nous proposer et nous donner ce que, seuls, nous ne pouvons atteindre.

Entretenir l'espérance - Vivre la résurrection au quotidien

    Nous vivons tous des morts symboliques au quotidien :

  • Échec dans un entreprise
  • Difficultés dans la vie de foi
  • Séparation dans un couple
  • Maladie
  • Chômage
  • Addictions : drogue, alcool, pornographie…
  • Perte d’un être cher
    Ces événements nous invitent à trois attitudes

  • Lâcher-prise
  • L’abandon
  • Vivre dès à présent une forme de résurrection. Nous avons parlé du pardon. Voilà une forme bien concrète de mort/résurrection que nous sommes invités à vivre au quotidien. Voir l'étude sur le pardon.

L’espérance « fait avancer le monde », avait assuré le pape François au cours d’une audience générale en 2017. En s’appuyant sur le Seigneur, chacun est appelé à « ouvrir des brèches » et « construire des ponts ». Le pape François nous propose 10 clés pour nourrir l’espérance.

  • 1 - Ne capitule pas devant la nuit : souviens-toi que le premier ennemi à soumettre n’est pas en dehors de toi : il est à l’intérieur. C’est pourquoi, ne laisse pas de place aux pensées amères, obscures.

  • 2 - Ne pense jamais que la lutte qui conduit là-haut soit totalement inutile. À la fin de l’existence, ce n’est pas le naufrage qui nous attend : en nous palpite une semence d’absolu. Dieu ne déçoit pas : s’il a mis une espérance dans nos cœurs, il ne veut pas l’étouffer par des frustrations continuelles. Tout naît pour fleurir dans un printemps éternel.

  • 3 - Partout où tu es, construis ! Si tu es par terre, lève-toi ! Ne reste jamais tombé par terre, lève-toi, laisse-toi aider pour te mettre debout. Si tu es assis, mets-toi en chemin ! Si l’ennui te paralyse, chasse-le par des œuvres bonnes ! Si tu te sens vide ou démoralisé, demande que l’Esprit-Saint puisse à nouveau remplir ton néant.

  • 4 - Fais la paix au milieu des hommes, et n’écoute pas la voix de celui qui répand la haine et les divisions. N’écoute pas ces voix ! Les êtres humains, tout en étant différents les uns des autres, ont été créés pour vivre ensemble. Dans les conflits, patiente : un jour tu découvriras que chacun est dépositaire d’un fragment de vérité. Aime les personnes. Aime-les une par une. Respecte le chemin de chacun.

  • 5 - Et surtout, rêve ! N’aie pas peur de rêver. Rêve ! Rêve un monde qui ne se voit pas encore mais qui arrivera certainement. L’espérance nous pousse à croire à l’existence d’une création qui s’étend jusqu’à son accomplissement définitif, quand Dieu sera tout en tous.

  • 6 - Sois responsable de ce monde et de la vie de tous les hommes. Pense que chaque injustice contre un pauvre est une blessure ouverte et diminue ta propre dignité. La vie ne s’arrête pas avec ton existence et, dans ce monde, viendront d’autres générations qui succèderont à la nôtre et beaucoup d’autres encore. Et chaque jour, demande à Dieu le don du courage.

  • 7 - Aie toujours le courage de la vérité, mais souviens-toi : tu n’es supérieur à personne.

  • 8 - Et cultive des idéaux. Vis pour quelque chose qui dépasse l’homme.

  • 9 - Si tu te trompes, relève-toi : rien n’est plus humain que de commettre des erreurs. Et ces mêmes erreurs ne doivent pas devenir pour toi une prison. Ne sois pas enfermé dans tes erreurs.

  • 10 - Si l’amertume te frappe, crois fermement en toutes les personnes qui agissent encore pour le bien : dans leur humilité, il y a la semence d’un monde nouveau. Fréquente les personnes qui ont gardé leur cœur comme celui d’un enfant. Apprends de la merveille, cultive l’étonnement.Vis, aime, rêve et crois. Et, avec la grâce de Dieu, ne désespère jamais.

Conclusion

La porte obscure du temps, de l’avenir, a été ouverte toute grande. Celui qui a l’espérance vit différemment ; une vie nouvelle lui a déjà été donnée (Benoît XVI Spe Salvi n° 2).

    En conclusion, comment vivre de l'espérance ?
  • Vivre dans la joie à travers une attitude positive (ne pas dire c'était mieux avant). Il n'est pas facile de rester positif et plein d’espérance quand on regarde l’actualité. Que ce soit à notre porte ou à l’autre bout du monde, de nombreux événements peuvent nous faire peur de l’avenir. Mais quand les nuages s'amoncellent et que les épreuves s'accumulent, la Bible invite chacun de nous à placer notre espérance en Dieu, le seul qui puisse nous aider à traverser les souffrances et à voir la beauté en toute chose.

    Le saint est capable de vivre joyeux et avec le sens de l’humour. Sans perdre le réalisme, il éclaire les autres avec un esprit positif et rempli d’espérance. François, Joie et allégresse, 122.

    Il y a des moments difficiles, des temps de croix, mais rien ne peut détruire la joie surnaturelle qui « s’adapte et se transforme, et elle demeure toujours au moins comme un rayon de lumière qui naît de la certitude personnelle d’être infiniment aimé, au-delà de tout ». C’est une assurance intérieure, une sérénité remplie d’espérance qui donne une satisfaction spirituelle incompréhensible selon les critères du monde. François, Joie et allégresse, 125.

  • La prière : demander à l'Esprit de nous donner ses dons : intelligence, connaissance, force, conseil, crainte, piété, sagesse.

  • Les sacrements : signes du salut déjà commencé.

    Gaudium et spes 38.2. Le Seigneur a laissé aux siens les arrhes de cette espérance et un aliment pour la route : le sacrement de la foi, dans lequel des éléments de la nature, cultivés par l’homme, sont changés en son Corps et en son Sang glorieux. C’est le repas de la communion fraternelle, une anticipation du banquet céleste.

Nous sommes tous prêtres, prophètes et rois de par notre baptême. Nous sommes appelés à célébrer, annoncer, servir, donc à entretenir l'espérance dans le monde. Nous sommes le sel de la terre (Mt 5,13). Nous sommes des guetteurs envoyés en mission.

Is 21,6 Car ainsi m’a parlé le Seigneur : Va, place le guetteur qu’il annonce ce qu’il verra.

Nous sommes envoyés comme guetteurs dans le monde, pour reconnaitre et semer des germes d'espérance.