La mort
La mort est le dernier événement de notre vie. Certains la considèrent comme la fin de tout ; d'autres la voient comme un passage vers l'au-delà. Certains l'appellent parce qu'accablés par la souffrance et la solitude ; d'autres la craignent par peur de l'inconnu ; d'autres encore souhaitent la reculer indéfiniment. Les plus tristes sont ceux qui restent. Accablés par le chagrin, nous pleuront la perte d'un être cher. L'amour quel qu'en soit le degré ne supporte pas la séparation. https://www.la-croix.com/Definitions/Lexique/Mort/La-mort-dans-la-Bible
La mort se présente comme un événement biologique auquel chaque membre de l’espèce humaine ne saurait échapper, du fait de son appartenance au règne des vivants. C’est un événement naturel au double sens du mot : il s’inscrit dans la nature de l’homme, comme dans la Nature à laquelle il appartient. Comme la naissance, la mort est un événement unique dans la vie d’un individu. Les biologistes ont coutume d’en faire une exigence de la vie en rappelant que la mort fait partie du système sélectionné dans le monde animal et dans son évolution. La mort est un événement naturel au sens où elle est conforme aux lois de la nature, affirme-t-on souvent. Elle est la condition du renouvellement de la vie et un lien apparaît évident entre la sexualité et la mort. L’espèce se perpétue parce que la sexualité permet la reproduction avant le vieillissement, prélude de la mort. On naît, donc on meurt, on meurt donc on naît. Jacques Ricot, Philosophie et fin de vie, p. 85.
Epicure. Prends l’habitude de penser que la mort n’est rien pour nous. Car tout bien et tout mal résident dans la sensation : or la mort est privation de toute sensibilité. Par conséquent, la connaissance de cette vérité que la mort n’est rien pour nous, celui de tous les maux qui nous donne le plus d’horreur, la mort, n’est rien pour nous, puisque, tant que nous existons nous-mêmes, la mort n’est pas, et que, quand la mort existe, nous ne sommes plus. Donc la mort n’existe ni pour les vivants ni pour les morts, puisqu’elle n’a rien à faire avec les premiers, et que les seconds ne sont plus. Mais la multitude tantôt fuit la mort comme le pire des maux, tantôt l’appelle comme le terme des maux de la vie. Le sage, au contraire, ne fait pas fi de la vie et il n’a pas peur non plus de ne plus vivre : car la vie ne lui est pas à charge, et il n’estime pas non plus qu’il y ait le moindre mal à ne plus vivre. De même que ce n’est pas toujours la nourriture la plus abondante que nous préférons, mais parfois la plus agréable, pareillement ce n’est pas toujours la plus longue durée qu’on veut recueillir, mais la plus agréable. Quant à ceux qui conseillent aux jeunes gens de bien vivre et aux vieillards de bien finir, leur conseil est dépourvu de sens, non seulement parce que la vie a du bon même pour le vieillard, mais parce que le soin de bien vivre et celui de bien mourir ne font qu’un. On fait pis encore quand on dit qu’il est bien de ne pas naître, ou, « une fois né, de franchir au plus vite les portes de l’Hadès ». Car si l’homme qui tient ce langage est convaincu, comment ne sort-il pas de la vie ? C’est là en effet une chose qui est toujours à sa portée, s’il veut sa mort d’une volonté ferme. Que si cet homme plaisante, il montre de la légèreté en un sujet qui n’en comporte pas. Rappelle-toi que l’avenir n’est ni à nous ni pourtant tout à fait hors de nos prises, de telle sorte que nous ne devons ni compter sur lui comme s’il devait sûrement arriver, ni nous interdire toute espérance, comme s’il était sûr qu’il dût ne pas être. Épicure (-342 - -270), Lettre à Ménécée. Les Échos du Maquis (versions ePub et PDF), janvier 2011.
C'est un phénomène démographique, médical et, dans ce cas, la mort est la chose la plus banale du monde. Elle est aussi la tragédie personnelle, unique en son genre, incomparable, pour celui qui a perdu son enfant, sa femme, ses parents, etc. Il y a donc un contraste entre l'unicité d'un malheur qui fait perdre le goût de vivre, et l'insignifiance de l'accident... Pour le médecin, la mort devient très rapidement quelque chose de banal. Un mort est vite remplacé. La vie bouche les trous au fur et à mesure. Tout le monde est remplaçable. Quelqu'un disparaît, un autre occupe la place. C'est la mort à la troisième personne, la mort de n'importe qui, un passant frappé d'embolie... C'est la mort sans mystère. Au total, non seulement il n'y a pas de diminution dans la quantité d'êtres humains, mais au contraire l'humanité prospère et foisonne. Il y a de plus en plus d'hommes. Les tragédies individuelles ne nuisent aucunement au genre humain. Il y aura je ne sais combien de milliards d'êtres humains en l'an 2000. Le genre humain se porte bien, malgré Auschwitz. En ce qui concerne la mort à la première personne, c'est-à-dire la mienne, eh bien, je ne peux plus en parler puisque c'est ma mort. J'emporte mon secret, si secret il y a, dans la tombe. Il reste la mort à la deuxième personne, la mort du proche, qui est l'expérience philosophique privilégiée parce qu'elle est tangente aux deux autres. Elle ressemble le plus à la mienne sans être la mienne, et sans être non plus la mort impersonnelle et anonyme du phénomène social. C'est un autre que moi, alors je survivrai. Je peux le voir mourir. Je le vois mort. C'est un autre que moi et, en même temps, c'est ce qui me touche de plus près. Au-delà, ce serait ma mort, à moi. La philosophie de la mort est faite pour nous par le proche qui est à nos côtés. C'est une expérience que personne ne cherche, mais enfin tout le monde l'a faite un jour ou l'autre, malgré soi. Cette mort a une autre importance, parce que, quand disparaissent vos parents, disparaît la dernière barrière biologique. Après, c'est votre tour. Ce qui n'est pas une idée très plaisante... Vladimir Yankélévitch, Penser la mort.