L'incarnation

Dieu visite l’homme

Tout au long de l’histoire biblique, on voit Dieu s’intéresser à l’homme et lui rendre visite. Dès les premiers balbutiements de l’humanité, Dieu se promène dans le jardin d’Eden à la recherche d’Adam et d’Eve cachés derrière un buisson suite à leur désobéissance (Gn 3). Quelque temps plus tard, à Babel, il descend pour fustiger l’homme qui veut conquérir le ciel (Gn 11). Lors de la libération d’Égypte, il vient à la rencontre de Moïse dans un buisson ardent (Ex 3). Il rend visite à son peuple par l’intermédiaire des prophètes, des rois et de tous les envoyés en mission qui perlent et agissent en son nom. Une femme, Judith, en témoigne :

Jd 8,33 : le seigneur visitera Israël par mon entremise

Le sommet de cet intérêt de Dieu pour l’humanité, c’est Jésus-Christ. Jésus naît à Bethléem au temps du roi Hérode, vraisemblablement vers l’an –4 au début du printemps (Mt 2,1). Les évangélistes Matthieu et Luc retracent cet avènement en des termes sobres et théologiques. Bien plus qu’une biographie historique sur Jésus, ils retracent la naissance en fonction des Écritures dans la lignée de l’histoire d’Israël. Jésus s’inscrit dans la continuité de cette histoire tout en marquant une rupture dans l’image de Dieu qu’il donne à voir et à vivre.

Les faits marquants qui entourent la naissance de Jésus reprennent les épisodes fondateurs de l’histoire d’Israël comme pour en signifier l’accomplissement. La fuite en Égypte de Marie et Joseph rappelle la descente en Égypte du patriarche Joseph. Le massacre des nouveau-nés par Hérode fait écho à celui de Pharaon . L’histoire se répète pour en donner le sens, comme une ultime lecture avant de commencer un nouveau livre.

Pourquoi Dieu a-t-il attendu ce moment de l’histoire pour visiter l’humanité ? L’attente d’un messie glorieux a vu le jour chez le peuple juif dès lors que la période de prospérité correspondant à David-Salomon s’est achevée. Le schisme entre les royaumes du nord et du sud, l’exil à Babylone et les multiples occupations ont suscité l’attente d’un libérateur.

Dieu est venu le plus tôt possible, mais tout comme un enfant doit grandir pour recevoir et comprendre certaines choses, de même l’humanité devait être prête à écouter et à suivre cet homme-Dieu. Dieu a laissé à l’humanité le temps de mûrir et de progresser pour être capable d’accueillir une parole pleine d’espérance et surtout de confesser les mystères de l’incarnation et de la résurrection.

Par ailleurs, les sociétés devaient être suffisamment développées sur le plan culturel et social, sur l’écriture et les moyens de communication, pour que la nouvelle de Jésus se répande. Il est facile de comprendre que l’incarnation au moment de l’homme de Cro-Magnon aurait été un échec total.

Dieu visite l’homme de sa propre initiative sans être poussé par un autre motif que le désir de se révéler à l’homme. Nulle obligation historique, morale ou religieuse ne lui impose cette décision. Il épouse librement l’histoire avec ce risque de ne pas être reconnu comme le souligne Jean :

Le Verbe était la lumière véritable, qui éclaire tout homme ; il venait dans le monde. Il était dans le monde, et le monde fut par lui, et le monde ne l'a pas reconnu. Il est venu chez lui, et les siens ne l'ont pas accueilli (Jn 1,9-11).

Ce qui n’aurait pu être qu’un épiphénomène dans une région quelconque du monde devient l’acte fondateur d’une nouvelle religion et plus encore d’une bonne nouvelle. Jésus bouleverse l’histoire humaine en posant la première pierre d’un nouvel édifice, à charge pour l’homme de poursuivre son œuvre.

Dans la bible

Jn 1,14 Et le Verbe s’est fait chair et il a habité (planté sa tente) parmi nous.»

Phi 2,6-8 : Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l'égalait à Dieu. Mais il s'anéantit lui-même, prenant condition d'esclave, et devenant semblable aux hommes. S'étant comporté comme un homme, il s'humilia plus encore, obéissant jusqu'à la mort, et à la mort sur une croix.

He 10, 5-7, citant Ps 40, 7-9 LXX. C’est pourquoi, en entrant dans le monde, le Christ dit : Tu n’as voulu ni sacrifice ni oblation ; mais tu m’as façonné un corps. Tu n’as agréé ni holocauste ni sacrifices pour les péchés. Alors j’ai dit : Voici, je viens (...) pour faire ta volonté.

Matthieu Luc
1,18 Voici quelle fut l'origine de Jésus Christ. Marie, sa mère, était accordée en mariage à Joseph ; or, avant qu'ils aient habité ensemble, elle se trouva enceinte par le fait de l'Esprit Saint. 19 Joseph, son époux, qui était un homme juste et ne voulait pas la diffamer publiquement, résolut de la répudier secrètement. 20 Il avait formé ce projet, et voici que l'ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse : ce qui a été engendré en elle vient de l'Esprit Saint, 21 et elle enfantera un fils auquel tu donneras le nom de Jésus, car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. » 22 Tout cela arriva pour que s'accomplisse ce que le Seigneur avait dit par le prophète : 23 Voici que la vierge concevra et enfantera un fils auquel on donnera le nom d'Emmanuel, ce qui se traduit : « Dieu avec nous ». 24 A son réveil, Joseph fit ce que l'ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse, 25 mais il ne la connut pas jusqu'à ce qu'elle eût enfanté un fils, auquel il donna le nom de Jésus. 1,26 Le sixième mois, l'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée du nom de Nazareth, 27 à une jeune fille accordée en mariage (vierge fiancée) à un homme nommé Joseph, de la famille de David ; cette jeune fille s'appelait Marie. 28 L'ange entra auprès d'elle et lui dit : « Sois joyeuse, toi qui as la faveur de Dieu, le Seigneur est avec toi. » 29 A ces mots, elle fut très troublée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation. 30 L'ange lui dit : « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. 31 Voici que tu vas être enceinte, tu enfanteras un fils et tu lui donneras le nom de Jésus. 32 Il sera grand et sera appelé Fils du Très-Haut. Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; 33 il régnera pour toujours sur la famille de Jacob, et son règne n'aura pas de fin. » 34 Marie dit à l'ange : « Comment cela se fera-t-il puisque je n'ai pas de relations conjugales ? » 35 L'ange lui répondit : « L'Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre ; c'est pourquoi celui qui va naître sera saint et sera appelé Fils de Dieu. 36 Et voici que Elisabeth, ta parente, est elle aussi enceinte d'un fils dans sa vieillesse et elle en est à son sixième mois, elle qu'on appelait la stérile, 37 car rien n'est impossible à Dieu. » 38 Marie dit alors : « Je suis la servante du Seigneur. Que tout se passe pour moi comme tu me l'as dit ! » Et l'ange la quitta.

Matthieu Luc
Récit centré sur le personnage de Joseph
L'ange n'est pas nommé
Lignée davidique par Joseph
Pas de dialogue entre Joseph et l'ange
L'enfant est nommé : Jésus (par Joseph)
Joseph obéit sans poser de question
Enceinte par l'Esprit
Salut pour le péché
Pas de notion de règne
Récit centré sur le personnage de Marie
L'ange est nommé
Lignée davidique par Joseph
Dialogue entre l'ange et Marie
L'enfant est nommé : Jésus (par Marie), saint, Fils du Très Haut, Fils de Dieu
Marie obéit mais pose une question
Enceinte par l'Esprit
Pas de notion de péché
Notion de règne

Dans l'histoire

Des objections au mystère de l'incarnation voient le jour dès les premiers siècles.

Dans les fables de ceux qu’on appelle les Grecs, on dit que Persée naquit de Danaé qui était vierge, après que celui qui s’appelle chez eux Zeus s’était répandu sur elle sous forme d’or. Vous devriez rougir de raconter les mêmes choses qu’eux, et il vaudrait mieux dire que ce Jésus fut un homme d’entre les hommes et démontrer par les Ecritures qu’il est le Christ. (Justin, Dialogue avec Tryphon, LXVII, 2).

Irénée s'attaque aux Ebionites :

Vains aussi les ébionites, refusant d'accueillir dans leurs âmes, par la foi, l'union de Dieu et de l'homme, ils demeurent dans le vieux levain de leur naissance. Ils ne veulent pas comprendre que l'Esprit Saint est survenu en Marie et que la puissance du Très-Haut l'a couverte de son ombre [...] Ils repoussent donc le mélange du Vin céleste et ne veulent être que l'eau de ce monde, n'acceptant pas que Dieu se mélange à eux, mais demeurant en cet Adam qui fut vaincu et chassé du paradis. »[Irénée, Contre les hérésies V, 1, 3, trad. A. Rousseau, SC 153, p.25-27]

Les docètes (d’un mot grec qui signifie sembler ou paraître) pensent que Jésus n’a pris que l’apparence d’un corps mais non pas la réalité de notre propre chair. Le païen Celse (au IIe siècle) prétend que Jésus a inventé sa naissance d’une vierge, et que Marie était adultère (voir le cours sur la divinité de Jésus).

Athanase (IVe) : La rectitude de la foi, c'est que nous croyions et confessions que Notre-Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, est Dieu et homme.
Il est Dieu, éternellement engendré de la substance du Père ; Il est homme, né dans le temps de la substance de sa mère.
Parfaitement Dieu, parfaitement homme avec une âme raisonnable et une chair humaine.
Égal au Père selon la divinité ; moins grand que le Père selon l'humanité.
Bien qu'à la fois Dieu et homme, le Christ n'est pas deux, mais un seul.
Un seul non parce que la divinité aurait été convertie en chair, mais parce que l'humanité a été assumée par Dieu.
Un seul absolument, non par confusion de substance, mais par unité de personne.
Car de même que l'âme raisonnable et la chair sont un seul homme, de même Dieu et l'homme sont un seul Christ.

Gaudium et Spes 22 1. Adam, en effet, le premier homme, était la figure de Celui qui devait venir, le Christ Seigneur. Nouvel Adam, le Christ, dans la révélation même du mystère du Père et de son amour, manifeste pleinement l'homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation. [...]

2. «Image du Dieu invisible» (Col. 1, 15), Il est l'homme parfait qui a restauré dans la descendance d'Adam la ressemblance divine, altérée dès le premier péché. Parce qu'en Lui la nature humaine a été assumée, non absorbée5, par le fait même, cette nature a été élevée en nous aussi à une dignité sans égale. Car, par son Incarnation, le Fils de Dieu s'est en quelque sorte uni Lui-même à tout homme. Il a travaillé avec des mains d'homme, Il a pensé avec une intelligence d'homme, Il a agi avec une volonté d'homme, Il a aimé avec un coeur d'homme. Né de la Vierge Marie, Il est vraiment devenu l'un de nous, en tout semblable à nous, excepté le péché.

3. Agneau innocent, par son sang librement répandu, Il nous a mérité la vie ; et, en Lui, Dieu nous a réconciliés avec Lui-même et entre nous, nous arrachant à l'esclavage du diable et du péché.

Le mystère

Qu’est-ce qu’un mystère ? Il est bien clair que nous n’utilisons pas ce mot dans la signification que lui donne le langage courant, mais au sens où nous parlons des « mystères » du Rosaire. Un mys- tère au sens biblique et religieux n’est pas quelque chose d’inconnu, que l’on ne percevrait pas encore mais qu’il serait possible d’éclairer un jour. Ce n’est pas non plus un secret à ne pas divulguer – un de ces mystères dont raffolent les enfants. Ce n’est pas le Mystère auquel ne seraient admis que les initiés. Dans les lettres de Paul, le plus ancien document du Nouveau Testament, le mystère a un sens complètement nouveau. C’est le projet de Salut de Dieu ; la décision que Lui seul connaît, mais dont il nous a fait part en Jésus le Christ. Peter HENRICI, L’Incarnation, révélation du Mystère divin, Communio, n° XXVIII, 2 – mars-avril 2003.

Si la création est une première forme de révélation de Dieu, l’Incarnation en est le sommet. Création et Incarnation sont deux manifestations du même Verbe de Dieu. Cependant, l’Incarnation révèle de manière éminente le Dieu qui se donne à voir dès le commencement dans la création (Dieu dit).

Une des premières conséquences de l’Incarnation porte sur la perception par l’homme de la transcendance divine et de la proximité de Dieu. En se rendant présent en son Fils, le Dieu créateur se fait proche des hommes, et cela d’une manière totalement inimaginable par les hommes, au point de paraître scandaleuse aux contemporains de Jésus. C’est d’ailleurs là le motif de sa mise à mort : « il doit mourir, parce qu’il s’est fait Fils de Dieu » (Jn 19, 7).

L’Incarnation ouvre l’homme à la conscience d’une proximité d’un tout autre ordre. L’union en Jésus des deux natures humaines et divines nous rappelle d’abord que la création, œuvre de Dieu, est accueillante à Dieu. Elle est si accueillante à Dieu que son Fils prenant une nature humaine peut venir partager la vie des hommes. Baudoin ROGER, https://dioceseparis.fr/122-20-Premiere-causerie-L.html

Dans l'évangile de Matthieu, même si elle ne vient qu’au verset 18, l’Incarnation constitue le véritable point de départ de l’Évangile. La généalogie qui la précède forme une sorte d’entité séparée, dont l’indépendance a poussé de nombreux exégètes à y voir un morceau rédigé à part. Le début du verset trahit d’ailleurs son rôle introductif : « Voici l’ori- gine [ou la genèse, génesis] de Jésus-Christ. » Ce récit d’incarnation est tout sauf clair : « Marie sa mère était accordée en mariage à Joseph ; or, avant qu’ils aient habité ensemble, elle se trouva enceinte par le fait du Saint Esprit », traduit la TOB avec élégance. Le texte grec use d’une formule beaucoup plus ambiguë : heuréthê en gastrì ékhousa ek pneúmatos hagíou, « il se trouva qu’elle avait dans son ventre [quelque chose] venant du Saint Esprit ». Le moment de l’Incarnation n’est pas représenté : seule compte la théophanie, la découverte d’un « quelque chose venant du Saint Esprit ». Régis BURNET, Communio, n° XXVIII, 2 – mars-avril 2003.

Le Verbe qui transcende l'univers " (kondakion de Noël) se fait chair dans le sein vierge d'une petite galiléenne fécondé par l'Esprit. Pris d'un coup de folie amoureuse, le Créateur se fait créature. Sans cesser d'être " le Dieu trop haut pour notre entendement " (Idem). Dieu se dépouille de la gloire incréée de sa divinité. " Le Dieu d'avant les siècles " (idem et ikos) se proportionne à nous ; la Roue dentée divine vient embrayer chacune de nos roues dentées humaines pour les mettre en mouvement, pour leur donner la seule vie qui ne soit pas une vie morte. Evénement inouï : Dieu devient sa propre création. " L' insaisissable, l'inexplicable Seigneur " (Laudes des matines de Noël, 1er et 3è stichères) sort de l'absolu éternel de son être, de sa propre transcendance pour se relativiser en entrant dans le devenir du monde, dans la durée des hommes. L'Eternel entre dans le temps, " le Dieu d'avant les siècles " (kondakion de Noël) se fait mortel et il en mourra atrocement, crucifié comme un malfaiteur aux portes de la Ville !

Si cet enfant naît du saint Esprit et de la vierge Marie et non point de Joseph, ce n'est pas parce que l'union conjugale est un péché. C'est parce que, de toute éternité, cet Enfant a un Père dont il est l'unique-engendré, le " monogenes ". Lors donc que la Parole éternelle du Père devient chair, le Fils ne peut devenir, même charnellement, fils d'un autre père que de Celui dont il dira à Marie de Magdala après sa résurrection : " mon Père et votre Père, mon Dieu et votre Dieu " (Jn 20, 17). La génération charnelle de Jésus de Nazareth ici-bas, sa naissance à l'existence biologique promise à la mort, ne peut être qu'un prolongement, un contre-coup de la génération éternelle par laquelle Dieu son unique Père et dont il est l'unique Fils, lui communique la plénitude de sa Vie paternelle, c'est-à-dire l'Esprit saint. C'est pourquoi le Credo affirme que le Christ est né et du saint Esprit et de la vierge Marie. En proclamant cela, la sainte Eglise se réfère implicitement au troisième Evangile en lequel nous lisons que l'ange Gabriel annonce à Marie qu'elle sera mère malgré sa virginité en lui disant : " Le saint Esprit viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre " (Lc 1, 35).
Voir dans la bibliothèque : André Borély, Commentaire du credo.

Pourquoi ?

456 Avec le Credo de Nicée-Constantinople, nous répondons en confessant : " Pour nous les hommes et pour notre salut Il descendit du ciel ; par l’Esprit Saint, Il a pris chair de la Vierge Marie et s’est fait homme ".

457 Le Verbe s’est fait chair pour nous sauver en nous réconciliant avec Dieu : " C’est Dieu qui nous a aimés et qui a envoyé son Fils en victime de propitiation pour nos péchés " (1 Jn 4, 10). " Le Père a envoyé son Fils, le sauveur du monde " (1 Jn 4, 14). " Celui-là a paru pour ôter les péchés " (1 Jn 3, 5) :

Malade, notre nature demandait à être guérie ; déchue, à être relevée ; morte, à être ressuscitée. Nous avions perdu la possession du bien, il fallait nous la rendre. Enfermés dans les ténèbres, il fallait nous porter la lumière ; captifs, nous attendions un sauveur ; prisonniers, un secours ; esclaves, un libérateur. Ces raisons-là étaient-elles sans importance ? Ne méritaient-elles pas d’émouvoir Dieu au point de le faire descendre jusqu’à notre nature humaine pour la visiter, puisque l’humanité se trouvait dans un état si misérable et si malheureux ? (S. Grégoire de Nysse, or. catech. 15 : PG 45, 48B).

458 Le Verbe s’est fait chair pour que nous connaissions ainsi l’amour de Dieu : " En ceci s’est manifesté l’amour de Dieu pour nous : Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde afin que nous vivions par lui " (1 Jn 4, 9). " Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais ait la vie éternelle " (Jn 3, 16).

459 Le Verbe s’est fait chair pour être notre modèle de sainteté : " Prenez sur vous mon joug et apprenez de moi... " (Mt 11, 29). " Je suis la voie, la vérité et la vie ; nul ne vient au Père sans passer par moi " (Jn 14, 6). Et le Père, sur la montagne de la Transfiguration, ordonne : " Écoutez-le " (Mc 9, 7 ; cf. Dt 6, 4-5). Il est en effet le modèle des Béatitudes et la norme de la Loi nouvelle : " Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés " (Jn 15, 12). Cet amour implique l’offrande effective de soi-même à sa suite (cf. Mc 8, 34).

460 Le Verbe s’est fait chair pour nous rendre " participants de la nature divine " (2 P 1, 4) : " Car telle est la raison pour laquelle le Verbe s’est fait homme, et le Fils de Dieu, Fils de l’homme : c’est pour que l’homme, en entrant en communion avec le Verbe et en recevant ainsi la filiation divine, devienne fils de Dieu " (S. Irénée, hær. 3, 19, 1). " Car le Fils de Dieu s’est fait homme pour nous faire Dieu " (S. Athanase, inc. 54, 3 : PG 25, 192B). " Le Fils unique de Dieu, voulant que nous participions à sa divinité, assuma notre nature, afin que Lui, fait homme, fit les hommes Dieu " (S. Thomas d’A., opusc. 57 in festo Corp. Chr. 1).

Je voudrais proposer une troisième réflexion : le fait de l’Incarnation, de Dieu qui se fait homme comme nous, nous montre le réalisme inouï de l’amour divin. L’action de Dieu, en effet, ne se limite pas aux paroles, nous pourrions même dire qu’Il ne se contente pas de parler, mais il se plonge dans notre histoire et assume en lui la fatigue et le poids de la vie humaine. Le Fils de Dieu s’est fait vraiment homme, il est né de la Vierge Marie, en un temps et en un lieu déterminés, à Bethléem sous le règne de l’empereur Auguste, sous le gouverneur Quirinius (cf. Lc 2, 1-2) ; il a grandi dans une famille, il a eu des amis, il a formé un groupe de disciples, il a instruit les apôtres pour continuer sa mission, il a terminé le cours de sa vie terrestre sur la croix. Cette manière d’agir de Dieu est un puissant encouragement à nous interroger sur le réalisme de notre foi, qui ne doit pas être limitée au domaine du sentiment, des émotions, mais doit entrer dans le concret de notre existence, doit toucher par conséquent notre vie de tous les jours et l’orienter aussi de manière pratique. Dieu ne s’est pas arrêté aux paroles, mais nous a indiqué comment vivre, en partageant notre propre expérience, à l’exception du péché. Le catéchisme de saint Pie X, que certains d’entre nous ont étudié dans leur jeunesse, avec la concision qui le caractérise, à la question : « Pour vivre selon Dieu, que devons-nous faire ? », donne cette réponse : « Pour vivre selon Dieu, nous devons croire les vérités révélées par Lui et observer ses commandements avec l’aide de sa grâce, qui s’obtiennent à travers les sacrements et la prière ». La foi a un aspect fondamental, qui intéresse non seulement l’esprit et le cœur, mais toute notre vie. Benoît XVI, Audience générale du 9 janvier 2013, https://www.vatican.va/content/benedict-xvi/fr/audiences/2013/documents/hf_ben-xvi_aud_20130109.html

Voir aussi les développements sur Marie, mère de Dieu.