Les développements ci-dessous sont notamment extraits du livre La bonne nouvelle de la sexualité, dont le plan est présenté sur ce lien.
La morale sexuelle
La sexualité romaine et grecque
Le modèle patriarcal gouverne la société. L’homme cultive la virtus (force morale et virilité) et la femme la pudicitia (autodiscipline et pudeur). Les femmes mariées doivent posséder trois qualités essentielles : la chasteté, la fidélité et la fécondité. Les ébats conjugaux se déroulent la nuit avec modération et pudeur ; la femme se préserve d’une nudité intégrale. Elles ne prennent pas d’initiatives, mais ne refusent pas celles de leur mari. À l’inverse, les prostituées, publiquement admises, offrent leur corps aux hommes pour le plaisir.
La pluralité des partenaires ne choque personne. Aucune obligation légale n’impose la fidélité sexuelle au mari.
L’orientation sexuelle ne trouble pas l’ordre public. Les concepts d’hétérosexualité, d’homosexualité et de bisexualité sont d’ailleurs étrangers aux penseurs de cette époque. Les Athéniens des classes aisées pratiquent la pédérastie. Les Romains tolèrent les relations avec des « mignons », ces « jeunes garçons nus qui deviennent les échansons des banquets.
Le stoïcisme et le néo-platonisme apportent les arguments en faveur d’une conjugalité non passionnelle. Le désir du plaisir sexuel détruit la raison jusqu’à la folie.
Adultère est l’amoureux trop ardent de sa femme. À l’égard de la femme d’autrui, tout amour est honteux ; à l’égard de la sienne excessif. L’homme sage doit aimer son épouse avec jugement, non avec passion : il maîtrise l’emportement de la volupté et ne se porte pas impétueusement à l’accouplement. SÉNÈQUE, cité par Jean-Louis FLANDRIN, Le sexe et l’occident, Seuil, 1981, p. 207.
La Tradition de l’Église
La primauté de la procréation sur le plaisir
La finalité des relations sexuelles est la procréation qui doit se faire exclusivement dans le cadre du mariage. Le mariage devient en ce sens le remède à la concupiscence. Certains auteurs n’hésitent pas à exalter la virginité et la continence, car elles seules permettent la communion avec Dieu. Le bonheur est lié à la continence comme le montre cet extrait des Actes de Paul :
Heureux ceux qui gardent la chasteté de leur chair, parce qu'ils seront le temple de Dieu. Heureux les continents parce qu'avec Dieu s'entretiendront... Heureux ceux qui ont des femmes comme s'ils n'en avaient pas, parce qu'ils auront Dieu comme héritage (Cité par Ch. MUNIER, Mariage et virginité dans l'Église ancienne, Peter Lang, 1987, p. 52).
Le plaisir et la passion charnelle sont bannis, car ils sont dangereux pour l'homme et pour la société. Ils provoquent le trouble et menacent l'équilibre intérieur. Le mari ne doit pas se comporter en amant, ni la femme en maîtresse. La seule finalité est la procréation. Ainsi, les relations sexuelles pendant la grossesse sont interdites parce qu'elles ont pour finalité le plaisir. Athénagoras le rappelle très poétiquement à l'empereur Marc-Aurèle au IIe siècle :
De même que l'agriculteur qui a jeté sur la terre les semences attend patiemment la moisson sans recommencer à semer, de même la procréation des enfants mesure la satisfaction que nous donnons à notre désir (ATHENAGORAS, Supplique au sujet des chrétiens, 33, Migne, P. G., VI, 965; cité par Ch. MUNIER, Mariage et virginité dans l'Église ancienne, Peter Lang, 1987, p. 38).
La passion amoureuse avec tout l’emportement du plaisir est condamnée. Un passage de saint Jérôme, reprenant Sénèque, est particulièrement évocateur à ce sujet :
Adultère est l'amoureux trop ardent de sa femme. À l'égard de la femme d'autrui, tout amour est honteux; à l'égard de la sienne excessif. L'homme sage doit aimer son épouse avec jugement, non avec passion : il maîtrise l'emportement de la volupté et ne se porte pas impétueusement à l'accouplement (Jérôme, Contre Jovinien, I, 49, Migne, P. L. 23, 280 et 281, cité par J.-L. FLANDRIN, op. cit., p. 207).
Il est dit en sixième lieu: « Et il ne s'approchera pas d'une femme étrangère, ou même de sa femme, durant son époque menstruelle. » Il entre dans la constitution des femmes d'être incommodées chaque mois par une trop grande abondance de sang, et d'en être soulagées par une évacuation sanguine. Si l'homme, dans cette phase anormale de la vie des femmes, cohabite avec l'une d'elles, la conception qui en résulte est viciée, dit-on, par l'impureté de sa source; de telle sorte que les lépreux proviennent , selon l'opinion commune, d'une pareille cohabitation , de même que les enfants affligés dès leur naissance de difformités monstrueuses. Il est donc prescrit à tous les hommes de ne point cohabiter non-seulement avec des femmes étrangères, mais même avec la leur propre, afin d'obéir à ce commandement de l'Écriture : «Croissez et multipliez, et remplissez la terre, » et de n'approcher de leur femme qu'aux époques normales et propres à la cohabitation; sinon de s'en abstenir entièrement, selon ces paroles de l'Apôtre et de l’Ecclésiaste : « Il est un temps destiné aux chastes embrassements, il en est un autre où (651) il faut les fuir. » Que l'épouse entraînée par sa passion se garde donc de provoquer son mari; que le mari à son tour, dans la coupable pensée qu'il peut disposer en tous temps des désirs de sa femme, se garde d'être trop exigeant. « Que chacun ait grand soin de conserver son vase dans sa sainteté et sa chasteté originelle. Voici une belle maxime, extraite des sentences du pythagoricien Xystus : « Celui qui aime trop passionnément commet un adultère avec sa propre femme. » (Commentaires sur Ézéchiel, http://jesusmarie.free.fr/jerome_fragments_de_commentaires_sur_la_bible.html).
De nombreux théologiens attirent l'attention des époux sur le fait que la recherche du plaisir est un péché véniel, voire mortel. Telle est la conception augustinienne des relations conjugales :
L'acte conjugal aux fins de la procréation est sans faute; en vue de satisfaire la concupiscence, mais avec son conjoint, pour des raisons de fidélité, il comporte une faute vénielle; quant à l'adultère ou à la fornication, c'est un péché mortel (AUGUSTIN, De bono conjugali, VI, 6, Desclée, 1937).
Une seule position est admise : la position naturelle, c'est-à-dire la femme allongée sur le dos et sous l'homme. Elle permet selon les théologiens une meilleure diffusion et rétention de la semence. De plus, l'homme étant supérieur à la femme, il est normal que celui-ci soit au-dessus. L'homme doit dominer la femme (Gn 3, 16) ; il doit être actif et la femme passive. Les positions retro sont rejetées parce qu'elles rabaissent l'homme au rang de l'animal (Cf. J.-L. FLANDRIN, Le sexe et l'occident, Seuil, 1981, pp. 343-344, notes 40 à 45).
A la même époque (XIIe), de nombreux clercs ou moines valorisent ouvertement la conjugalité, alors que l'amour conjugal se trouve bafoué dans la poésie courtoise et les fabliaux et que l'usage même de la sexualité est contesté par les manichéens. Ainsi, saint Bernard, dans un
sermon prononcé vers 1144 contre des hérétiques, reprend saint Paul, selon lequel « le mariage
est digne d'honneur et le lit nuptial est immaculé » (Hb 13, 4) ; puis il affirme fortement : « le
mariage, qui est honnête, ne peut avoir été créé honteux par l'auteur de l'honnêteté ». Egbert
de Schônau (1184) ne cesse de répéter dans un sermon contre les cathares que Vopus conjugale
« n'est pas un mal », mais doit être accompli avec tempérance « de façon à garder en tout le
respect que le mari doit à Dieu en sa femme » ; il ajoute fort prudemment : « Comment cela doit
se faire, les hommes sensés le savent bien ». De même, cinq chartes de douaire du Laonnois,
rédigées par des clercs durant les années 1163-1181 et probablement lues par l'homme devant
l'église avant le mariage, contiennent des préambules qui font l'éloge des noces : en substance,
affirment-elles, l'état conjugal n'a pas été souillé par le péché, comme en témoignent le conjugium
d'Adam et Eve et le miracle des Noces de Cana, car Dieu le Père « préfigure » (prefiguraref)
dans l'« alliance » (foedus) matrimoniale le sacrement du Christ et de l'Eglise.
Grégoire le Grand, dans sa lettre au moine Augustin, précise que ce
n'est pas l'union sexuelle en soi qui est coupable, mais la volupté (J.-L. Flandrin, Un temps pour
embrasser, Paris, Seuil, 1983, p. 109). Au XIIe s., Hugues de Saint- Victor, très influencé par la
philosophie néo-platonicienne, demeure fidèle à cette approche : selon lui, le désir sensuel rend la
relation conjugale nécessairement peccamineuse ; aussi, « si la faute du plaisir illicite ne souillait
pas celle qui conçoit, jamais le châtiment de la douleur ne torturerait celle qui enfante»58. Mais
est-ce pour cela que, « sous la "charité" que créait "la loi du mariage" », il n'y a « rien, et
certainement pas le désir, érasé, illicite » (p. 408) ? En distinguant la passion de l'amour conjugal, les
théologiens rappellent d'abord que le second ne peut se réduire à la première, car la caritas est
d'abord un don — don mutuel entre les époux, et entre eux-mêmes et Dieu.
La morale très réaliste des pénitentiels cherche d'ailleurs à imposer un usage modéré de la
sexualité, en multipliant les interdits du temps pour les époux (J.-L. Flandrin, Un temps pour
embrasser..., op. cit., p. 128-158), sans pour autant jamais dénoncer en soi le plaisir. Et s'ils
augmentent progressivement leurs exigences contre certains « abus du mariage », ces dernières ne
dépassent jamais les pénitences pour « déviations sexuelles » : les pénitences les plus faibles (en
jours ou en semaines) frappent toujours l'onanisme et les accouplements conjugaux durant les
périodes prohibées ou en position rétro ; la seule exception est celle de l'incontinence de Carême,
dont le non-respect est parfois puni d'un an de pénitence pour les époux, c'est-à-dire autant que
certains cas de fornication. Mais, la plupart du temps, la fornication, la sodomie et l'adultère sont
plus sévèrement punis, de une à plusieurs années de pénitence.
Voir des exemples de pénitence.
Au XIIe s., le Supplément à la Somme Théologique, rédigé après la mort de saint Thomas d'Aquin, reprend naturellement l'ancienne
condamnation de l'époux amant passionné : « l'époux qui cherche le plaisir plus que ne le permettent
les lois du mariage, au point, par exemple, de ne pas considérer dans sa femme la qualité d'épouse
mais de voir simplement en elle une femme quelconque et au point d'être prêt à faire de même
avec elle, si elle n'était pas sa femme, cet époux pèche mortellement. Un tel homme peut être
appelé l'amant passionné de son épouse, car la passion le pousse au-delà des biens du mariage.
Rechercher au contraire le plaisir, mais sans enfreindre les lois du mariage, c'est-à-dire, ne le
chercher avec personne d'autre que son épouse, est seulement péché véniel.
Surtout, les XIe et XIIe siècles connaissent une mutation fondamentale : le plaisir sexuel, légitimé
par Augustin, est désormais valorisé en soi par certains clercs. Ainsi, l'évêque Arnould de Lisieux
(1184) adresse à deux jeunes fiancés un poème, récemment mis en valeur par Pascale Bourgain,
où le désir sort grandi de la chaste attente du mariage et pourra s'épanouir dans l'union sexuelle
conjugale : « Cette heureuse union arrivera par l'étreinte des deux, et les corps se trouveront en
accord avec les âmes. L'utile attente donnera les fruits désirés, et les vœux inquiets enfanteront
d'heureux jours ». Le désir, rejeté par la courtoisie hors du mariage, est réintégré par l'évêque
de Lisieux au sein de la sexualité conjugale.
Passé 1200, ce nouveau regard est intégré à la théologie par saint Thomas d'Aquin, grâce à la
redécouverte de la philosophie aristotélicienne et son intégration à la pensée chrétienne. En
partant d'une analyse de la nature, le Docteur angélique propose une conception du mariage qui
réconcilie totalement l'âme et le corps : dans sa Somme contre les gentils, il reconnaît comme
pleinement légitime le « plaisir propre aux relations sexuelles », car « la fin de ces plaisirs naturels,
c'est que les êtres animés ne s'abstiennent pas, par fatigue, d'actes qui sont nécessaires à la
nature », en l'occurrence la génération. Il ouvre même la voie à une valorisation intrinsèque de
ce plaisir, en réaffirmant l'idée aristotélicienne d'un plaisir qui « parfait l'opération » ; d'ailleurs,
selon le Supplément à la Somme Théologique, « accomplir l'acte conjugal sous l'inspiration de la
vertu de justice, pour payer son dû, ou de la vertu de religion, pour mettre au monde des êtres
destinés à rendre un culte à Dieu, sera chose méritoire».
En fait, loin de s'imposer « pendant dix-huit siècles » comme le pense J.-L. Flandrin, la morale
rigoriste chrétienne ne constitue qu'un courant au sein du christianisme médiéval ; à l'opposé,
Augustin légitime le plaisir sexuel des conjoints, tandis que Thomas d'Aquin, qui devient vite la
principale référence théologique en Occident, intègre son mérite dans le debitum conjugale chrétien.
Deswarte Thomas. Une sexualité sans amour ? Sexualité et parenté dans l'Occident médiéval. In: Cahiers de civilisation
médiévale, 48e année (n°190), Avril-juin 2005. pp. 141-164. Voir le lien dans la bibliothèque.
Il faut néanmoins attendre le XXe siècle pour que l'acte sexuel et le plaisir prennent une dimension relationnelle. En 1951, Pie XII réhabilite officiellement le plaisir :
Le Créateur, dit-il, a ordonné qu'en accomplissant cette fonction, le mari et la femme éprouvent du plaisir et de la joie dans leur chair et dans leur esprit. En recherchant donc ce plaisir et en en profitant, les couples ne font rien de mal. Ils acceptent ce que le Créateur leur a donné. Néanmoins, les époux doivent savoir se maintenir dans les limites d’une juste modération (Acta apostolicae Sedis, cité dans G. BECHTEL, La chair, le diable et le confesseur, Plon, 1994, p. 360. Repris par le catéchisme de l’Église catholique, n° 2362. L'expression « ne font rien de mal » réhabilite le plaisir, mais n'affirme pas la bonté du plaisir).
Un virage important se réalise avec Jean-Paul II. Ses nombreuses théologies du corps arrachent la sexualité de son carcan moralisateur. La jouissance simultanée des époux prend le caractère d’un acte de vertu.
L’amour exige que les réactions de l’autre personne - le « partenaire » sexuel - soient pleinement prises en compte. Les sexologues affirment que la montée du désir diffère chez la femme et chez l’homme - il monte plus lentement et retombe plus lentement. L’homme doit prendre cette différence en compte […] pour que les époux atteignent tous les deux l’orgasme […] autant que possible simultanément. Le mari doit faire cela non dans une visée hédoniste, mais en vertu de l’altruisme. […] Si l’on considère à quel point le désir masculin monte plus vite, une telle tendresse de sa part dans l’acte sexuel prend le caractère d’un acte de vertu (Karol WOJTYLA, Amour et responsabilité, Stock, 1978).
Benoît XVI poursuit la réhabilitation de l’éros et compare ce désir sexuel à une montée en extase vers le divin.
L’éros veut nous élever « en extase » vers le Divin, nous conduire au-delà de nous-mêmes (BENOIT XVI, Dieu est amour, 5).
Humanæ vitæ
Humanæ vitæ est une lettre encyclique « sur le mariage et la régulation des naissances » promulguée par le pape Paul VI le 25 juillet 1968 et rendue publique quatre jours plus tard. Ce titre correspond aux deux premiers mots de la version latine du texte, qui commence ainsi : « Humanæ vitæ tradendæ munus gravissimum », c'est-à-dire « Le très grave devoir de transmettre la vie humaine ».
Dans cette encyclique, le Magistère rappelle que la doctrine de l'Église sur le mariage est fondée « sur le lien indissoluble, que Dieu a voulu et que l'homme ne peut rompre de son initiative, entre les deux significations de l'acte conjugal : union et procréation » (HV, 12).
Le pape insiste également sur le concept de « paternité responsable », qui demande l'intervention de la raison et de la volonté. Il est demandé aux époux de conformer leur conduite à l'intention créatrice de Dieu.
Par rapport aux conditions physiques, économiques, psychologiques et sociales, la paternité responsable s'exerce soit par la détermination réfléchie et généreuse de faire grandir une famille nombreuse, soit par la décision, prise pour de graves motifs et dans le respect de la loi morale, d'éviter temporairement ou même pour un temps indéterminé une nouvelle naissance. HV, 10.
Le pape exprime la doctrine de l'Église catholique sur la contraception artificielle :
En conformité avec ces points fondamentaux de la conception humaine et chrétienne du mariage, nous devons encore une fois déclarer qu'est absolument à exclure, comme moyen licite de régulation des naissances, l'interruption directe du processus de génération déjà engagé, et surtout l'avortement directement voulu et procuré, même pour des raisons thérapeutiques. Est pareillement à exclure, comme le Magistère de l'Église l'a plusieurs fois déclaré, la stérilisation directe, qu'elle soit perpétuelle ou temporaire, tant chez l'homme que chez la femme.
Est exclue également toute action qui, soit en prévision de l'acte conjugal, soit dans son déroulement, soit dans le développement de ses conséquences naturelles, se proposerait comme but ou comme moyen de rendre impossible la procréation. HV, 14
L'encyclique encourage toutefois le recours aux méthodes naturelles de régulation des naissances, tout en rappelant discrètement que celles-ci ne sont licites qu'à certaines conditions :
Si donc il existe, pour espacer les naissances, de sérieux motifs dus, soit aux conditions physiques ou psychologiques des conjoints, soit à des circonstances extérieures,… HV, 16.
La doctrine du catéchisme de l’Église catholique
Le catéchisme de l’Église catholique est promulgué le 11 octobre 1992. Les questions traitant de la sexualité sont rattachées au 6e commandement « Tu ne commettras pas l’adultère », ce qui place la sexualité dans le cadre d’une morale.
Une grande place y est réservée à la chasteté qui se définit comme l’intégration réussie de la sexualité dans la personne (2337). La chasteté comporte un apprentissage de la maîtrise de soi (2339). Ce qui implique la connaissance de soi, la pratique d’une ascèse adaptée aux situations rencontrées (2340). "La chasteté nous recompose ; elle nous ramène à cette unité que nous avions perdue en nous éparpillant " (S. Augustin, conf. 10, 29). La vertu de chasteté est placée sous la mouvance de la vertu cardinale de tempérance, qui vise à imprégner de raison les passions et les appétits de la sensibilité humaine (2341). La maîtrise de soi est une œuvre de longue haleine (2342). La chasteté connaît des lois de croissance (2343). La charité est la forme de toutes les vertus. Sous son influence, la chasteté apparaît comme une école de don de la personne. La maîtrise de soi est ordonnée au don de soi (2346). Les personnes mariées sont appelées à vivre la chasteté conjugale ; les autres pratiquent la chasteté dans la continence (2349). Les fiancés sont appelés à vivre la chasteté dans la continence (2350).
Les offenses à la chasteté. Par la luxure qui se définit comme est un désir désordonné ou une jouissance déréglée du plaisir vénérien. Le plaisir sexuel est moralement désordonné, quand il est recherché pour lui-même, isolé des finalités de procréation et d’union (2351). Par la masturbation (2352), la fornication (2353), pornographie (2354), la prostitution (2355), le viol (2356).
Les actes d’homosexualité sont intrinsèquement désordonnés " (CDF, décl. " Persona humana " 8). Ils sont contraires à la loi naturelle. Ils ferment l’acte sexuel au don de la vie. Ils ne procèdent pas d’une complémentarité affective et sexuelle véritable. Ils ne sauraient recevoir d’approbation en aucun cas (2357). Les personnes homosexuelles sont appelées à la chasteté (2359).
La sexualité est ordonnée à l’amour conjugal de l’homme et de la femme (2360). La sexualité, par laquelle l’homme et la femme se donnent l’un à l’autre par les actes propres et exclusifs des époux, n’est pas quelque chose de purement biologique, mais concerne la personne humaine dans ce qu’elle a de plus intime. Elle ne se réalise de façon véritablement humaine que si elle est partie intégrante de l’amour dans lequel l’homme et la femme s’engagent entièrement l’un vis-à-vis de l’autre jusqu’à la mort " (FC 11) (2361).
Les actes qui réalisent l’union intime et chaste des époux sont des actes honnêtes et dignes. Vécus d’une manière vraiment humaine, ils signifient et favorisent le don réciproque par lequel les époux s’enrichissent tous les deux dans la joie et la reconnaissance " (GS 49, § 2). La sexualité est source de joie et de plaisir (2362). Le Créateur lui-même (...) a établi que dans cette fonction [de génération] les époux éprouvent un plaisir et une satisfaction du corps et de l’esprit. Donc, les époux ne font rien de mal en recherchant ce plaisir et en en jouissant. Ils acceptent ce que le Créateur leur a destiné. Néanmoins, les époux doivent savoir se maintenir dans les limites d’une juste modération (Pie XII, discours 29 octobre 1951).
Par l’union des époux se réalise la double fin du mariage : le bien des époux eux-mêmes et la transmission de la vie. On ne peut séparer ces deux significations ou valeurs du mariage sans altérer la vie spirituelle du couple ni compromettre les biens du mariage et l’avenir de la famille (2363).
La fécondité est un don, une fin du mariage, car l’amour conjugal tend naturellement à être fécond. L’enfant ne vient pas de l’extérieur s’ajouter à l’amour mutuel des époux ; il surgit au cœur même de ce don mutuel, dont il est un fruit et un accomplissement. Aussi l’Église, qui " prend parti pour la vie " (FC 30), enseigne-t-elle que " tout acte matrimonial doit rester par soi ouvert à la transmission de la vie " (HV 11). " Cette doctrine, plusieurs fois exposée par le magistère, est fondée sur le lien indissoluble que Dieu a voulu et que l’homme ne peut rompre de son initiative entre les deux significations de l’acte conjugal : union et procréation (2366).
Un aspect particulier de cette responsabilité concerne la régulation de la procréation. Pour de justes raisons (cf. GS 50), les époux peuvent vouloir espacer les naissances de leurs enfants. Il leur revient de vérifier que leur désir ne relève pas de l’égoïsme, mais est conforme à la juste générosité d’une paternité responsable. En outre ils régleront leur comportement suivant les critères objectifs de la moralité (2368).
La sexualité n’est vraiment humaine lorsqu’elle est intégrée dans la relation de personne à personne, dans le don mutuel entier et temporellement illimité, de l’homme et de la femme (2337).
L’acte sexuel doit prendre place exclusivement dans le mariage ; en dehors de celui-ci, il constitue toujours un péché grave et exclut de la communion sacramentelle (2390).
En conclusion
Que faut-il retenir de la doctrine officielle de l’Église ? Tout d’abord une constance dans son discours concernant les interdits majeurs qui mettent en cause la dignité et l’intégrité de la personne (débauche, prostitution, bestialité, inceste, adultère, viol…).
Elle a par ailleurs aussi toujours placé la relation sexuelle dans le cadre du mariage et dans la perspective de la procréation.
Ce n’est que dans le courant du XXe siècle qu’elle commence à parler de la bonté du plaisir.