Jésus et les femmes
Jésus offre le visage d’un homme célibataire, aimant les femmes en tout bien et tout honneur. Il n’hésite pas à les aborder loin des pensées très négatives de Qoheleth :
Qo 7,26. Et je trouve plus amère que la mort, la femme, car elle est un piège, son cœur, un filet, et ses bras des chaînes. Qui plaît à Dieu lui échappe, mais le pécheur s'y fait prendre.
Jésus respecte les femmes autant que les hommes et son attitude à leur égard remet en cause les codes de bonne conduite du judaïsme. S’il ne donne pas d’enseignement particulier au sujet des femmes, Jésus souffle un vent de libération dans ses propos et son comportement.
Au sein d’une société androcentrique, la femme ne jouit que d’un statut très précaire. Elle vit dans la dépendance de son père puis de son mari. Hors de la sphère domestique, point de liberté. Même au sein du mariage, sa situation n’est pas assurée ; l’homme a le pouvoir de la répudier pour des motifs que la loi ne précise pas expressément, ce qui laisse la porte ouverte à tous les abus :
Deutéronome 24,1 « Soit un homme qui a pris une femme et consommé son mariage ; mais cette femme n'a pas trouvé grâce à ses yeux, et il a découvert une tare à lui imputer ; il a donc rédigé pour elle un acte de répudiation et le lui a remis, puis il l'a renvoyée de chez lui ».
La mauvaise cuisinière tout comme la femme adultère peuvent être renvoyées. On comprend que dans ces conditions, la proscription du divorce énoncée par Jésus, soit digne des revendications du mouvement de libération de la femme. Être libre, c’est aussi être respecté dans sa dignité ! Les propos de Jésus visent à assurer la protection et la sécurité de la femme ; une forme d’égalité avant l’heure :
Matthieu 5,31. « Il a été dit d'autre part : Quiconque répudiera sa femme, qu'il lui remette un acte de divorce. 32. Eh bien ! moi je vous dis : Tout homme qui répudie sa femme, hormis le cas de « prostitution», l'expose à l'adultère ; et quiconque épouse une répudiée, commet un adultère ».
La répudiation est donc désormais interdite au motif plein de bon sens que cet acte risque de jeter la répudiée dans les bras d’un autre partenaire avec pour conséquence une condamnation pour adultère. La lapidation est la sanction légale. Quelle attitude adopter face à un flagrant délit d’adultère ? Jésus prend les accusateurs à contre-pied dans une scène où des hommes essaient de lui tendre un piège :
Jn 8,3 « Or les scribes et les pharisiens amènent une femme surprise en adultère et, la plaçant au milieu, 4. ils disent à Jésus : « Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d'adultère. 5. Or, dans la Loi, Moïse nous a prescrit de lapider ces femmes-là. Toi donc, que dis-tu ? » 6. Ils disaient cela pour le mettre à l'épreuve, afin d'avoir matière à l'accuser. Mais Jésus, se baissant, se mit à écrire avec son doigt sur le sol. 7. Comme ils persistaient à l'interroger, il se redressa et leur dit : « Que celui d'entre vous qui est sans péché lui jette le premier une pierre ! » 8. Et se baissant de nouveau, il écrivait sur le sol. 9. Mais eux, entendant cela, s'en allèrent un à un, à commencer par les plus vieux ; et il fut laissé seul, avec la femme toujours là au milieu. 10. Alors, se redressant, Jésus lui dit : « Femme, où sont-ils ? Personne ne t'a condamnée ? » 11. Elle dit : « Personne, Seigneur. » Alors Jésus dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, désormais ne pèche plus. »
Magistrale leçon, sans pour autant tomber dans un moralisme malsain ! Jésus ne pose aucune question ; il ne cherche pas à connaître les raisons de cet adultère et encore moins à porter de jugement. Les mots qu’il écrit sur le sol demeurent énigmatiques, mais ses paroles ouvrent un champ de vérité et de liberté. Les vieux s’en vont les premiers, peut être ont-ils davantage succombé aux tentations par rapport aux jeunes encore sous le charme de leur épouse. Un face-à-face libérateur entre Jésus et cette femme clôt la scène. Elle retrouve comme une seconde jeunesse.
Jésus n’hésite pas à fréquenter les pécheresses, les impures et les possédées, sans se soucier du qu’en-dira-t-on. Il s’adresse librement aux femmes en public, attitude déshonorante et provocatrice, car la femme est porteuse du virus de la tentation. Pas de vaccin miraculeux pour Jésus, simplement le respect dans la dignité. Lors d’un repas, il accepte même d’être touché et parfumé par une femme :
Un Pharisien l'invita à manger avec lui ; il entra dans la maison du Pharisien et se mit à table. Et voici une femme, qui dans la ville était une pécheresse. Ayant appris qu'il était à table dans la maison du Pharisien, elle avait apporté un vase de parfum. Et se plaçant par derrière, à ses pieds, tout en pleurs, elle se mit à lui arroser les pieds de ses larmes ; et elle les essuyait avec ses cheveux, les couvrait de baisers, les oignait de parfum (Lc 7,36-38).
Jésus prend l’initiative de parler à une samaritaine qui appartient aux ennemis historiques des juifs depuis le schisme entre le Royaume du Nord et le Royaume du Sud. Cette ouverture d’esprit témoigne de la volonté de Jésus de faire de son message une bonne nouvelle universelle. La femme samaritaine devient un vecteur d’évangélisation :
Jn 4,7-29 Une femme de Samarie vient pour puiser de l'eau. Jésus lui dit : « Donne-moi à boire. »… La femme samaritaine lui dit : « Comment ! toi qui es juif, tu me demandes à boire à moi qui suis une femme samaritaine ? » Les Juifs en effet n'ont pas de relations avec les Samaritains... La femme lui dit : « Je sais que le Messie doit venir, celui qu'on appelle Christ. Quand il viendra, il nous expliquera tout. » Jésus lui dit : « Je le suis, moi qui te parle. » … La femme alors laissa là sa cruche, courut à la ville et dit aux gens : « Venez voir un homme qui m'a dit tout ce que j'ai fait. Ne serait-il pas le Christ ? »
Des femmes l’accompagnent tout au long de sa vie, de la naissance à sa mort. Durant la vie publique de Jésus, elles sont présentes dans la discrétion qui sied aux femmes de l’époque. Point d’adeptes du MLF dans les rangs, mais une féminisation qui trouve sa place notamment dans l’assistance matérielle (Lc 8,1-3). Elles sont encore présentes au pied de la croix, fidèles jusqu’au bout, alors que les disciples se font beaucoup plus discrets (Jn 19,25). Après la résurrection, ce sont des femmes qui sont les premiers témoins de la résurrection (Lc 24,1-11).