Pourquoi ?
Le mal nous gifle de questions. « Pourquoi ? Pourquoi moi ? » Ces interrogations atteignent une intensité paroxystique dès que l’on croit en un Dieu unique, infiniment sage, bon et tout-puissant. Impossible alors de ne pas lui demander raison du mal et de lui confier, ou crier, nos « Pourquoi ? ». S’il est unique, sa responsabilité est engagée. S’il est sage, il ne peut nous renvoyer à l’absurde. S’il est bon, il ne peut « permettre » le mal. S’il est tout-puissant, il doit le vaincre.
Job cherche désespérément sens à son malheur. La réponse de Dieu ne l’enferme pas dans la nuit d’une énigme irrationnelle et obscure, mais fait lever pour lui une aube de sens : le mal existe, il n’est pas omnipotent, Dieu lui a fixé des limites, au sein d’un projet englobant de création, de vie, dont le secret n’est pas encore dévoilé. Il ne le sera que sur la Croix, contemplée au clair de la Résurrection.
Le passage du « pourquoi » (warum ?) au « pour quoi » (wozu ?) pourrait bien indiquer le chemin à suivre. C’est en tout cas ce que Jésus suggère à propos de l’aveugle-né (Jn 9) : il n’y a rien, ou pas grand-chose, à chercher derrière le mal (un péché), mais quelque chose peut être attendu devant le mal (l’accomplissement d’une œuvre de Dieu). Pour autant, le « pourquoi » (unde malum ?) ne saurait être éludé.
Le mal : Dieu responsable et innocent, Réflexions inspirées par A. Gesché, Michel Salamolard, NRT 127-3 (2005), p. 373-388, https://www.nrt.be/fr/articles/le-mal-dieu-responsable-et-innocent-629