L’humilité

L’humilité est la vertu qui s’oppose à l’orgueil, à la suffisance ou à l’arrogance. La personne humble est celle qui reconnaît ses limites et ses fragilités.

Le mot provient du latin classique "humilitas" « faible élévation, petite taille » et au figuré, « état modeste, bassesse ». "Humilitas" dérive du latin humus – « terre ». Il désigne le fait de garder les pieds sur terre, plutôt que de rechercher la gloire et les honneurs, en acceptant cette part de faiblesse qui est le lot commun de notre humanité.

Le mot humiliation partage la même racine latine : humilier quelqu’un c’est littéralement le rendre plus humble, amis c’est aussi le rabaisser, lui faire perdre sa dignité. Une différence notoire : l’humilité est une vertu personnelle alors que l’humiliation est causée par une autre personne.

L’humilité avait peu de place dans l’Antiquité gréco-romaine, dont l’élite privilégiait la recherche de l’honneur (philotimia) – « le plus grand des biens publics » selon Aristote (Éthique à Nicomaque (IV,3). Il faudra attendre l’avènement du christianisme pour voir l’humilité érigée en vertu positive.

La Bible accorde une place importante, aux petits, aux humbles. Les Anawim sont les pauvres de Yahvé.

Ps 9:12 Car il venge le sang et se souvient des malheureux ('Anav), Il n’oublie pas leurs cris.

Ps 9:18 Car le malheureux n’est point oublié à jamais, L’espérance des misérables ('Anav) ne périt pas à toujours.

Ps 10:12 Lève-toi, Yahvé ! ô Dieu, lève ta main ! N’oublie pas les malheureux ('Anav) !

Ps 10:17 Tu entends les voeux de ceux qui souffrent ('Anav), ô Yahvé ! Tu affermis leur cœur ; tu prêtes l’oreille.

Ps 22:26 Les malheureux ('Anav) mangeront et se rassasieront, Ceux qui cherchent Yahvé le célébreront. Que votre cœur vive à toujours !

Ps 25:9 Il conduit les humbles ('Anav) dans la justice, Il enseigne aux humbles ('Anav) sa voie.

Pr 15:33 La crainte de Yahvé enseigne la sagesse, Et l’humilité ('Anavah) précède la gloire.

Pr 16:19 Mieux vaut être humble avec les humbles ('Anav) que de partager le butin avec les orgueilleux.

Phi 2:3 Ne faites rien par esprit de parti ou par vaine gloire, mais que l’humilité (tapeinophrosune) vous fasse regarder les autres comme étant au-dessus de vous-mêmes.

1 P 5:5 De même, vous qui êtes jeunes, soyez soumis aux anciens. Et tous, dans vos rapports mutuels, revêtez-vous d’humilité (tapeinophrosune) ; car Dieu résiste aux orgueilleux, Mais il fait grâce aux humbles.

Le psaume 131 résume l’attitude de l’humble. Ps 131,1-2 Seigneur, je n’ai pas le cœur fier, ni le regard hautain. Je n’ai pas pris un chemin de grandeurs ni de prodiges qui me dépassent. Non, je me tiens en paix et en silence ; comme un petit enfant contre sa mère, comme un petit enfant, telle est mon âme en moi.

Comment définir l’humilité ?

1) Le sentiment de notre petitesse par rapport au monde et dans la société qui nous entoure, engageant à une position d’écoute et d’accueil d’autrui.

2) Une attitude par laquelle l’acceptation de nos faiblesses nous offre la possibilité d’une meilleure connaissance de nous-mêmes et d’une progression par un dépassement de soi.

3) Une disposition d’esprit lucide qui par la tempérance recherche l’équilibre auquel s’oppose la rivalité.

François Jégou, Thèse de doctorat en médecine, Poitiers, 2004.

Le Christ se fait humble.

Ph 2,6 Lui [Jésus Christ] qui est de condition divine n’a pas considéré comme une proie à saisir d’être l’égal de Dieu. 7 Mais il s’est dépouillé, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes, et, reconnu à son aspect comme un homme, 8 il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, à la mort sur une croix. 9 C’est pourquoi Dieu l’a souverainement élevé et lui a conféré le Nom qui est au-dessus de tout nom, 10 afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse, dans les cieux, sur la terre et sous la terre, 11 et que toute langue confesse que le Seigneur, c’est Jésus Christ, à la gloire de Dieu le Père.

Selon une première ligne, il convient de comprendre les déve- loppements pauliniens relatifs à la kénose comme se référant au Christ incarné. Parler de kénose du Christ ne revient pas, dans cette hypothèse, à désigner l’acte par lequel le Fils éternel de Dieu a pris chair, mais la manière dont le Christ incarné a mené son existence humaine. Autrement dit, le dépouillement a trait, non au fait que le Christ assume la condition humaine, mais à la manière dont il assume cette dernière. Il l’assume en partageant la condition des plus petits et des plus misérables, allant, par obéissance à la volonté du Père, jusqu’à endurer le supplice infamant de la croix.

Il est une seconde manière d’envisager la réalité à laquelle les développements de Paul relatifs à la kénose renvoient, qui consiste à référer ces derniers à l’acte par lequel le Fils éternel de Dieu, le Logos préexistant, a pris chair dans l’histoire des hommes, mouve- ment d’abaissement qui l’a mené jusqu’à la croix.
M. Vial, Dieu jusque dans le néant. Voir le lien dans la bibliothèque.

Yves Guillemette, bibliste nous précise la richesse de l’humilité.

« Nous apprenons l’humilité à partir des épreuves comme la maladie, l’échec, l’expérience du péché comme révélatrice de nos fragilités humaines. En prenant conscience de notre pauvreté intérieure et de notre fragilité, nous pouvons nous tourner vers les autres et vers Dieu avec confiance. L’humilité apparaît alors comme une attitude d’abandon confiant à Dieu. L’humble est quelqu’un qui cherche Dieu, non seulement pour vivre en communion avec lui, mais aussi pour atteindre l’unité et la cohérence de sa personne. L’humble sait qu’il ne peut compter seulement sur ses propres forces pour se réaliser et pour combattre le péché et le mal. Il a besoin d’assises, d’un roc solide sur lequel édifier sa vie. Et ce roc ne peut être que le Seigneur.

L’origine latine de notre mot “humilité” peut nous aider à nous débarrasser d’une fausse idée de l’humilité. En effet, le mot “humilité” vient du latin humus qui se traduit par “terre, sol”. On comprend alors que l’humilité chrétienne est cette qualité d’ouverture qui permet au croyant d’accueillir la Parole de Dieu avec joie, comme une semence qui donne à sa vie une dimension nouvelle. Être humble, c’est reconnaître que nous ne détenons pas tous les éléments qui répondent à notre recherche du sens de la vie ; c’est accepter que Dieu soit celui qui apporte cette réponse notamment à travers son Fils Jésus. L’humilité assure alors la fécondité de notre vie puisque la Parole de Dieu peut y être semée pour la transformer et lui faire porter des fruits de foi, d’espérance et d’amour, de bonté, de paix et de miséricorde, en somme les ingrédients pour combattre le péché et le mal. »

L’humilité est en ce sens le terreau dans lequel Dieu pourra nous faire grandir.