Quelle est notre espérance ?

J'attends la résurrection des morts et la vie du monde à venir (Credo).

Il n'y a de véritable espérance que celle qui porte sur l'au-delà de la mort (Cardinal Joseph RATZINGER).

L’espérance est la vertu théologale par laquelle nous désirons comme notre bonheur le Royaume des cieux et la Vie éternelle, en mettant notre confiance dans les promesses du Christ et en prenant appui, non sur nos forces, mais sur le secours de la grâce du Saint-Esprit (CEC 1817).

Nous avons l’espérance de la vie éternelle, promise depuis toujours par Dieu qui ne ment pas (Tite 1, 1-2).

L’espérance, c’est elle qui fait tout le bonheur de l’homme (Curé d’Ars).

En introduction, essayons de définir l'espérance. Nous pouvons tout d'abord dire que l'espérance est une vertu théologale au même titre que la foi et la charité. Cela signifie que l'espérance nous dit quelque chose de Dieu. La foi, l'espérance et la charité sont comme trois étoiles qui s'allument dans le ciel de notre vie spirituelle pour nous conduire à Dieu.

L'espérance est un don de Dieu. L'espérance, ainsi, ne vient pas du fond de la créature, mais est inspirée, et co-accomplie, par l'Esprit. Individuelle et ecclésiale, elle dit à la fois la promesse et le certitude. Attente personnelle de la béatitude, elle assume et dépasse tous les espoirs humains. Attente de l'Eglise tendue vers les fins dernières, elle ne se laisse réduire ni à un projet historique, ni à une utopie. Espérer, c'est attendre Dieu de Dieu : vertu théologale. Revue Communio.

Dieu nous a été donné l'espérance, une espérance fiable, en vertu de laquelle nous pouvons affronter notre présent: le présent, même un présent pénible, peut être vécu et accepté s'il conduit vers un terme et si nous pouvons être sûrs de ce terme, si ce terme est si grand qu'il peut justifier les efforts du chemin. Benoît XVI, Spe salvi, 1.

Charles Péguy : La foi ne voit que ce qui est. L'espérance, en revanche, voit ce qui sera. La charité n'aime que ce qui est. Quant à l'espérance elle aime ce qui sera.

Il faut aussi distinguer espoir et espérance. Le premier relève des choses humaines. J'espère qu'il va faire beau demain ; j'espère qu'il viendra à mon rendez-vous : nous sommes dans le registre de l'espoir. Aujourd'hui l'humanité fonde ses espoirs presque illimités dans le pouvoir technique, la médecine, dans l'intelligence artificielle. L'espérance demeure lorsqu'il n'y a plus d'espoir.

Paul VI déclarait en 1968, Nous confessons que le Royaume de Dieu commencé ici-bas. L'Eglise du Christ n'est pas de ce monde, dont la figure passe, et que sa croissance propre ne peut se confondre avec le progrès de la civilisation, de la science ou de la technique humaines, mais qu'elle consiste à connaître toujours plus profondément les insondables richesses du Christ, à espérer toujours plus fortement les biens éternels, à répondre toujours plus ardemment à l'amour de Dieu, à dispenser toujours plus largement la grâce et la sainteté parmi les hommes.

La foi est à la racine de l'espérance. J'ai foi en Dieu, alors j'espère en un salut. Nous avons foi en une personne : mon épouse, Jésus ... Par contre l'espérance concerne un événement (le salut). L'espérance met la foi en mouvement, vers un but non encore atteint.

L'espérance est l'élément dynamique de l'existence chrétienne, elle est un élément proprement chrétien, que les païens ne possèdent pas (1 Thessaloniciens 4,13) puisqu'ils vivent dans le monde « sans espérance et sans Dieu » (Ephésiens 2, 12). Hans Urs von Balthasar.

L'espérance est tout ensemble personnelle et ecclésiale. C'est pourquoi on doit aussi parler de l'espérance de l'Eglise de la terre. Celle-ci est soulevée du désir impatient de la pleine manifestation de la victoire de Jésus Christ sur la mort entraînant dans sa Résurrection l'humanité rachetée tout entière. Qu'on pense à la grandiose vision finale de l'Apocalypse (chapitre 21) : le ciel nouveau, la terre nouvelle, la Jérusalem nouvelle, et la fin des tribulations :

Ap 21,4 Il essuiera toute larme de leurs yeux, La mort ne sera plus. Il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni souffrance, car le monde ancien a disparu.

L’Église enseigne, en outre, que l’espérance eschatologique ne diminue pas l’importance des tâches terrestres, mais en soutient bien plutôt l’accomplissement par de nouveaux motifs. À l’opposé, lorsque manquent le support divin et l’espérance de la vie éternelle, la dignité de l’homme subit une très grave blessure, comme on le voit souvent aujourd’hui, et l’énigme de la vie et de la mort, de la faute et de la souffrance reste sans solution : ainsi, trop souvent, les hommes s’abîment dans le désespoir. Gaudium et spes, 21).

Sauvés dans l'espérance (spe salvi) - Benoît XVI

22. Sans aucun doute, le progrès offre de nouvelles possibilités pour le bien, mais il ouvre aussi des possibilités abyssales de mal – possibilités qui n'existaient pas auparavant. Nous sommes tous devenus témoins de ce que le progrès, lorsqu'il est entre de mauvaises mains, peut devenir, et est devenu de fait, un progrès terrible dans le mal. Si au progrès technique ne correspond pas un progrès dans la formation éthique de l'homme, dans la croissance de l'homme intérieur (cf. Ep 3, 16; 2 Co 4, 16), alors ce n'est pas un progrès, mais une menace pour l'homme et pour le monde.

25. La science peut contribuer beaucoup à l'humanisation du monde et de l'humanité. Cependant, elle peut aussi détruire l'homme et le monde si elle n'est pas orientée par des forces qui se trouvent hors d'elle.

26. Ce n'est pas la science qui rachète l'homme. L'homme est racheté par l'amour. Cela vaut déjà dans le domaine purement humain. Lorsque quelqu'un, dans sa vie, fait l'expérience d'un grand amour, il s'agit d'un moment de « rédemption » qui donne un sens nouveau à sa vie. Mais, très rapidement, il se rendra compte que l'amour qui lui a été donné ne résout pas, par lui seul, le problème de sa vie. Il s'agit d'un amour qui demeure fragile. Il peut être détruit par la mort. L'être humain a besoin de l'amour inconditionnel. Il a besoin de la certitude qui lui fait dire: « Ni la mort ni la vie, ni les esprits ni les puissances, ni le présent ni l'avenir, ni les astres, ni les cieux, ni les abîmes, ni aucune autre créature, rien ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu qui est en Jésus Christ » (Rm 8, 38-39).

27. En ce sens, il est vrai que celui qui ne connaît pas Dieu, tout en pouvant avoir de multiples espérances, est dans le fond sans espérance, sans la grande espérance qui soutient toute l'existence (cf. Ep 2, 12). La vraie, la grande espérance de l'homme, qui résiste malgré toutes les désillusions, ce ne peut être que Dieu – le Dieu qui nous a aimés et qui nous aime toujours « jusqu'au bout », « jusqu'à ce que tout soit accompli » (cf. Jn 13, 1 et 19, 30)... « La vie éternelle, c'est de te connaître, toi le seul Dieu, le vrai Dieu, et de connaître celui que tu as envoyé, Jésus Christ » (Jn 17, 3). La vie dans le sens véritable, on ne l'a pas en soi, de soi tout seul et pas même seulement par soi: elle est une relation. Et la vie dans sa totalité est relation avec Celui qui est la source de la vie. Si nous sommes en relation avec Celui qui ne meurt pas, qui est Lui-même la Vie et l'Amour, alors nous sommes dans la vie. Alors nous « vivons ».

30. Tout au long des jours, l'homme a de nombreuses espérances – les plus petites ou les plus grandes –, variées selon les diverses périodes de sa vie. Parfois il peut sembler qu'une de ces espérances le satisfasse totalement et qu'il n'ait pas besoin d'autres espérances. Dans sa jeunesse, ce peut être l'espérance d'un grand amour qui le comble; l'espérance d'une certaine position dans sa profession, de tel ou tel succès déterminant pour le reste de la vie. Cependant, quand ces espérances se réalisent, il apparaît clairement qu'en réalité ce n'était pas la totalité. Il paraît évident que l'homme a besoin d'une espérance qui va au-delà. Il paraît évident que seul peut lui suffire quelque chose d'infini, quelque chose qui sera toujours plus que tout ce qu'il peut atteindre.

31. Encore une chose: nous avons besoin des espérances – des plus petites ou des plus grandes – qui, au jour le jour, nous maintiennent en chemin. Mais sans la grande espérance, qui doit dépasser tout le reste, elles ne suffisent pas. Cette grande espérance ne peut être que Dieu seul, qui embrasse l'univers et qui peut nous proposer et nous donner ce que, seuls, nous ne pouvons atteindre.

Entretenir l'espérance - Vivre la résurrection au quotidien

    Nous vivons tous des morts symboliques au quotidien :

  • Échec dans un entreprise
  • Difficultés dans la vie de foi
  • Séparation dans un couple
  • Maladie
  • Chômage
  • Addictions : drogue, alcool, pornographie…
  • Perte d’un être cher
    Ces événements nous invitent à trois attitudes

  • Lâcher-prise
  • L’abandon
  • Vivre dès à présent une forme de résurrection. Nous avons parlé du pardon. Voilà une forme bien concrète de mort/résurrection que nous sommes invités à vivre au quotidien. Voir l'étude sur le pardon.

L’espérance « fait avancer le monde », avait assuré le pape François au cours d’une audience générale en 2017. En s’appuyant sur le Seigneur, chacun est appelé à « ouvrir des brèches » et « construire des ponts ». Le pape François nous propose 10 clés pour nourrir l’espérance.

  • 1 - Ne capitule pas devant la nuit : souviens-toi que le premier ennemi à soumettre n’est pas en dehors de toi : il est à l’intérieur. C’est pourquoi, ne laisse pas de place aux pensées amères, obscures.

  • 2 - Ne pense jamais que la lutte qui conduit là-haut soit totalement inutile. À la fin de l’existence, ce n’est pas le naufrage qui nous attend : en nous palpite une semence d’absolu. Dieu ne déçoit pas : s’il a mis une espérance dans nos cœurs, il ne veut pas l’étouffer par des frustrations continuelles. Tout naît pour fleurir dans un printemps éternel.

  • 3 - Partout où tu es, construis ! Si tu es par terre, lève-toi ! Ne reste jamais tombé par terre, lève-toi, laisse-toi aider pour te mettre debout. Si tu es assis, mets-toi en chemin ! Si l’ennui te paralyse, chasse-le par des œuvres bonnes ! Si tu te sens vide ou démoralisé, demande que l’Esprit-Saint puisse à nouveau remplir ton néant.

  • 4 - Fais la paix au milieu des hommes, et n’écoute pas la voix de celui qui répand la haine et les divisions. N’écoute pas ces voix ! Les êtres humains, tout en étant différents les uns des autres, ont été créés pour vivre ensemble. Dans les conflits, patiente : un jour tu découvriras que chacun est dépositaire d’un fragment de vérité. Aime les personnes. Aime-les une par une. Respecte le chemin de chacun.

  • 5 - Et surtout, rêve ! N’aie pas peur de rêver. Rêve ! Rêve un monde qui ne se voit pas encore mais qui arrivera certainement. L’espérance nous pousse à croire à l’existence d’une création qui s’étend jusqu’à son accomplissement définitif, quand Dieu sera tout en tous.

  • 6 - Sois responsable de ce monde et de la vie de tous les hommes. Pense que chaque injustice contre un pauvre est une blessure ouverte et diminue ta propre dignité. La vie ne s’arrête pas avec ton existence et, dans ce monde, viendront d’autres générations qui succèderont à la nôtre et beaucoup d’autres encore. Et chaque jour, demande à Dieu le don du courage.

  • 7 - Aie toujours le courage de la vérité, mais souviens-toi : tu n’es supérieur à personne.

  • 8 - Et cultive des idéaux. Vis pour quelque chose qui dépasse l’homme.

  • 9 - Si tu te trompes, relève-toi : rien n’est plus humain que de commettre des erreurs. Et ces mêmes erreurs ne doivent pas devenir pour toi une prison. Ne sois pas enfermé dans tes erreurs.

  • 10 - Si l’amertume te frappe, crois fermement en toutes les personnes qui agissent encore pour le bien : dans leur humilité, il y a la semence d’un monde nouveau. Fréquente les personnes qui ont gardé leur cœur comme celui d’un enfant. Apprends de la merveille, cultive l’étonnement.Vis, aime, rêve et crois. Et, avec la grâce de Dieu, ne désespère jamais.

Conclusion

La porte obscure du temps, de l’avenir, a été ouverte toute grande. Celui qui a l’espérance vit différemment ; une vie nouvelle lui a déjà été donnée (Benoît XVI Spe Salvi n° 2).

    En conclusion, comment vivre de l'espérance ?
  • Vivre dans la joie à travers une attitude positive (ne pas dire c'était mieux avant). Il n'est pas facile de rester positif et plein d’espérance quand on regarde l’actualité. Que ce soit à notre porte ou à l’autre bout du monde, de nombreux événements peuvent nous faire peur de l’avenir. Mais quand les nuages s'amoncellent et que les épreuves s'accumulent, la Bible invite chacun de nous à placer notre espérance en Dieu, le seul qui puisse nous aider à traverser les souffrances et à voir la beauté en toute chose.

    Le saint est capable de vivre joyeux et avec le sens de l’humour. Sans perdre le réalisme, il éclaire les autres avec un esprit positif et rempli d’espérance. François, Joie et allégresse, 122.

    Il y a des moments difficiles, des temps de croix, mais rien ne peut détruire la joie surnaturelle qui « s’adapte et se transforme, et elle demeure toujours au moins comme un rayon de lumière qui naît de la certitude personnelle d’être infiniment aimé, au-delà de tout ». C’est une assurance intérieure, une sérénité remplie d’espérance qui donne une satisfaction spirituelle incompréhensible selon les critères du monde. François, Joie et allégresse, 125.

  • La prière : demander à l'Esprit de nous donner ses dons : intelligence, connaissance, force, conseil, crainte, piété, sagesse.

  • Les sacrements : signes du salut déjà commencé.

    Gaudium et spes 38.2. Le Seigneur a laissé aux siens les arrhes de cette espérance et un aliment pour la route : le sacrement de la foi, dans lequel des éléments de la nature, cultivés par l’homme, sont changés en son Corps et en son Sang glorieux. C’est le repas de la communion fraternelle, une anticipation du banquet céleste.

Nous sommes tous prêtres, prophètes et rois de par notre baptême. Nous sommes appelés à célébrer, annoncer, servir, donc à entretenir l'espérance dans le monde. Nous sommes le sel de la terre (Mt 5,13). Nous sommes des guetteurs envoyés en mission.

Is 21,6 Car ainsi m’a parlé le Seigneur : Va, place le guetteur qu’il annonce ce qu’il verra.

Nous sommes envoyés comme guetteurs dans le monde, pour reconnaitre et semer des germes d'espérance.