
La résurrection de Jésus
La résurrection de Jésus est le kérygme (l'essentiel) de la foi chrétienne. Sans cet événement, le christianisme serait tombé aux oubliettes, ou n'aurait été qu'une doctrine humaniste parmi tant d'autres. Cet évènement annonce notre propre résurrection.
1 Corinthiens 15,13 S'il n'y a point de résurrection des morts, Christ non plus n'est pas ressuscité. 14Et si Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est donc vaine, et votre foi aussi est vaine.
1 Thessaloniciens 4,14 Car, si nous croyons que Jésus est mort et qu'il est ressuscité, croyons aussi que Dieu ramènera par Jésus et avec lui ceux qui sont morts.
La résurrection transcende la raison et les athées n'hésitent pas à parler de fake news tant elle est incroyable. Ne serait-elle que le désir d'une immortalité qu'auraient retranscrit quelques scribes en mal d'émerveillement ? Ou est-elle une authentique promesse pour toute l'humanité ?
Premier-né d’entre les morts
La résurrection de Jésus est le prototype de la bonne nouvelle de la résurrection. Elle annonce notre propre résurrection.
Col 1,18. Et il est aussi la Tête du Corps, c'est-à-dire de l'Église : Il est le Principe, Premier-né d'entre les morts, il fallait qu'il obtînt en tout la primauté.
1Co 15,12-17. Or, si l'on prêche que le Christ est ressuscité des morts, comment certains parmi vous peuvent-ils dire qu'il n'y a pas de résurrection des morts ? S'il n'y a pas de résurrection des morts, le Christ non plus n'est pas ressuscité. Mais si le Christ n'est pas ressuscité, vide alors est notre message, vide aussi votre foi. Il se trouve même que nous sommes des faux témoins de Dieu, puisque nous avons attesté contre Dieu qu'il a ressuscité le Christ, alors qu'il ne l'a pas ressuscité, s'il est vrai que les morts ne ressuscitent pas. Car si les morts ne ressuscitent pas, le Christ non plus n'est pas ressuscité. Et si le Christ n'est pas ressuscité, vaine est votre foi.
Ac 10,40. Dieu l’a ressuscité le troisième jour.
1Co 15,3. Il est ressuscité le troisième jour, conformément aux Écritures.
Nous ne savons rien sur ce moment extraordinaire qui défie les lois de notre humanité. La découverte du tombeau vide n’est pas une preuve, mais une mise en route, un questionnement. L’événement n’est accessible qu’avec les yeux de la foi. C’est en sens que nous pouvons affirmer que Dieu donne la foi. Dieu ouvre symboliquement le tombeau pour que notre regard se convertisse à la résurrection. À nous d’y entrer !
Le « comment » de la résurrection nous échappe totalement. Dieu ne cherche pas à en démontrer le caractère authentique. Il laisse les convictions et les doutes s’installer dans le cœur des gens. Certains signes nous sont offerts juste pour nous inviter à nous mettre en chemin. En quarante jours (selon Luc), Jésus apporte les indices suffisants de sa réalité (Ac 1,3). Il prend une forme accessible à nos sens humains pour être crédible. Il mange même un poisson grillé sur la plage (Lc 24,42). Qu’est devenu ce poisson ? Ne cherchons pas une cohérence gastrique, là où Jésus vise seulement à montrer qu’il n’est pas un fantôme. Le symbole des apôtres n’hésite d’ailleurs pas à proclamer la résurrection de la chair avec toutes les ambiguïtés que revêt ce vocable . Jésus se manifeste à travers des gestes, des paroles et des symboles qui nous permettent de l’identifier. La marque des clous (Lc 24,39), la fraction du pain avec les disciples d’Emmaüs (Lc 24,13-35) et la pêche miraculeuse (Jean 21,1-25) font mémoire de la vie de Jésus avant sa mort. Ils assurent le lien dans l’histoire, entre l’avant et l’après.
Jésus ressuscité apparaît à plusieurs reprises, toujours avec une certaine discrétion, loin de toute manifestation journalistique. Il disparaît tout aussi soudainement. Son corps semble échapper à toute emprise spatio-temporelle. Il ne cherche pas à rencontrer les foules pour convaincre et convertir ceux qui l’ont rejeté et condamné. Sa puissance reste à l’image de son humanité. Il distille quelques signes puis s’en va rejoindre son père (Lc 24,51). Mais comment croire à la résurrection de Jésus sans preuve tangible ? Nous sommes tous des Thomas :
Si je ne vois dans ses mains la marque des clous, et si je ne mets mon doigt dans la marque des clous, et si je ne mets ma main dans son côté, je ne croirai point. (Jn 20,25).
Nous aimerions voir Jésus ressuscité. Ce serait tellement plus simple de croire. Est-ce si sûr ? Nous ne croyons pas toujours en l’amour humain qui nous tend les bras. Un homme-Dieu venant du ciel avec sa cohorte d’anges ne nous convaincrait pas davantage. Par ailleurs, nous n’avons pas conscience de la portée d’une telle demande. Voir Dieu de notre humanité terrestre, est-ce seulement réaliste et réalisable ? Cela suppose que nos sens soient en mesure de l’accueillir. Dieu dit à Moïse qu’il ne peut le voir de face sous peine de mort (Ex 33,20). Cela suppose aussi que notre raison soit capable de l’appréhender avec des connaissances bien limitées en matière de divinité. Comme le souligne Bernard Sesboüé :
Cela n’est pas possible, tout simplement parce que Dieu est Dieu et l’homme est homme. Comme le disait à-propos saint Augustin : « Si tu le comprends, ce n’est plus Dieu. » Il y a dans notre désir de connaître Dieu un danger d’idolâtrie, celui de construire un Dieu à notre portée .
Ne faut-il pas passer par le creuset de la mort, c’est-à-dire être transformés, pour connaître pleinement Dieu ? Dieu nous invite à une foi et non à une conviction scientifique. Il se livre au cœur d’une relation et non dans un théorème. Il vient à notre rencontre dans l’amour et non dans une armée toute puissante. Il nous fait la promesse que la mort n’est pas le dernier mot de notre histoire et que nous sommes tous appelés à ressusciter en lui. Nous pouvons proclamer avec Paul :
Ô mort, où est ta victoire ? (1Co 15,55).
Dans ce mystère de Jésus ressuscité, nous percevons la certitude que Dieu n’abandonne pas l’humanité de manière définitive. S’il se tait de notre vivant, il vient nous chercher lorsque l’espoir cède sa place à l’espérance, lorsque nous rendons notre dernier souffle. N’est-ce pas dans ce moment dramatique que jaillit la puissance divine, dans cet événement qui réclame un total abandon ? La mort ouvre la porte de l’impossible. Autant la naissance relève de notre humanité terrestre, autant la mort nous échappe totalement. C’est alors que Dieu manifeste sa puissance, hors de toute approche sensorielle ou technique. Tout se passe à l’intérieur d’une tombe dont Dieu détient le secret de l’ouverture. La mort scelle notre vie sur terre et il est humainement impossible de pénétrer le royaume des cieux par nos seules forces. Notre entrée dans le nouveau monde est suspendue à la puissance de Dieu. Le mystère demeure entier quant au comment de ce passage vers l’au-delà. Au moment de sa mort, Jésus annonce simplement au bon larron crucifié à ses côtés :
Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis. (Lc 23,43b).
Les signes de sa résurrection
Le premier signe est celui du tombeau vide (Mt 28,7). Le second réside dans les apparitions de Jésus (Jn 20,15 ; Jn 20,24-28).
Mt 28,6-7. Il n'est pas ici, car il est ressuscité comme il l'avait dit. Venez voir le lieu où il gisait, et vite allez dire à ses disciples : Il est ressuscité d'entre les morts, et voilà qu'il vous précède en Galilée; c'est là que vous le verrez.
Jn 20,11-17. Marie se tenait près du tombeau, au-dehors, tout en pleurs. Or, tout en pleurant, elle se pencha vers l'intérieur du tombeau
et elle voit deux anges, en vêtements blancs, assis là où avait reposé le corps de Jésus, l'un à la tête et l'autre aux pieds.
Ceux-ci lui disent : « Femme, pourquoi pleures-tu ? » Elle leur dit : « Parce qu'on a enlevé mon Seigneur, et je ne sais pas où on l'a mis. »
Ayant dit cela, elle se retourna, et elle voit Jésus qui se tenait là, mais elle ne savait pas que c'était Jésus.
Jésus lui dit : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » Le prenant pour le jardinier, elle lui dit : « Seigneur, si c'est toi qui l'as emporté, dis-moi où tu l'as mis, et je l'enlèverai. »
Jésus lui dit : « Marie ! » Se retournant, elle lui dit en hébreu : « Rabbouni ! » - ce qui veut dire : « Maître ».
Jésus lui dit : « Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père. Mais va trouver mes frères et dis-leur : je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. »
Ce qui est proprement exceptionnel dans cette scène, considérée à l'intérieur du récit évangélique, c'est le caractère suivant : ici, le Christ écarte expressément le toucher de son corps ressuscité. À aucun autre moment Jésus n'a interdit ni refusé qu'on le touche. Ici, au matin de Pâques, et lors de sa première apparition, il retient ou il prévient le geste de Marie-Madeleine. Ce qui ne doit pas être touché, c'est le corps ressuscité. Nous pouvons aussi bien comprendre qu'il ne doit pas être touché parce qu'il ne peut pas l'être : il n'est pas à toucher. Cela ne signifie pourtant pas qu'il s'agisse d'un corps aérien ou immatériel, spectral ou fantasmagorique. Jésus se dérobe à un contact auquel il pourrait se prêter. Dans l'original grec de Jean, la phrase de Jésus se dit: « Mè mou haptou. »Dans un pareil emploi, le verbe haptein - « toucher » - peut également prendre le sens de « retenir, arrêter ». Le Christ ne veut pas être retenu, car il part : il le dit aussitôt, il n'a pas encore rejoint le Père, et il part vers lui. Jean-Luc Nancy, philosophe. Extrait de "Noli me tangere", Bayard éditions, 2003.
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Quatre traits se retrouvent dans les apparitions :
- Jésus ne s’adresse qu’à des croyants ;
- l’initiative appartient toujours à Jésus ;
- la rencontre pointe sur l’identification du crucifié ; Jésus ne se contente pas d’apparaître, mais à travers ses gestes et ses paroles, Jésus fait le lien entre sa vie d’avant la mort et sa vie de ressuscité. Deux exemples : la pêche miraculeuse et les disciples d’Emmaüs (Lc 5,1-11 ; Jn 21,4; Lc 24,30-31).
- la rencontre débouche sur un envoi en mission.
Le corps de Jésus ressuscité
Jésus prend une forme accessible à nos sens humains pour être crédible (Lc 24,36-53 ; Jn 20,24-29 et Jn 21,9-13). Il se donne à voir d'une manière soudaine et gratuite qui échappe aux lois de notre espace et de notre temps. Jésus ressuscité apparaît aux disciples sous une forme occasionnelle et provisoire pour prouver qu'il est vraiment ressuscité. Occasionnelle, en ce sens qu'elle n'a d'autre but que d'assurer la foi des disciples. Provisoire dans le sens où elle cesse d'être après l'ascension (Lc 24,51).
Lc 24,39 Voyez mes mains et mes pieds ; c'est bien moi ! Palpez-moi et rendez-vous compte qu'un esprit n'a ni chair ni os, comme vous voyez que j'en ai. » Ayant dit cela, il leur montra ses mains et ses pieds. Et comme, dans leur joie, ils ne croyaient pas encore et demeuraient saisis d'étonnement, il leur dit : Avez-vous ici quelque chose à manger ? Ils lui présentèrent un morceau de poisson grillé. Il le prit et le mangea devant eux.
Jn 20,24-28 Or Thomas, l'un des Douze, appelé Didyme, n'était pas avec eux, lorsque vint Jésus. Les autres disciples lui dirent donc : « Nous avons vu le Seigneur ! » Mais il leur dit : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, et si je ne mets pas ma main dans son côté, je ne croirai pas. » Huit jours après, ses disciples étaient de nouveau à l'intérieur et Thomas avec eux. Jésus vient, les portes étant closes, et il se tint au milieu et dit : « Paix à vous. » Puis il dit à Thomas : « Porte ton doigt ici : voici mes mains ; avance ta main et mets-la dans mon côté, et ne deviens pas incrédule, mais croyant. ». Thomas lui répondit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! »
Lc 24,31 Leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent... mais il avait disparu de devant eux.
Lc 24,51 Et il advint, comme il les bénissait, qu'il se sépara d'eux et fut emporté au ciel.